INTRODUCTION

(...) si l’on se tourne plus précisément vers les vocabulaires accompagnant les pratiques professionnelles, techniques, scientifiques ou institutionnelles, on se trouve incité à se poser des questions de terminologie, de politique linguistique et d’épistémologie. Car lorsqu’ils donnent accès à des savoirs réglés, les mots s’utilisent de façon particulière et soulèvent d’autres enjeux.
(F. Gaudin et L. Guespin, 2000 : 317)

Ces quelques lignes soulignent la problématique actuelle des recherches terminologiques. La Terminologie, qui est née de besoins spécifiques de clarté et de précision terminologiques, a été longtemps confondue avec la lexicographie et la lexicologie. Aujourd’hui, elle constitue l’étape la plus récente de l’élargissement de la recherche sur les langues car elle ouvre des perspectives nouvelles sur un sujet nouveau : les langages spécialisés !

Rappelons, tout d’abord, avec Alain Rey (1979:121) que l’objet de la Terminologie est constitué “par les usages particuliers de chaque langue, sélectionnés et normés afin de pouvoir produire les types de discours requis, scientifiques, techniques et institutionnels, qui leur empruntent des éléments et les utilisent rhétoriquement”.

Cette finalité, telle qu’elle est décrite par A. Rey exige du linguiste-terminologue qu’il ait une vue distincte de la langue et son usage, de la sélection et de la normalisation, des discours et de la communication spécialisée. Ce qui nous conduira à poser d’autres questions.

D’où vient la Terminologie ? Quelles sont ses relations avec les langues ? Quels sont ses rapports avec la normalisation ? Quels sont les liens avec les institutions et les savoirs ?

Quels rapports existent entre la connaissance et la Terminologie ? Quelle est l’importance de l’information et de la communication en Terminologie ? Quelle(s) méthode(s) adopter pour entreprendre l’analyse terminologique d’un discours spécialisé tel que la Pollution ?...Autant de questions auxquelles nous tenterons de répondre, en précisant nos positions théoriques illustrées par des exemples.

Un bref historique s’impose. Au début, la Terminologie s’est fixé des finalités méthodologiques et normatives, de nature à écarter les ambiguïtés des communications techniques. Au delà des ces finalités, la Terminologie révèle aujourd’hui des potentialités au départ insoupçonnées. Nous partageons le point de vue de Armelle Le Bars (1995 : 40) : “la terminologie théorique étudie les champs terminologiques des langages et elle doit intégrer les sciences contemporaines dont elle est l’observatoire et l’utilisatrice”. La conduite de l’étude confirmera, notamment, sa vocation à la représentation et au transfert de connaissances.

Ayons garde d’oublier que la Terminologie, discipline à la fois théorique et appliquée, fait partie aujourd’hui d’un processus plus large impliquant des acteurs de différents domaines, de différents courants et de différentes langues. Jamais dans le passé une discipline de cette nature n’a pu englober dans un seul paradigme trois plans aussi éloignés : l’action politique, la recherche et enseignement, la production technologique.

Cet aspect novateur est déjà largement souligné par Teresa Cabré, qui suggère, pour faciliter cette convergence, “une sorte de compromis terminologique” entre la Terminologie wüstérienne (TGT) et le courant socioterminologique : la Théorie Communicative de la Terminologie (TCT).

Cette théorie donne un relief particulier à la notion d’interdisciplinarité qui se manifeste par les contributions des théories du langage, de la connaissance, de l’information et de la communication. Ces apports théorico-méthodologiques nous semblent essentiels, notamment, lors de la délimitation du sujet et de la caractérisation du travail terminologique (construction de la carte conceptuelle et de la carte verbale du domaine). Nous serons également très attentif à l’importance capitale de l’acquisition par le terminologue-chercheur de quatre compétences fondamentales : la compétence cognitive, la compétence linguistique, la compétence sociofonctionnelle, la compétence méthodologique.

L’analyse terminologique a des exigences qui lui sont propres : elle doit être fondée sur des choix méthodologiques et sur des principes théoriques répondant aux objectifs et aux orientations programmées. De plus, la conduite de cette analyse terminologique doit tenir compte de la langue et de la situation terminologique dans laquelle elle se trouve. Ces contraintes nous font obligation de soumettre notre démarche à l’éclairage permanent de sources multiples : géopolitiques, institutionnelles, économiques, épistémologiques, terminochroniques, terminolinguistiques, communicationnelles, logistiques.

