4.2 : Quels savoirs transmettre ?

Dans la présentation de l’expérience de scolarisation des enfants du voyage, l’idée force que nous soutenons est d’apprendre à apprendre, en faisant la démonstration de la prévalance du processus sur le contenu. Nous donnons donc la priorité aux apprentissages “méthodologiques et logiques”, au détriment des apprentissages strictement disciplinaires. C’est ainsi qu’apparaît une certaine ambiguïté concernant les savoirs.

Dans l’approche de cette réalité, l’Ecole rencontre énormément de difficultés. Elle a un programme et sa mission semble être uniquement de dispenser un savoir à des élèves, sans réellement se préoccuper de leur donner les moyens de le maîtriser, de connaître ce à quoi il pourra être utile, de pouvoir le transférer dans la réalité de la vie, donc d’agir avec lui, ce qui nous parait essentiel pour ne pas subir les événements. L’école reste dans un conservatisme froid. Ainsi, elle parait être dans un isolat qui se protège de la société environnante en délivrant un savoir clos, dans un univers très fermé, coupé du reste du monde. Comment ne pas voir la distorsion qui existe entre l’école et le monde environnant auquel on est censé préparer les enfants ? Dans ce contexte, il n’est pas étonnant de lire :

‘“ - Une enquête effectuée au début de l’année 1992 auprès d’un échantillon de quatre cents élèves de troisième montre que plus des deux tiers d’entre-eux ne peuvent accéder à plus du quart des articles d’un quotidien régional ... ce qui veut dire, en d’autres termes, qu’à la fin de la classe qui marque aujourd’hui, de fait, la fin de la scolarité obligatoire, moins de 25 % de l’information qui constitue l’environnement immédiat des jeunes peut être compris et intégré ”. “ Cela signifie aussi que, si nos élèves de troisième savent lire, ils ne savent guère déchiffrer le monde qui les entoure “. ( 64 )’

L’éducation est une interrogation. L’école est un lieu qui doit permettre des hypothèses, des réponses. Nous le répétons, elle doit susciter le désir d’apprendre, la volonté de savoir, donner le goût d’apprendre, apprendre à réfléchir, donner une méthode pour acquérir le savoir et l’actualiser.

Cette notion de savoir recouvre plusieurs aspects, complémentaires qui, à nos yeux, ne sont pas obligatoirement opposés : méthodologiques, savoirs disciplinaires, transférabilité, maîtrise de ce savoir, et pédagogie. Il faut cependant noter que la transmission du ou des savoirs ne s’effectue pas uniquement à l’Ecole, il y a également une transmission familiale du savoir à valoriser. C’est ce que nous avons souhaité favoriser par les deux actions sociales ATELEC et RERS mises en place dans un souci de complémentarité d’actions, en donnant une place aux parents afin, de les réintégrer dans leur rôle face à l’éducation de leurs enfants et face à l'Ecole.

Notes
64.

Philippe Meirieu et Michel Develay, Emile, reviens vite ... ils sont devenus fous. Édition ESF, Collection pédagogies, P 81, 82.