a – Les applications du principe coopératif

Les associations populaires trouvent toutes leur origine dans un principe commun : la constitution progressive d’un capital social grâce au versement régulier de cotisations par les associés. Ainsi, l’association de consommation emploie ce capital pour la création de magasins de vente et l’approvisionnement en gros des produits qu’elle revend au détail à ses associés, voire aussi à des non associés 1310 . Groupant d’abord un faible nombre d’associés, ces coopératives voient souvent ensuite leurs opérations se développer fortement 1311 . Deux raisons l’expliquent pour L. Walras. D’une part, elles sont en règle générale certaines de la vente de leurs produits tenant dans les associés une clientèle fidèle. Et, d’autre part, pratiquant la vente au comptant et assurées de leurs débouchés, les associations s’approvisionnent aussi au comptant, sans demander des crédits, ce qui leur garantit des produits à « bas prix » et « de qualité satisfaisante » 1312 .

L’association de production, ensuite, se sert de son capital social afin de créer les ateliers de production et se procurer les facteurs de production nécessaires à une production donnée. Elle semble mieux adaptée à la petite et moyenne production qu’à la grande industrie exigeant un capital fixe important. La réussite de la coopération de production tient alors des avantages de « la production en grand », c’est-à-dire de la production premièrement, entreprise pour une quantité élevée de biens, et deuxièmement, conduisant, par l’effet d’une division du travail poussée, et, le recours constant aux « machines » à des biens compétitifs. Car pour le producteur, explique L. Walras, ‘« la diminution de la part afférente au travail, sur le prix de vente [des] objets [vendus], provenant de leur bon marché est plus que compensée par l’augmentation de cette part qui provient de leur grande quantité »’. Enfin, l’association de crédit emploie son capital social pour réaliser des prêts à ses associés en vue de l’exercice d’activités industrielles ou commerciales déterminées. Elle vise à faciliter l’octroi de crédits pour les travailleurs qui par leurs faibles ressources offrent souvent d’insuffisantes garanties aux prêteurs. En effet, chaque associé lorsqu’il emprunte reçoit ici la garantie d’autres associés lui permettant ainsi de disposer d’un crédit supérieur à sa seule « part dans le fonds social ». De fait, la coopérative de crédit joue à la fois le rôle de « caisse d’épargne » et de « caisse de crédit » dont les associés se servent alternativement 1313 .

Hormis leur but commun, la capitalisation de l’épargne, aucun lien dans leur organisation interne a priori ne paraît rapprocher ces trois types d’associations populaires. Si rien n’empêche qu’elles se constituent indépendamment les unes des autres, L. Walras croit davantage dans un développement gradué des associations populaires dans lequel les associations de crédit précèdent l’émergence des associations de production et de consommation.

Notes
1310.

L. Walras envisage cette solution dans ses Cours car elle peut permettre une hausse des bénéfices de l’association et un partage des dividendes plus conséquents pour les associés, L. Walras [Ibid., p. 706].

1311.

L. Walras cite à ce propos les Equitables Pionniers de la Rochdale, L. Walras [1990, p. 32].

1312.

L. Walras [Ibid., p. 32].

1313.

L. Walras [Ibid., pp. 33-34].