Connaissance et Terminologie, seront des éléments cruciaux car ils constituent des moyens d’affirmation et de développement technologique. Dans ce sens les apports de l’épistémologie et de l’histoire des sciences sont essentiels pour comprendre l’importance des domaines, des textes, des discours et des concepts en recherche terminologique.

Connaissance et mémoire étant liées par des rapports réciproques, nous sommes immédiatement confrontés à un double défi : concilier, d’un côté l’évolution historique de terminologies et l’avènement de la Terminologie moderne, et de l’autre l’émergence de “l’archipel des savoirs” résultat d’une longue gestation conceptuelle et terminologique.

Cette conciliation se heurterait à des obstacles insurmontables si on négligeait les conditions socio-historiques de l’évolution de chaque spécialité. C’est pourquoi il nous a semblé nécessaire d’introduire des considérations d’épistémologie et d’histoire des sciences dans la perspective terminologique. En effet, il importe que la Terminologie considère la science en tant qu’ensemble édité, puis conçoive que le rapport diachronie / synchronie est important pour toute appropriation conceptuelle d’un domaine (les objets du savoir sont circonscrits et sont assujettis depuis des centaines d’années à des perspectives et à des paradigmes divers).

Le terminologue travaille aujourd’hui avec les textes. Cela constitue un nouvel apport épistémologique : on ne communique qu’avec des textes. Le texte devient un objet d’étude. Le texte est une unité de fonctionnement d’un système terminologique, les connaissances deviennent par le biais des textes des forces matérielles.

En effet, tandis que la TGT se focalise sur le terme, la TCT se focalise sur les textes. C’est effectivement à partir des années quatre-vingts que l’on commence à s’intéresser aux textes spécialisés comme outils essentiels d’analyse, ou points de départ pour l’analyse terminologique. Les textes spécialisés sont identifiables par le thème, par leur caractère référentiel et par la terminologie. Ce sont les textes qui provoquent des liens entre la spécialité et la linguistique et fonctionnent comme un vivier de données au service de la Terminologie.

En outre, c’est par les textes que le terminologue va décrire un domaine, établir sa terminologie, expliquer le comportement des termes et produire des ouvrages terminographiques. Les définitions y occupent donc une place fondamentale. Le terminologue fait une description du contenu par des classements thématiques, visant le repérage des termes, des contextes et des occurrences nécessaires à l’établissement de la terminologie en réseau et à la structuration des contenus de ces ouvrages. Les textes spécialisés sont des corpora de repérage et de classement de terminologies mais également des entités discursives à part entière. Cela peut favoriser le développement des études terminologiques et l’application de modèles dans les secteurs comme la traduction, la rédaction et l’enseignement des langages spécialisés.

Chaque domaine doit être traité avec la méthode qui lui convient. Chaque domaine est un élément d’un tableau qui reflète la connaissance scientifique. D’ailleurs la recherche terminologique trouve les éléments et la structure du langage spécialisé à partir de l’analyse des caractéristiques thématiques d’une science ou d’une spécialité. Le traitement terminologique prend appui sur cette connaissance dite thématique pour réaliser le classement, la structuration dénominative et la qualification de ces domaines. Les connaissances et les terminologies évoluent tout naturellement de concert rendant ainsi possible les systèmes terminologiques. Le découpage en domaines découle forcément de l’analyse du champ conceptuel dans le processus de l’acquisition et de socialisation de la connaissance. La connaissance est contextuelle au niveau social, dans les processus de travail, entre les individus et les États et au sein du système mondial. La connaissance est le résultat du projet communicationnel réussi avec le monde extérieur.

Dans un souci de pertinence terminologique, le terminologue ne peut pas se borner à la connaissance superficielle d’un domaine. Il doit pénétrer au coeur de son fonctionnement afin d’avoir une connaissance intime de l’interaction des concepts : intégration, relations entre eux ; et du sens que cette interaction donne à l’ensemble théorique de règles.

Dans le cadre de notre étude, c’est à la Pollution, à sa structure conceptuelle et à son langage propre que nous allons appliquer les règles et contraintes générales auxquelles le terminologue doit se soumettre.

