4.3. Principe des contingences et renforcements monétaires

Le principe des contingences de renforcement associées au paradigme Go / no go a deux fonctions. D’une part, il est utilisé en tant que principe d’apprentissage conditionné, en particulier dans les études chez l’animal. D’autre part, il est censé constituer un facteur de motivation. Dans le cadre des études des troubles de l’inhibition comportementale associés à des lésions neurologiques frontales et préfrontales, le paradigme peut-être utilisé dans sa forme la plus simple, c’est-à-dire en l’absence d’une procédure d’apprentissage et du recours à des contingences de renforcement. Il est également utilisé en tant qu’épreuve de motivation de comportement dans l’évaluation des déficits chez des sujets présentant des lésions orbitofrontales. De telles lésions en effet s’accompagnent de modifications, parfois radicales, de la personnalité et des fonctions émotionnelles, ainsi que de la survenue de comportements inadaptés par rapport au contexte et aux normes socioculturelles sans qu’aucun déficit particulier ne soit, par ailleurs, observé dans les épreuves classiques des fonctions exécutives frontales (capacité d’élaboration d’une représentation mentale, maintien de cette réponse durant un délai, processus de flexibilité cognitive, fonctions d’inhibition et de désinhibition) (Damasio, 1995). De tels tableaux cliniques ont donc conduit à l’élaboration d’épreuves neuropsychologiques écologiques qui soient plus proches des situations rencontrées par les sujets dans la vie quotidienne, faisant intervenir la sensibilité aux renforcements. L’épreuve de Bechara en est un exemple. A cette tâche, qui est un jeu d’argent, les sujets présentant des lésions orbitofrontales élaborent des stratégies de réponse préférentiellement orientées vers des situations où les renforcements positifs sont immédiats et maximum mais s’accompagnent également de renforcements négatifs importants. Les patients émettent des réponses impulsives et des comportements à risque qui indiquent une absence d’anticipation des conséquences négatives (Damasio, 1995).

Dans le cas de l’investigation de l’impulsivité caractéristique de certains troubles psychopathologiques et de l’inhibition comportementale qui est considérée comme sous-jacente, le déficit d’inhibition apparaît difficile à mettre en évidence étant donné qu’il n’est pas consécutif à une lésion organique déterminée et spécifique. Les chercheurs et cliniciens intéressés par cette question ont donc également cherché à tester leur hypothèse dans un contexte expérimental qui soit le plus proche des situations écologiques rencontrées par les sujets dans leur vie de tous les jours. Le recours à un paradigme Go / no go dans lequel est intégré un principe d’apprentissage d’une réponse comportementale adaptée en fonction de renforcements positifs ou négatifs consécutifs à son émission, vise à introduire un élément motivationnel pour le sujet et à être ainsi un peu plus proche des situations naturelles et écologiques dans lesquelles se manifestent les comportements impulsifs ou extravertis.

L’utilisation d’une tâche Go /no go avec contingences de renforcement monétaire renvoie donc à une définition opérationnelle de l’impulsivité élaborée à partir des recherches en laboratoire sur l’animal et l’homme, en tant qu’une réponse motrice préférentielle pour une stimulation associée à une faible récompense dans un délai rapide comparée à une stimulation associée à une récompense plus importante dans un délai différé (Ainslie, 1975 ; Logue, Pena-Correal, Rodriguez et Kahela, 1986 ; Rachlin, 1995). Il s’agit de ce que Logue a nommé un “ self-control paradigm ”. Dans cette étude, nous avons utilisé une variante de cette procédure, “ the adjusting amount procedure ” (Gorenstein et Newman, 1980) : au lieu d’ajuster le délai de renforcement à l’intensité la plus élevée du renforcement positif, le délai est fixe et l’ajustement a lieu sur le montant du renforcement, qui peut-être positif ou négatif.