8) Les rachats d’actions se généralisent

STRATEGIE Comment décrypter les rachats d’actions ?

Groupe Textile, CNP... quelques noms de sociétés ayant annoncé ces dernières semaines un programme de rachat d’actions. Au total, un club d’environ 200 membres depuis janvier. Que sous-entendent de telles annonces et quel est l’impact pour l'actionnaire ? Patrice Penet, gérant actions à CPR Gestion, vous répond.

Le 10 mai dernier la Cob a de nouveau assoupli ses règles d’encadrement du rachat d’actions, notamment en matière d’information. Qu’en pensez-vous ?

Patrice Penet : "Les autorisations étaient en effet très lourdes. L’allègement (dispense pour des volumes limités à 0,5 % du capital, choix dans le moment d’établissement de la note d’information...ndlr) devrait profiter surtout aux sociétés cotées au Nouveau Marché, puisqu’il accroît leur réactivité aux fortes variations de cours."
En 2000, 414 programmes de rachats d’actions ont été visés par la Cob, soit 75% des sociétés cotées. Pourquoi autant d’entreprises ont-elles recours à ces pratiques ?

P.P : "Il existe de nombreux motifs conduisant les sociétés à procéder au rachat de leurs propres actions. Certaines, à l’instar du constructeur automobile Peugeot , qui a annoncé en mai le rachat de 10% de son capital, le font parce qu’elles ne trouvent pas à employer l’intégralité de leur cash flow, celui-ci s’avérant certaines années bien supérieur à leurs investissements. Pour d’autres, c’est l’occasion de profiter de la faiblesse conjoncturelle de leur titres pour le soutenir. De cette manière, les sociétés indiquent aux investisseurs qu’elles sont confiantes dans leur avenir. Le rachat d’actions constitue également une arme de défense anti-OPA. Grâce au contrôle élargi de leur flottant, elles se mettent à l’abri de ces assauts. Par le rachat, les entreprises recherchent aussi souvent un financement à bon compte des futures acquisitions par échange de titres ; comme ce fut le cas lors de la fusion Vivendi-Seagram , le groupe de communication français ayant repris une partie des actions de la famille Bronfman, actionnaire majoritaire de Seagram. Enfin, cette pratique tend à se généraliser chez les groupes souhaitant distribuer des stocks-options à leurs collaborateurs, au lieu d’émettre de nouvelles actions."

Quelle interprétation faites-vous des annonces de rachats d’actions ?

P.P : "Pour les gérants, le rachat d’actions est généralement vécu comme un signal positif, pour deux raisons. La première est qu’il constitue un indicateur de la bonne santé financière de l’entreprise, dans la mesure où ces opérations peuvent porter sur des sommes importantes. La seconde est que nous sommes rassurés de savoir qu’il peut y avoir un gros acheteur garant de la stabilité des cours en cas de trop forte variation, même si cette pratique n’est pas systématique. Mais il ne faut pas pour autant tirer de généralité quant à l’issue positive de ces rachats d’actions. Doivent entrer en ligne de compte à la fois les conditions ayant motivé le rachat et le prix de son exécution. Or, ces derniers mois, beaucoup de sociétés du Nouveau Marché, dont le cours était particulièrement chahuté, ont eu recours à cette méthode de stabilisation. L’ennui, c’est que certaines ont tout de même racheté à prix fort, ce qui risque de générer des pertes futures si les cours ne reviennent pas à des niveaux suffisants."
Dans ces conditions, comment doivent se positionner les actionnaires?

P.P : "Tout dépend du devenir de ces actions, selon que l’entreprise décide de les donner, de les remettre sur le marché au plus haut ou de les garder. Dans ce dernier cas, qui peut déboucher sur une annulation des actions rachetées, l’achat est généralement créateur de valeur pour l’actionnaire dans la mesure où le nombre d’action diminue à bénéfice constant."

Propos recueillis par S.H

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