Nous voulons montrer que les textes représentatifs de ce domaine sont le reflet d’un paradigme de communication spécialisée et, qu’à ce titre, ils doivent être analysés en fonction de leur nature, de leurs spécificités et de leurs objectifs pragmatiques. Dans cette perspective la pertinence du choix des textes qui composent un corpus garantit la conformité du corpus au projet terminologique.

Une analyse terminologique doit cerner au plus près l’ensemble du système de communication spécialisée du domaine. On constatera que les caractéristiques spécifiques de la Pollution imposent le traitement d’un éventail de textes très large, car le langage spécialisé qui lui est propre contribue à sa description. Ainsi, l’étude de la Pollution commence par un choix de textes élargi aux différents niveaux de son échelle communicative. Un fois classés, ces textes constitueront sa matrice textuelle spécifique.

Dans un deuxième temps, il conviendra d’approfondir ce domaine en ayant recours à la connaissance de son univers discursif, auquel appartiennent les terminologies, les interactions entre les aspects linguistiques et langagiers, les caractéristiques de son comportement scriptural et communicatif. En outre, cette synergie analytique se révélera précieuse lors de la fabrication d’outils terminographiques appropriés. Nous veillerons à ne pas élaborer des terminologies hors contexte et à ne pas établir des simples listes de termes flanquées de définitions approximatives. Sous cette réserve, le discours spécialisé peut se révéler un lieu de dialogue et d’échanges, là où les concepts/termes fonctionnent. Il va de soi qu’un dictionnaire n’est pas qu’une terminoclature, il est langue et il est discours. Des recherches menées tout aussi bien dans une approche diachronique que synchronique contribueront, de la sorte, à renforcer l’importance de la terminologie thématique (bilingue, multilingue).

Pouvons-nous traiter un domaine tel que celui de la pollution, exemple même de la modernité technologique, par la seule méthode préconisée par la TGT ? Pouvons-nous structurer la terminologie de ce domaine par un travail terminographique traditionnel ? Devons-nous, en tenant compte des avancées de toute sorte, dans le contexte actuel, aller plus loin et ne pas figer l’analyse du domaine, mais l’élargir à une coordination de perspectives qui le définissent et le caractérisent mieux dans cette nouvelle ère de l’information et de la communication ?

Ce questionnement appelle une vision élargie de l’analyse terminologique d’un domaine sur la base d’une recherche fondamentale plus diversifiée et, de ce fait, interdisciplinaire, qui tiendra compte du concept, des champs conceptuels, du terme, des domaines et du langage spécialisé. Nous aurons recours à la Terminologie communicative, vue à travers la TCT, avec le souci constant du caractère pratique des applications terminologiques.

Notre recherche est conduite sous l’angle de la terminologie thématique, comparée ou contrastive (cf. Rondeau, Dubuc, Cabré), qui concerne des études terminologiques en situation de bilinguisme ou de plurilinguisme. Il découlera, naturellement, de cette approche des éléments de type culturel, interlingual, extralinguistiques, en général, et, en particulier, des éléments linguistiques. Nous valoriserons, de la sorte, les dimensions cognitive, linguistique et communicative de la Terminologie.

Les langues de travail sont le français et le portugais, deux langues romanes.

Nous ne voulons pas proposer une nouvelle Terminologie, loin s’en faut. Face aux besoins de description terminologique qui croissent d’une manière exponentielle, notre but est de (re)situer les fondements théoriques et les pratiques terminologiques.

Nous nous inscrirons résolument ainsi dans l’approche terminologique moderne préconisée par Teresa Cabré : une théorie terminologique multidimensionnelle et “variationiste” capable de répondre au complexe caractère communicatif des termes et de leur utilisation dans le discours spécialisé. Nous ne négligeons pas la démarche onomasiologique wüstérienne, à notre avis toujours nécessaire, mais elle ne doit plus s’en tenir au seul objectif de la normalisation qu’elle soit conceptuelle ou dénominative, postulats très éloignés de la diversité et de l’évolution des langages.

Ainsi, réfléchir sur la terminologie de la pollution/poluição implique d’entamer une réflexion sur les connaissances technologiques et par conséquent sur la place de la science et des spécialités dans le contexte actuel.

Notre sujet s’énonce sous le titre suivant : “Étude terminologique du discours spécialisé de la Pollution”.

