1) Le maintien des positions du libéralisme économique

P. Enfantin dans Le Producteur condamne la concurrence en ce qu’elle oppose les intérêts des producteurs et des non producteurs mais la juge positivement pour la stimulation et l’émulation qu’elle entraîne dans l’organisation du travail. Il entend la remplacer, mais non la supprimer, par l’association, principe économique qui en permettant d’équilibrer la production et la consommation atténue l’antagonisme des intérêts 864 . Cette idée va ainsi connaître un succès certain dans les années 1830 auprès des réformateurs sociaux 865 . Les économistes libéraux trouvent dans l’association un principe contre lequel ils vont développer leurs critiques et montrer en quoi le courant réformateur se trompe (1.1) 866 . Les auteurs socialistes seront les plus visés dans la mesure où ils sont les représentants du principe d’association 867 . Les réactions vont aussi porter sur l’idée même d’action désintéressée ; les projets de réorganisation sociale ne pourront selon les économistes libéraux qu’entraîner une solidarité imposée contraire à la justice sociale (1.2) 868 . Cette dernière critique est reprise au cours des évènements de 1848 ; l’organisation du travail ou l’association parce qu’elles ne peuvent reposer sur des actions volontaires et spontanées portent nécessairement atteintes aux libertés individuelles (1.3) 869 .

Notes
864.

Voir 1ère partie, chap. 2, § 2.2.

865.

Commentant les Etudes sur les réformateurs contemporains ou socialistes modernes de Louis Reybaud, C. Dunoyer considère le « principe d’association » comme « le point dans lequel venait se résumer la monomanie de tous ses malades », C. Dunoyer [1843, p. 326.].

866.

Nous nous appuierons principalement sur la double contribution de C. Dunoyer intitulée « Des objections qu’on a soulevées dans ces derniers temps contre le régime de la concurrence » dans les deux premiers numéros du Journal des Economistes parus dans l’année 1842, C. Dunoyer [1842a ; 1842b].

867.

Ainsi, pour J. Garnier les « associationnistes », c’est-à-dire les socialistes « travaillent à la recherche d’un idéal qu’ils proposent à l’humanité comme une panacée générale à toutes ses souffrances, ainsi que ceux qui, croyant que cette panacée est trouvée, cherchent à en vulgariser la connaissance », J. Garnier [1848, p. 376.].

868.

Nous nous servirons sur ce point du texte de J. Garnier « Position du problème de la misère ; considération sur les moyens les plus efficaces d’élever les classes pauvres à une meilleure condition matérielle et morale » (1846), et de ceux de F. Bastiat « Organisation et liberté » (janvier 1847) et « Organisation naturelle. Organisation artificielle » (janvier 1848), J. Garnier [1846], F. Bastiat [1847 ; 1848a].

869.

Un nombre important de contributions prennent part au débat sur l’organisation du travail parmi lesquelles il faut citer celles de F. Bastiat [1848b ; 1848c ; 1848d ; 1848e], de Charles Coquelin [1848] d’A. Clément [1848], de M. Wolowski [1848] et de L. Faucher [1848].