2.4 Présentation des différentes expériences

QUARTIER DES VIEILLES CITES A BELLEGARDE

L’AEPS a débuté dans le quartier en 1989 car une subvention du FAS (Fonds d’action social) a permis sa mise en place. Il convient de noter que cette action n’est pas isolée et s’inscrit dans une dynamique de développement social de quartier .

Courant juin 91, nous avons informé les parents de notre projet, en nous rendant chez eux afin de leur expliquer ce que nous comptions mettre en place pendant l’année scolaire 91/92 ; bien sûr, ils ne voulaient voir dans ce projet qu’une aide aux devoirs. Nous avons aussi informé les instituteurs, qui étaient prêts à nous fournir immédiatement des listes d’enfants difficiles (et non pas obligatoirement en difficulté ; à noter également que les instituteurs ont considéré ce projet comme un soutien scolaire). Cependant, comme nous le précisions auparavant, notre action ne pouvait se limiter à une aide aux devoirs, car celle ci n’aurait été qu’un leurre. Notre objectif était de travailler autrement, pour faire passer d’un sentiment d'échec à celui de la réussite, afin de favoriser la socialisation et le rapport à l’école de l’enfant, ainsi que son épanouissement.

Les enfants sont à l’école du Grand Clos, située à proximité du quartier des vieilles cités. Ils sont d’origine française, algérienne, marocaine, ortugaise, turque. Au total, environ 18 origines, dont les classes vont du CP au CM2. Ils viennent tous les soirs de la semaine. Malgré notre scepticisme, nous avons été obligés de sacrifier aux rites des devoirs, afin de les rassurer ainsi que leurs parents et leurs instituteurs. Cependant, notre action s’est principalement orientée : vers un travail sur l’oral et l’écrit avec, pour support, le conte. Ce travail se présente de la façon suivante :

  • Lecture de contes d’origines diverses par les animateurs.
  • Création d’histoires et illustrations de contes par les enfants.
  • Création de marionnettes et utilisations de ces dernières.
  • Relation et travail avec la bibliothèque.
  • Relation avec les familles.

Comme nous le précisions auparavant, il nous paraissait important d’utiliser la synergie instaurée dans le quartier ; c’est elle qui a permis l’installation d’ateliers écriture et calcul pour les parents. Dans le cadre de notre collectif d’animation, des cours d’alphabétisation et d’économie sociale et familiale se sont également mis en place.

En outre, il nous est apparu utile de favoriser une interaction entre ces projets et l’aide éducative périscolaire. Ainsi, les mères venaient l’après midi pour apprendre le français et faire de la cuisine. Parfois, les animateurs allaient avec elles chercher les enfants à l’école, toujours avec l’idée de créer des liens et de mettre en place, ainsi, une médiation entre familles et école. Lorsque les enfants revenaient de l’école, ils prenaient leur goûter ; les mères visualisaient également ce que les enfants réalisaient dans le cadre de l’AEPS. Cela a favorisé des discussions sur l’école, sur les contes des pays d’origine ont eu lieu et peut être, après un temps de maturation, pourrons-nous créer un atelier sur le conte, avec traduction de la langue d’origine en français. Pour nous, il primordial d’associer les parents si nous voulons éviter de les dessaisir de leur mission éducative.

- En direction des enseignants :

Les enseignants ont également été invités à des réunions de collectif et à quelques goûters dans le quartier. Nous avons privilégié les contacts avec l’école, afin qu’il y ait un retour de ce que nous faisions au sein de la classe. Lorsque nous accompagnions les mères à l’école, notre but était de favoriser le contact avec les instituteurs afin de rompre avec l’eternelle reflexion : on ne voit jamais les parents des enfants qui ont des difficultés. Nous avons également sollicité l’école lors de la fête du quartier. Il nous semblait important que les enfants puissent avoir le sentiment que les éducateurs et les instituteurs travaillaient ensemble. Cela ne s’est malheureusement vérifié qu’avec certains instituteurs (notamment l’instituteur ZEP).

Poursuite de l’action AEPS au cours de l’année scolaire 92, 93 :

Durant cette deuxième année, nous avons apporté quelques modifications à l’organisation AEPS. En effet, la municipalité de Bellegarde a instauré une action pour la réussite scolaire. Sous forme de participation financière, elle incita les écoles à organiser des actions d’assistance aux enfants pour leurs devoirs. L’école du Grand Clos, dont dépend le quartier des Cités (et dont le directeur est adjoint au maire), a saisi cette opportunité pour organiser des heures de soutien scolaire. Celles-ci étaient rémunérées mais tous les crédits ont été épuisés au cours du second trimestre, ce qui a eu pour effet l’arrêt de ces soutiens scolaires en pleine année.)

Nous avons donc réorganisé notre fonctionnement ; il nous a paru effectivement “normal“ de laisser aux instituteurs, qui sont des professionnels en la matière, le domaine du soutien scolaire bien que nous croyions peu à cette action. Il semble raisonnable de penser que, si les enfants sont en difficulté pendant la classe, ils le seront encore après, si un travail identique pour y remédier est mis en place. Les enfants sont-ils encore réceptifs après six heures de classe ? Nous avons pu en juger durant une année. Nous avons donc décidé de continuer l’action AEPS avec la synergie mise en oeuvre dans le quartier. Cependant, cela n’a pas été sans conséquences pour nous. En effet, avec la suprématie des devoirs, nous avons vu nos effectifs chuter car, à l’école, le travail sur les devoirs est plus “sérieux” et rassurant pour les parents. Cependant, ces enfants ont été rendus à la rue en milieu d’année. Nous avons néanmoins continué notre action. Les grands axes de cette année, toujours en lien avec les familles et l’école, ont été :

  • La poursuite du travail sur les contes : sensibilisation à la lecture.
  • Une approche différente de la lecture à travers une sensibilisation à l’utilisation de la bibliothèque municipale et un lieu de prêt de livres dans le local que nous occupions quotidiennement.
  • L’utilisation d’ordinateur (Macintosh) avec des logiciels de jeux, afin de travailler sur la capacité d’anticipation, de maîtrise de soi, de mémoire (Mémor ) d’un logiciel de dessin (Mac Draw) pour travailler sur le graphisme et enfin d’un logiciel de traitement de texte, afin d’écrire les textes que les enfants ont composés pour le théâtre.
  • Un atelier théâtre et sketches avec, pour objectif, la création d’un spectacle grâce à un travail d’écriture d’expression corporelle et de maîtrise de soi.

L’activité théâtre et sketches est née du désir des enfants de créer une dynamique d’animation et de fête, qui les regrouperait dans le quartier, avec leurs parents et l’école. Dans cet atelier théâtre, ils sont eux-mêmes aute

urs, compositeurs, metteurs en scène et acteurs, pour se produire lors d’une manifestation. Les textes ont été retravaillés en classe. Les accessoires et costumes sont également élaborés avec eux, leurs mères et des animateurs, dans le cadre de cours de couture qui se déroulent sur le quartier. Lors de répétitions fut envisagée la mise en scène finale qui eut lieu dans le quartier à la fin de l’année scolaire.

  • Un atelier de danse et de chant.

Nous avons pu voir ainsi des chants, des danses modernes et traditionnelles, une parodie de Blanche Neige et une scénette d’actualité intitulée “Adidas et les sept loufoques“ .