III) Le traité de Rome et le début de la restructuration industrielle

Les années qui suivent la signature de ce traité révèlent peu à peu les insuffisances de l’industrie française 221 . Les entreprises qui produisent, pour une partie d’entre elles, pour le marché domestique essentiellement, se retrouvent souvent devancées par leurs concurrentes. Profitant de la progressivité dans la libéralisation des échanges, les pouvoirs publics s’efforcent de faire passer le système productif français d’une logique d’investissement et de production définie dans le cadre national à une stratégie d’insertion dans un espace économique internationalisé. Pour ce faire, ils poussent les entreprises à essayer d’abord de s’adapter avant de conquérir des parts de marché dans une seconde étape.

Dans cet esprit, et jugeant que la taille des firmes est devenue un facteur décisif de compétitivité, l’Etat engage et encourage un mouvement de concentration d’une part et tente de forger quelques grands groupes d’autre part. Leur création devant permettre à la France de disposer d’entités capables de «rivaliser avec les géants d’outre Rhin, d’outre Manche et d’outre Atlantique » (De Combret f., 1983). C’est ainsi qu’à la fin des années soixante, des grands programmes sont lancés. Animés par d’importantes commandes de l’Etat, ils concernent des domaines aussi divers que l’aéronautique (Airbus, Concorde, Mercure), l’espace (Ariane), le nucléaire, l’informatique (plan calcul) et le téléphone.

Parallèlement, des programmes d’aides à des secteurs jugés essentiels pour l’économie nationale, sont assurés (charbonnages, sidérurgie, …). Néanmoins, ces aides sont assorties de conditionnalités. A titre d’exemple dans le secteur de la sidérurgie, où les entreprises sont dans l’impossibilité financière de réaliser les investissements de modernisation, les pouvoirs publics, par le biais de la convention Etat-sidérurgie 1966/70, fournissent une aide financière sous forme de prêts à long terme et d’aides à la reconversion des sidérurgistes. En retour, ils exigent que les sociétés suppriment les unités anciennes et construisent des complexes intégrés. En 1971, une convention de ce type permet la construction du complexe de Fos-sur-mer. A quelques aménagements près, cette politique sera poursuivie jusqu’en 1974.

Notes
221.

L’étroitesse de l’éventail des exportations, dominées par les produits agroalimentaires, est un des signes les plus révélateurs de ces insuffisances.