4.4. Paradigme Go / no go avec apprentissage : erreurs de commission en tant que corrélat d’un déficit d’inhibition comportementale et de la dimension impulsive.

Nous présentons ci-dessous une synthèse des études qui indiquent une corrélation significative entre le nombre d’erreurs de commission réalisé dans une tâche de “ Go / no go learning ” et l’impulsivité considérée comme la manifestation comportementale et clinique d’un déficit d’inhibition comportementale :

  1. L’étude de LeMarquand et Coll. (1998) montre une corrélation entre le taux d’erreurs de commission et la réduction du taux de sérotonine (déplétion du taux de tryptophane, acide aminé précurseur de la sérotonine) chez des adolescents considérés comme agressifs comparés à des adolescents non agressifs. Les auteurs ont recours à une tâche Go / no go informatisée avec apprentissage par essais-et-erreurs et contingences de renforcement monétaire (quatre conditions R+/R-, R-/R-, R+/R+ et R-/R+ intervalle inter-stimulus de 1 seconde). Les résultats indiquent également, pour les deux groupes de sujets, une supériorité du nombre d’erreurs de commission dans la condition R-/R+ comparée à la condition R+/R-. L’anxiété et le quotient intellectuel, mais non le nombre d’années d’études, constituent des covariants de la variable erreurs de commission. Enfin, les fonctions exécutives, évaluées à l’aide de plusieurs épreuves neuropsychologiques ne prédisent pas le nombre d’erreurs de commission.

  2. L’étude de LeMarquand, Benkelfat, Pihl, Palmour et Young (1999) montre une corrélation entre le taux d’erreurs de commission et la réduction du taux de sérotonine chez des sujets à risque pour l’alcoolisme comparés à trois autres groupes (sujets à risque + placebo, sujets sans risque + placebo et sujets sans risque + tryptophane). Les auteurs ont recours à une tâche Go / no go informatisée avec apprentissage par essais-et-erreurs et contingences de renforcement monétaire (quatre conditions R+/R-, R-/R-, R+/R+et R-/R+, intervalle inter-stimulus de 1 seconde). Les résultats indiquent également, pour les deux groupes de sujets à risque, une supériorité du nombre d’erreurs de commission dans la condition R-/R+ comparée aux conditions R+/R+ et R-/R- ainsi qu’une supériorité du nombre d’erreurs d’omission dans la même condition comparée aux trois autres. Aucune variable indépendante (diagnostic d’abus de drogue et/ou d’alcool, dépression majeure, trouble anxieux et antécédents familiaux) ne prédit le nombre d’erreurs de commission, ni d’omission.

  3. L’étude de Harrison, Everitt et Robbins (1999) indique une corrélation entre les performances de commission, une attitude de réponses impulsive et un déficit sérotoninergique central provoqué chez le singe. Les auteurs ont recours à une tâche Go / no go de discrimination visuelle avec apprentissage conditionné par renforcement symétrique.

  4. L’étude de Newman et coll. (1985) indique une corrélation entre le taux d’erreurs de commission et les dimensions de personnalité d’extraversion et de psychopathie (évaluées chez des sujets contrôles). Les auteurs utilisent deux tâches Go / no go non informatisées avec apprentissage par essais-et-erreurs et contingences de renforcement monétaire (deux conditions pour chacune des deux procédures : R+/R- et R-/R- ainsi que R+/R-et R+/R+ ; présentation des stimuli pendant 2 secondes). Les résultats montrent également une supériorité du nombre d’erreurs d’omission, pour tous les sujets, dans la condition R+/R-.

  5. L’étude de Newman et Kosson (1986) indique une corrélation entre le nombre d’erreurs de commission et le trouble de personnalité psychopathique chez des sujets incarcérés (psychopathes et non psychopathes). Les auteurs utilisent une tâche Go / no go informatisée avec apprentissage par essais-et-erreurs et contingences de renforcement monétaire (deux conditions R+/R- et R-/R-, intervalle inter-stimulus de 1 seconde). La supériorité des erreurs de commission pour le groupes de sujets psychopathes s’observe uniquement dans la condition R+/R-. Les résultats montrent également une supériorité du nombre d’erreurs de commission, pour tous les sujets, dans les deux conditions comparé au nombre d’erreurs d’omission.

