4. La résidence D : des actifs à résidence unique plus soudés, des relations intenses avec la responsable

Cette résidence a ceci de spécifique que quelques actifs à résidence unique entretiennent des liens étroits entre eux. Ils se visitent quotidiennement, effectuent des sorties communes. Les relations apparaissent fréquentes et intenses.

Comment expliquer ces liens, alors même que nous avons argumenté précédemment que les relations entre les actifs étaient ambivalentes et que le partage du même stigmate les empêchait d’être soudés ?

Ces actifs sont demandeurs d’emploi. Leur plus forte cohésion est liée en partie à cette situation commune.

Les liens intenses qu’ils entretiennent entre eux ne sont également pas indépendants du rôle de la responsable de la résidence.

Agée d’une trentaine d’années, elle est présente en journée et habite l’immeuble en permanence. Elle fait visiter les studios, s’occupe du ‘‘service petit déjeuner’’ ainsi que de l’entretien des espaces collectifs et des logements (ménage effectué une fois par mois et compris dans le loyer).

Son bureau est situé à droite de l’entrée et comprend une large baie vitrée permettant d’apercevoir l’intérieur dès que l’on pénètre dans l’immeuble. Elle y est rarement seule. Fréquemment des habitants (surtout des étudiants) lui rendent visite et s’entretiennent longuement avec elle.

Cette responsable fait l’unanimité auprès des habitants. Ils louent sa gentillesse, sa disponibilité, et sa spontanéité. Qu’ils soient actifs ou étudiants la plupart déclarent entretenir de très bonnes relations avec elle. Ils l’appellent pas son prénom, certains la considèrent comme une amie. Nombreux sont ceux à avoir fait référence aux services qu’elle leur avait rendus (elle arrose les plantes en leur absence, aide les étudiants à remplir leur dossier d’aide au logement par exemple).

Les relations entre habitants et responsable ne semblent cependant pas s’actualiser dans les mêmes lieux pour les actifs et les étudiants. Les premiers l’invitent plutôt chez eux. Les seconds lui rendent visite dans son bureau. Dès lors, les liens entre étudiants et responsable sont susceptibles d’être davantage connus par l’ensemble des habitants (ils sont plus visibles) que ceux entretenus avec les actifs. Le fait que les relations avec ces derniers s’inscrivent plutôt dans l’espace clos du logement souligne l’intimité des liens, comme confirme l’idée selon laquelle les actifs tendent à se soustraire au regard des autres habitants en se repliant sur leur logement.

Les actifs à résidence unique ont également précisé qu’elle était à l’origine des liens forts qui existaient entre eux : elle a joué le rôle d’intermédiaire en organisant et en participant à des sorties communes. Ainsi, si ces actifs ont intériorisé comme les autres actifs la configuration des relations entre les habitants qui tend à imposer leur présence comme illégitime, leur situation sociale commune ainsi que l’intervention de la responsable, a pu permettre l’instauration d’une sociabilité de voisinage forte, a valeur de soutien.