3.3.4 Orientation de la recherche : Expériences 8 et 9

Afin de compléter l’étude des mécanismes d’orientation de l’attention chez les patients acouphéniques, nous avons entrepris de tester les mécanismes d’orientation de l’attention spatiale visuelle et auditive à l’aide du paradigme élaboré par Posner (1980) dans la modalité visuelle (indiçage spatial).

L’idée était de rechercher, chez les acouphéniques et, comme dans les expériences précedentes, un éventuel déficit attentionnel portant sur les mécanismes responsables de l’orientation de l’attention, mais à un niveau de traitement des informations plus central que dans les Expériences 5, 6 et 7. En effet, un engagement trop important de l’attention sur l’acouphène, une incapacité à déplacer son attention, ou un déficit du désengagement de l’attention permettrait d’expliquer pourquoi l’acouphène continue à être et pourquoi l’habituation ne s’établit pas.

Les mécanismes auxquels nous nous sommes intéressée étant des processus de haut niveau, nous avons décidé de les tester dans deux modalités sensorielles, la modalité visuelle classiquement explorée par la tâche d’indiçage spatial et celle, auditive, affectée par l’acouphène. Bien que la plupart des études d’orientation de l’attention spatiale aient porté sur la modalité visuelle, le paradigme a été adapté à la modalité auditive par Mondor et Zatorre (1995). Leur protocole ne correspond pas exactement à celui classiquement employé en modalité visuelle, cependant leurs résultats ont montré que l’identification d’une cible sonore est facilitée en cas de compatibilité entre le lieu où elle apparaît et celui de la cible. Ils suggèrent que des processus similaires interviennent dans les deux modalités envisagées. De même, Driver et Spence (1998, 2000) ont appliqué le protocole d’indiçage spatial à des études d’interactions sensorielles entre les modalités auditive, visuelle, proprioceptive et tactile, démontrant un ensemble d’interactions intermodales lors de l’orientation de l’attention spatiale. Ils suggèrent que les informations des différentes modalités sont intégrées à un niveau pré-attentionnel, produisant des représentations spatiales internes multimodales vers lesquelles l’attention se dirigerait. Ainsi, nous avons émis l’hypothèse que les personnes invalidées par leur acouphène présenteraient une focalisation de l’attention du côté de l’oreille portant l’acouphène, ce qui entraînerait des perturbations dans l’orientation de l’attention spatiale, perturbations se traduisant par une difficulté dans les processus de désengagement, déplacement et/ou réengagement de l’attention.