2.3. L’entrepreneur et les nouvelles combinaisons des facteurs de production

Alors que l’exploitant de l’économie statique se contentait de combiner les ressources naturelles et le travail de manière passive, l’entrepreneur de l’économie dynamique est caractérisé par sa vocation à proposer de nouvelles combinaisons des facteurs de production. Son rôle est fondamentalement actif au sens où « il dirige et crée de plus en plus les goûts et les besoins du consommateur » 678 . Le comportement de l’entrepreneur diffère de celui de l’exploitant et de l’agent économique du circuit en général. Arena [1985] souligne que si « l’habitude et l’expérience constituaient des règles de conduite suffisantes dans le circuit, elles perdent ici de leur efficacité » 679 . La rationalité autonome de Walras est abandonnée au profit d’une rationalité limitée et conventionnelle parce que « la connaissance du futur n’est plus une affaire de calcul rationnel, mais un problème de psychologie » 680 . Schumpeter [1926] définit l’entreprise comme « l’exécution de nouvelles combinaisons » 681 et l’entrepreneur comme l’agent économique « dont la fonction est d’exécuter de nouvelles combinaisons » 682 . Perroux [1965] rappelle la conception de Schumpeter concernant l’entreprise et l’entrepreneur. L’entrepreneur est caractérisé par sa capacité à proposer de la nouveauté. Pour qu’un agent devienne entrepreneur, il lui faut de l’initiative et de la volonté. L’entrepreneur ne représente pas un statut social, mais un état d’esprit. Les motivations de l’entrepreneur ne sont pas nécessairement liées à la volonté d’être à la tête d’un empire industriel, mais sont plutôt consécutives à un comportement de type sportif où dominent le plaisir de lutter et de gagner.

Les nouvelles combinaisons des facteurs de production correspondent aux cinq possibilités suivantes : la fabrication d’un bien nouveau, l’introduction d’une méthode de production nouvelle, l’ouverture d’un débouché nouveau, la conquête d’une source nouvelle de matières premières ou la réalisation d’une nouvelle organisation de la production. La nouveauté n’implique pas nécessairement que rien n’existait avant, mais signifie que ce qui pouvait exister n’avait pas été introduit sur le marché. Ces nouvelles combinaisons ne se substituent pas immédiatement aux anciennes. Elles peuvent être le fait de nouveaux entrepreneurs ou le fait d’anciens entrepreneurs auquel cas, « elles ne remplacent pas les anciennes, mais s’y juxtaposent » 683 . Ceci revient à dire que « le nouveau ne surgit pas de l’ancien, mais apparaît à côté de lui » 684 . C’est ce phénomène qui caractérise la destruction créatrice « en détruisant continuellement ses éléments vieillis et en créant continuellement des éléments neufs » 685 .

Notes
678.

Perroux [1965], p. 81

679.

Arena [1985], p. 156.

680.

Arena [1985], p. 156.

681.

Schumpeter [1926], p. 106.

682.

Schumpeter [1926], p. 106.

683.

Schumpeter [1926], p. 95.

684.

Schumpeter [1926], p. 312.

685.

Schumpeter [1942], p. 122.