3.1.1 La sélection des informations

Quelle que soit la modalité sensorielle considérée, la perception se doit d’être sélective pour éviter la surcharge d’informations. En cas de surcharge, une adaptation se met en place qui consiste à consacrer moins de temps à chaque entrée, à se libérer des entrées qui sont les moins prioritaires ou à rejeter totalement l’entrée de certaines informations sensorielles. Les théories dites « de l’entonnoir » proposent la nécessité de la sélection chaque fois qu’un « trop-plein » d’informations se présente pour être traité (goulet de l’entonnoir). Le modèle du filtre de Broadbent (Driver, 2001) représente un exemple typique de cette théorie. Il propose que le rôle de l’attention est de déterminer quelle information sensorielle peut accéder à l’étape suivante de son traitement (la reconnaissance du stimulus, par exemple). Quand plusieurs informations concurrentes arrivent en même temps par deux canaux sensoriels différents, l’attention sélectionne celle qui pourra faire l’objet d’un traitement complet et mettra l’autre en attente. Un paradigme expérimental couramment utilisé pour tester l’hypothèse de Broadbent consiste en la situation d’écoute dichotique. Dans celle-ci, un message différent est présenté simultanément à chaque oreille. Il est demandé au sujet de répéter le message entendu dans l’oreille indiquée par l’expérimentateur. Les premiers résultats des expériences d’écoute dichotique ont confirmé la pertinence du modèle filtre puisque les auditeurs parviennent à répéter un des deux messages mais sont totalement inconscients du contenu de l’autre.

Cependant, Treisman (1969) a observé que des effets contextuels du langage pouvaient amener les sujets à rapporter des mots provenant du canal non indiqué, ce qui l’a amenée à proposer un modèle de filtre sélectif. Ce filtre permettrait la distinction entre deux messages mais n’empêcherait pas d’entendre celui provenant du canal non indiqué ; il l’atténuerait simplement de manière à abaisser la probabilité qu’il soit entendu.

Pour Deutsch et Deutsch (Deutsch, Deutsch, Lindsay, & Treisman, 1967), la tâche d’écoute dichotique ne reflète pas un problème de perception mais celui de la sélection succédant la perception. Selon eux, les deux messages sont traités mais sont aussitôt oubliés s’ils ne constituent pas une information pertinente. Les modèles dérivant de cette hypothèse insistent sur le fait que la sélection est déterminée non seulement par l’intensité de l’entrée sensorielle (i.e. ses caractéristiques perceptives), mais aussi par la pertinence de chaque entrée.