  6. L’étude de Patterson et coll. (1987) indique une corrélation entre le nombre d’erreurs de commission et la dimension de personnalité extraversion (comparaison de sujets contrôles introvertis versus extravertis). Les auteurs utilisent une tâche Go / no go informatisée avec apprentissage par essais-et-erreurs et contingences de renforcement monétaire (deux conditions R+/R- et R-/R-, intervalle inter-stimulus de 1 seconde). La supériorité des erreurs de commission pour le groupe de sujets extravertis s’observe uniquement dans la condition R+/R-. Les résultats montrent également un profil inverse pour les deux groupes de sujets concernant les temps de latence succédant un renforcement négatif ou un renforcement positif. Les latences de réponse des sujets extravertis sont plus courtes lorsque les réponses motrices suivent un renforcement négatif. Le profil inverse est observé pour les sujets introvertis.

  7. L’étude de Iaboni et coll. (1995) montre une corrélation entre le nombre d’erreurs de commission et le trouble d’attention et d’hyperactivité de l’enfant (trouble AD/HD). Les auteurs ont recours à une tâche Go / no go informatisée avec apprentissage par essais-et-erreurs et contingences de renforcement monétaire (quatre conditions R+/R-, R-/R-, R+/R+ et R-/R+, intervalle inter-stimulus de 1 seconde). Cette supériorité est observée dans les quatre conditions de renforcement. Les résultats indiquent également, pour les deux groupes de sujets, une supériorité du nombre d’erreurs de commission dans les quatre conditions comparé au nombre d’erreurs d’omission. Le nombre d’erreurs d’omission apparaît plus faible, pour les deux groupes de sujets, dans la condition R+/R+. Les enfants présentant un trouble d’attention et d’hyperactivité montrent également une tendance à fournir un nombre plus élevé de réponses motrices pour les stimuli Go et No go que les enfants témoins. Les deux groupes fournissent plus de réponses motrices dans la condition R+/R+. Un effet d’apprentissage est observé dans toutes les conditions sauf pour R-/R+ (diminution du nombre d’erreurs de commission au cours des différents blocs d’essais). Les auteurs retrouvent, pour les enfants hyperactifs, les résultats de Newman et Kosson (1987) concernant la plus grande rapidité de réponse pour les stimuli suivant un renforcement négatif. Les latences des enfants témoins n’indiquent cependant pas le profil inverse.

A notre connaissance, une seule étude a interrogé les processus d’inhibition comportementale dans le trouble obsessionnel-compulsif à l’aide d’un paradigme Go / No go. Dans une étude évaluant l’intégrité des fonctions frontales chez des enfants atteints de trouble obsessionnel-compulsif, Beers et coll. (1999) n’ont pas montré de performances déficitaires chez ces sujets comparés à des enfants contrôles dans trois tâches de Go / No go simples (sans principe d’apprentissage ni contingences de renforcement). Les enfants obsessionnels présentaient même des performances meilleures pour l’une des trois procédures utilisées (impliquant de taper deux fois si le stimulus est constitué d’un coup et de taper une fois si le stimulus est au contraire constitué de deux coups). Malloy, Rasmussen, Braden et Haier, (1988) ont, quant à eux, enregistré les potentiels évoqués visuels de patients TOC durant la réalisation d’une tâche Go / No go simple mais ils ne fournissent aucune donnée concernant les performances des sujets. Nous avons par ailleurs déjà indiqué les données validant ou invalidant l’hypothèse d’un déficit d’inhibition comportementale et cognitive dans le TOC, évalué à l’aide d’autres tâches, en particulier des tests neuropsychologiques.