3) La « synthèse » par l’association de l’individualisme et du socialisme chez P. Leroux

La portée pratique des écrits de P. Leroux reste relativement faible comparativement aux projets de réformes économiques de P. Enfantin dans Le Producteur et Le Globe ou de P. Buchez dans L’Européen. Aucune application concrète n’est ainsi esquissée dans ses textes. La référence à l’association relève davantage du mobile d’action que du principe d’action bien que certains passages pourraient laisser penser le contraire. P. Leroux est théoricien avant d’être praticien bien qu’il ait eu une part d’engagement important dans la vie publique à la fois en tant qu’homme politique et en tant que soutien actif des projets associatifs, dont il relate certains épisodes dans La grève de Samarez (1853). Mais la pensée sur l’association de P. Leroux mérite une analyse pour au moins deux raisons essentielles. Premièrement, car sa théorie de l’association fait suite à une critique reconnue aujourd’hui comme majeure de l’économie politique classique et du capitalisme naissant 594 . Deuxièmement, parce qu’elle introduit une nouvelle manière de penser le principe d’association, synthétisant les apports des économistes classiques et des réformateurs sociaux.

La critique développée par P. Leroux à l’encontre de l’économie politique classique et des institutions sociales de la société de ce début de XIXe siècle est constitutive de sa théorie de l’association. Il contraste à la propriété et au raisonnement statique des économistes (3.1), son approche de l’association dont il donne les principes élémentaires dans « De l’individualisme au socialisme », texte publié dans la Revue Encyclopédique en 1834 (3.2). Celle-ci est sous-tendue par une conception désintéressée du comportement individuel reposant sur le mobile de solidarité (3.3).

Notes
594.

Voir M. Herland [1996] et A. Soriot [1999]. Ces critiques sont principalement développées dans Aux philosophes, aux artistes, aux politiques (1831-1841), dans La ploutocratie (1848) et dans Le carrosse de M. Aguado (1848).