Troisièmes résultats de la confrontation des théories

Troisième question : Une des théories est‑elle supérieure du point de vue de la justification de la politique économique en faveur de l’innovation ?

A la lumière des commentaires apportés dans ce chapitre, nous pouvons désormais avancer des éléments de réponses. Nous avons montré que les objectifs fondamentaux de la politique publique ne coïncident pas, mais sans qu’il soit possible pour autant de les opposer. Ce point interdit une confrontation de leurs conclusions réciproques. Il explique, une fois de plus, notre souhait de retenir, comme critère de jugement, l’existence de conclusions en faveur de la politique économique plutôt que la pertinence des conclusions. Nous avons vu que pour les théories de la croissance endogène comme pour les théories évolutionnistes, la politique économique, si elle est souvent définie en termes généraux, peut néanmoins être présentée en propositions précises pour le décideur politique.

Plus exactement, nous avons vu que les théories de la croissance endogène peuvent être mobilisées pour plaider en faveur de la stimulation de l’investissement en capital physique, la réduction des déficiences de marché et le renforcement des rendements privés de l’innovation. La mise en place de différents types de subventions devient alors le moyen de réaliser ces objectifs. Concernant l’argumentation, nous avons montré le renforcement croissant des liens entre la problématique de l’ « Industrial Organization » et le cadre de la croissance endogène. Cela a incontestablement rendu plus robustes les arguments en faveur de la politique publique. Les mêmes commentaires peuvent néanmoins être avancés que pour la deuxième question, à savoir que la représentation du processus d’innovation reste largement perfectible.

Nous avons également noté que les théories évolutionnistes appuient leurs arguments de politique économique sur une détermination préalable des caractéristiques propres aux firmes et/ou aux industries. La volonté des évolutionnistes de prendre en compte les spécificités des firmes, des industries ou même des pays, a été explicitée dans la deuxième partie. Elle signifie en tout état de cause l’absence d’éléments de politique publique universels et préfère insister sur les mécanismes de diversité, de sélection et de renforcement des unités choisies. En d’autres termes, le concept de système national d’innovation montre ses qualités dès qu’il s’agit de proposer une analyse descriptive précise d’une économie. Par définition, ce concept s’oppose à la définition d’outils applicables indistinctement dans l’une ou l’autre des économies mais fournit des éléments d’analyse mobilisables pour la définition des caractéristiques nationales et des interventions publiques adéquates. Aussi, les recommandations précises nécessitent trois étapes, la première étant la définition théorique du système national d’innovation, la deuxième correspondant à la description des caractéristiques propres à l’économie et la troisième définissant l’intervention en fonction de ces caractéristiques. Notre travail ne s’est porté que sur les deux premières, puisque nous avons surtout voulu définir les aspects théoriques des politiques publiques.