2) Autocontrôle, participations croisées et noyaux durs 

En l’absence d’une majorité effective de capital, plusieurs montages financiers permettent à des investisseurs non majoritaires de conserver le contrôle d’une firme. Ces formes de contrôle variées comprennent la structure du holding, le contrôle par un actionnariat de référence, et le contrôle par un noyau dur et par échange de participations. L’actionnariat de référence se retrouve dans des entreprises, filiales d’un grand groupe industriel ou dans des sociétés familiales qui ont connu une forte croissance 278 .

Pour garder le contrôle, les fondateurs utilisent souvent le mécanisme des droits de vote préférentiels. Ainsi, même si leur part de capital est souvent inférieure à 50 %, ces actionnaires de référence parviennent à conserver le contrôle de « leurs » entreprises grâce aux droits de vote rattachés à leurs titres et à la limitation des droits de vote d’autres actionnaires 279 . Cette pratique est plus facile à mettre en œuvre lorsque les actionnaires de référence disposent d’une participation au moins supérieure au tiers du capital de la société à contrôler, ce qui correspond à la minorité de blocage. Or dans le cas des grandes entreprises, cette quote-part nécessite la mobilisation de capitaux importants. En outre, la croissance organique et surtout externe de ces firmes rend inévitable la dilution des actionnaires de référence. Engagées dès le milieu des années quatre-vingt, dans un profond mouvement de restructuration et d’internationalisation, les grandes entreprises françaises verrouillent au préalable leur capital. Pour ce faire elles étendent et sophistiquent leurs participations croisées 280 . Les sociétés nouvellement privatisées sont dotées d’un noyau dur, un dispositif qui vient renforcer la protection offerte par les participations croisées, répondant ainsi au durcissement de la législation sur l’autocontrôle.

Notes
278.

Le secteur de la grande distribution offre un bon exemple à cet égard. Des sociétés cotées de taille mondiale telles que Carrefour ou Casino ont toujours des familles comme actionnaires de référence.

279.

Le groupe Danone dont 70 % du capital est dans le public limite les droits de vote en assemblée générale à 6% ou à 15 % selon que l’actionnaire détient des droits de vote simples ou doubles. Cette disposition cesse toutefois de s’appliquer si un actionnaire détient 67 % (donc plus des deux tiers) ou plus du capital.

280.

L’échange de participations est en effet une pratique coutumière du capitalisme français que les privatisations et ouvertures de capital n’ont fait que renforcer dans un premier temps. Avec la montée concomitante de l’impératif de la transparence financière et de la pression des investisseurs institutionnels, notamment étrangers, on assiste ces dernières années à un débouclage progressif de ces participations croisées sans logique industrielle.