3.5 : La Prévention Spécialisée exige des moyens

C’est à partir de rencontres, de tissage de liens, que notre action éducative trouve son sens, et nous pouvons ainsi proposer à tel ou tel jeune une aide, un soutien, un accompagnement. C’est de la relation éducative que vont naître les moyens mis en oeuvre pour étayer son autonomie, sa responsabilité.

Ces moyens peuvent prendre différentes formes. Il s’agit déjà d’écouter de façon “individualisée “ ces appels à l’aide formulés auprès de nous. Cependant, répondre à ces demandes, ce n’est pas “sauter sur l’occasion” de “faire quelque chose“ à tout prix. La première demande n’est pas, bien souvent, la demande réelle, et il faut du temps pour que le jeune, mis en confiance, parle de son histoire, de sa “galère quotidienne“ : chômage, échec scolaire, conflits familiaux, fugue, rupture familiale, toxicomanie, etc... autant de champs d’intervention différents. Écouter la première demande permet souvent d’étayer la relation qui s’engage, et la nécessité de répondre à l’urgence de certaines situations ne doit pas s’y substituer.

Ce n’est donc qu’après différentes rencontres que des moyens peuvent être mis à la disposition du jeune. Nous avons là une grande latitude d’action, depuis la possibilité d’hébergement (foyer de jeunes travailleurs, hôtel), de “dépannage” financier, alimentaire, vestimentaire, jusqu’à l’aide à une rupture avec son environnement, si nécessaire, avant qu’il ne commette un acte soit répréhensible, soit irréversible. L’important est de trouver le levier qui le fasse agir par lui-même. L’accompagnement dans une démarche auprès d’institutions diverses suffit parfois à lui redonner confiance, à susciter un début de prise en charge. Ce peut être aussi, surtout dans des temps de chômage, donner une place dans un chantier de l’association d’insertion “ couplée “ avec notre institution .

‘“ Il ne s’agit pas de résoudre la crise pour l’autre , mais déjà qu’elle se manifeste “. ( 16 ) ’

Pour acquérir quelque chance d’efficacité, toute action éducative exige durée et moyens. Ces moyens doivent être proportionnels au projet d’action éducative préalablement accepté et aux réalisations qu’il implique. Au minimum, les moyens financiers mis à la disposition d’une équipe éducative doivent couvrir la rémunération des personnes qui s’engagent à titre professionnel, les charges sociales, le financement des activités correspondant au projet éducatif et le fonctionnement d’un support administratif minimum (secrétariat). S’il y a lieu, ils doivent couvrir l’acquisition de quelques moyens matériels, le paiement du loyer et l’entretien des locaux.

L’évaluation des moyens nécessaires doit faire l’objet d’une discussion préalable entre les financeurs et les gestionnaires de l’association de prévention spécialisée, qui ont à justifier leur projet éducatif comme correspondant à des besoins constatés. L’expérience a montré qu’un financement global est un mode de contribution adapté au contenu des actions développées dans le cadre de la prévention spécialisée. Le financement global ne dispense toutefois ni d’une appréciation rigoureuse des besoins, ni d’un contrôle effectif de l’emploi des fonds reçus.

Notes
16.

DECLERC Patrick . De l’ambiguïté de la pitié. Revue Ingérence.