5.2 : Adaptation et inadaptation sociale

L’identité et le statut social paraissent être deux éléments primordiaux d’adaptation. Cependant, en cas de non identité, il y aura malgré tout création d’identité, que nous appellerons identité négative, qui entraînera inévitablement vers l’exclusion. Bon nombre de psycho-sociologues ( 21 ) ont montré cette relation constante entre l’image envoyée par la société, reprise et amplifiée par ceux qui sont ainsi nommés dans leur comportement. “ Nous sommes des feignants, des voyous et des casseurs dans l’esprit des gens, alors soyons le vraiment et ils verront”, nous a dit un jour un jeune. Depuis 1974, on parle d’inadaptés sociaux majoritairement jeunes (la mortalité infantile est moins importante et l’espérance de vie a augmenté) les toxicomanes, malades mentaux, chômeurs, délinquants, pauvres et “nouveaux pauvres” sont les marginaux, les exclus de la fin de notre XXème siècle.

Pour Roger MUCCHELLI ( 22 ) “ L’adaptation à la société est autre chose qu’une accoutumance ou une acclimatation, elle est une dépense orientée d’énergie pour s’intégrer et rester intégré, pour résister aux traumatismes sociaux, et pour apprendre, puis pour tenir des rôles sociaux “.

A travers ces différentes approches, que ce soit dans la société ou au sein même de l’école, nous pouvons extraire un élément important : le rapport à l’autre, à l’extérieur. Avoir un statut social, une identité, c’est comme jouer dans une “pièce de théâtre” où l’on a un vrai rôle, c’est-à-dire où l’on a une identité reconnaissable pour soi même ou les autres. Jouer un rôle (social ou théâtral) suppose donc la connaissance de la “ pièce “ dans laquelle on joue et la possession d’une véritable identité. Or, il semble difficile d’affirmer sa propre identité lorsque l’on n’a pas de place reconnue dans la distribution. Dans cette situation, l’individu est hors “ jeu “ socialement. En 1974, René Lenoir, dans son ouvrage “ Les exclus “, parlait “ d’inadaptés sociaux “, de gens durablement rejetés aux marges parce qu’incapables de suivre la dynamique économique et sociale.

L’exclusion repose sur des valeurs fondamentalement contradictoires de celles de la société : la norme sociale est celle de l’accomplissement par le travail ou la formation. Cependant, vu le chômage endémique qui a sévi, et dont les effets perdurent pour certains dans nos sociétés post-industrielles ainsi que le nombre de jeunes qui sortent de notre système scolaire sans formation, il devient de plus en plus difficile, pour au moins quatre millions de personnes (chômeurs, stagiaires, emplois précaires, revenus minimum d’insertion, etc ... ), de correspondre à cette norme.

Peut-être, au risque de voir se généraliser les scènes de violence dans les banlieues (lieux au ban !...), faudra t-il, un jour, définir de nouvelles normes ou reconnaissances pour une nouvelle citoyenneté ?

Notes
21.

Marie-Josée CHOMBARD DE LAUWE " Treize ans violents, à l’image de nos rapports sociaux. Revue " AUTREMENT ", N° 22 Novembre 1979.

22.

Roger MUCCHIELLI " Comment ils deviennent DÉLINQUANT " . ESF .