5.1.2 Notre proposition

C’est notre expérience de l’enseignement du portugais à des professionnels, dans le cadre de la formation en entreprise, qui nous a conduite à vouloir élaborer un dictionnaire. En effet, la langue portugaise est de plus en plus enseignée en entreprise, en raison de l’ouverture du marché brésilien (et, dans un moindre proportion, en raison du marché portugais), et l’on ressent une véritable lacune quant au matériel didactique adapté à ce public. Comme nous l’avons vu dans le paragraphe précédent, les dictionnaires bilingues ou multilingues spécialisés se présentent tous sous la forme de listes de termes. De plus, ces ouvrages, publiés au Portugal ou au Brésil, sont plus adaptés à un public lusophone qu’à un public francophone. Notre intention est donc de proposer un dictionnaire qui pourrait éventuellement combler une partie de ces lacunes. Il convient de dire que ce n’est qu’une proposition, qui aura besoin d’être validée.

Notre dictionnaire est donc destiné à des francophones utilisant la langue portugaise dans un contexte professionnel (échanges commerciaux). C’est pourquoi l’outil métalinguistique est la langue française. Les utilisateurs visés (cadres et assistants commerciaux en relation suivie avec le Brésil) doivent pouvoir comprendre et décoder un langage économique et commercial qui n’est pas celui des théoriciens, mais celui des personnes qui font l’économie et le commerce, qui les “ parlent ”. C’est ce qui nous a conduite à travailler à partir d’un corpus de textes journalistiques. Nous proposons donc un dictionnaire de décodage. Décodage de la langue, mais aussi décodage d’une situation précise : comment comprendre un contexte économique typiquement brésilien à travers les mots qui servent à le décrire ? Les termes doivent ainsi être la clé d’un décodage plus vaste. C’est ce qui nous a amenée à proposer non seulement un équivalent français du terme portugais, mais aussi une définition, une explication, et une contextualisation. Notre démarche est donc en grande partie didactique. Nous avons d’ailleurs soumis notre dictionnaire à un groupe de personnes ayant suivi une formation en langue portugaise et utilisant cette langue dans leur travail et ce type de travail semble leur convenir.

Nous leur avons donné une version imprimée du dictionnaire en leur demandant de l’utiliser dans leur travail, dans la mesure du possible. Nous avons laissé passer quelques mois, et leur avons posé certaines questions concernant ce dictionnaire. Il semble tout d’abord que ces personnes regrettent toutes le manque de dictionnaires bilingues français-portugais spécialisés. Ce n’est bien sûr pas une surprise, et ce problème ne sera résolu que lorsque le public susceptible d’être intéressé par ce genre d’ouvrage sera plus nombreux.

Nous leur avons tout d’abord demandé s’ils avaient effectivement utilisé ce dictionnaire dans leur travail. Dans tous les cas la réponse est oui. Ensuite, nous avons essayé de savoir si la microstructure leur convenait. Dans tous les cas, les utilisateurs ont apprécié d’avoir la définition de termes pouvant présenter des difficultés particulières. On remarque que, justement, ils reprochent aux dictionnaires qu’ils utilisent habituellement de ne proposer, la plupart du temps, qu’une traduction. La remarque faite par les utilisateurs est que la définition permet de véritablement saisir le sens du terme ; la traduction apparaît ainsi comme un complément d’information, certes indispensable, mais pas suffisant. De même, tous acceptent que certains termes, particulièrement clairs, ne soient pas définis.

Le fait que les définitions soient en français, qui sert ainsi de métalangue, est par contre accueilli de diverses façons. Certains utilisateurs préfèrent que les définitions soient en français, car la compréhension du sens en est facilitée. Mais d’autres auraient souhaité avoir une définition en portugais, afin de “ mieux cerner le sens du terme ” ou “ travailler les tournures de phrases ”. La définition deviendrait ainsi une contextualisation. On peut remarquer que ceux qui auraient souhaité une définition en portugais sont ceux qui ont le niveau le plus élevé dans cette langue, ceux de niveau intermédiaire préférant les définitions en français, pour la facilité d’accès au sens.

Les opinions se rejoignent en ce qui concerne les contextes proposés. En effet, tous les utilisateurs s’accordent sur l’utilité de ces contextes, que ce soit pour leur aspect linguistique (phraséologie, collocations), ou culturel (ces contextes permettent de replacer le terme dans son environnement social et historique, un utilisateur allant jusqu’à parler de “ tranche de vie ”).

De même, les informations métalinguistiques sur l’utilisation de certains termes sont considérées comme fondamentales.

Il semble donc que ce type de dictionnaire, du moins pour les quelques personnes qui ont bien voulu le “ tester ”, comble un manque et correspond effectivement à un besoin.

Notre dictionnaire s’en tient pour l’instant au décodage, en raison essentiellement de la méthode de travail choisie pour la sélection des termes. En effet, notre nomenclature est constituée de termes très marqués, propres à la situation de communication dont ils sont extraits. Il nous semble donc très difficile, voire impossible, de procéder à un “ renversement ” (V. Marello 1996 : 33) de cette partie décodage pour en faire une partie encodage. Il faudrait avant tout savoir de quoi les utilisateurs ont besoin, que veulent-ils encoder, quelle réalité ? Cette question reste, pour l’instant, en suspens. Notre intention est pour le moment de “ tester ” ce premier produit destiné au décodage. Nous proposons néanmoins une partie français / portugais sous forme d’index.