Son objectif premier est d’apporter des éléments de réflexion sur le travail terminologique appliqué au domaine spécialisé de la pollution. Dès cette étape, plusieurs vecteurs terminologiques s’imposent : la terminologie conceptuelle, la terminologie textuelle, la terminologie du discours, la terminologie communicative.

D’autres objectifs, aussi importants, appellent notre attention : d’une part, ouvrir des pistes sur l’analyse du discours spécialisé, sur le traitement des termes en vue, plus globalement, de concevoir des outils de type dictionnaire terminologique ; d’autre part, faire apparaître à quel point l’analyse d’un domaine du savoir est, actuellement, tributaire de la Terminologie et de ses méthodes.

Il s’agit d’un travail thématique bilingue, essentiellement descriptif, qui pourrait, le cas échéant, constituer la phase préparatoire au recensement des éléments utiles à l’élaboration d’un dictionnaire. Partant d’une analyse de textes relatifs à la pollution, considérée comme une thématique précise mais composite, nous explorerons le réseau de liens qui unissent le technologique, le pédagogico-social, le politique, le juridique, l’anthropologique et l’éthique.

À ce titre les textes se présentent comme des données du traitement terminologique. Ils constituent des éléments d’un processus qui lie textes, documentation, et discours, en projetant l’élaboration d’outils terminographiques. Ces outils étant appelés à véhiculer des connaissances terminologiques sur le domaine traité et à proposer les moyens nécessaires à sa diffusion. Les utilisateurs de ces documents terminologiques pourront être déclinés en fonction des produits proposés. Dans ce but, nous décrirons la nature, les caractéristiques, les critères et les valeurs qui régissent la communication spécialisée.

Le préalable à toute recherche terminologique étant la délimitation du domaine d’application, c’est en fonction de cette délimitation que la constitution de corpus est envisagée. Quant à la pollution, en sa qualité de domaine d’application, nous l’envisagerons forcément dans son caractère composite, interdisciplinaire et transdisciplinaire, avec systématisation des données linguistiques et extra-linguistiques selon les méthodes d’analyse terminologique. La pollution est incluse dans des manuels, il existe déjà quelques glossaires et même un dictionnaire encyclopédique. Il n’y a pas à notre connaissance de travaux terminologiques systématiques sur ce domaine d’expérience. On peut recenser, néanmoins, quelques travaux sur les pluies acides, sur la couche d’ozone, sur les déchets, travaux très circonscrits à quelques aspects terminologiques. La branche n’est pas intégralement traitée.

Une fois le domaine d’application délimité nous avons à constituer un corpus documentaire fidèle à la thématique et aux caractéristiques terminolinguistiques du domaine afin de déterminer et d’analyser ses unités de connaissance et, in fine, d’établir des choix terminographiques.

Le secteur de la Pollution est un bon exemple de la phase post-paradigmatique de l’écologie où un processus accéléré de spécialisation débouche sur des objectifs sociaux concrets. C’est pourquoi, nous nous proposons ensuite de fonder sur cette étude de cas la résolution des questions liées à la description.

Les rapports intimes de la pollution avec le grand domaine de l’écologie, confortent la pollution dans son statut de domaine d’application. L’écologie, forte de ses fondements théoriques, fait aujourd’hui l’objet non seulement d’une vulgarisation foisonnante mais aussi d’une hyperspécialisation croissante. Dans ce vaste courant on retrouve la pollution, domaine au confluent du juridique, du scientifique, de l’institutionnel et du socio-économique.

S’agissant du corpus, sa nature, son identité, sa spécificité répondent intimement à notre démarche terminologique. Du début à la fin de l’étude, le corpus sera toujours présent et aura valeur méthodologique au cours de l’analyse descriptive, comparative/contrastive.

Le corpus ainsi constitué, après informatisation, pourra servir de base de données textuelles en deux langues. Dans le cas de figure de l’étude, ce corpus documentaire a pour but de permettre d’abord l’acquisition de connaissances sur le domaine et secteur technologique de la Pollution, puis de décrire l’univers discursif du langage de la pollution et, finalement, de présenter la terminologie de certains secteurs et zones du champ conceptuel pollution. Grâce aux résultats escomptés, pourront être conçus ultérieurement des outils terminologiques / terminographiques diversifiés correspondant aux besoins et aux objectifs du projet terminologique.

Constitué à partir de l’état scriptural du domaine, le corpus documentaire présente un double caractère, car il concerne un secteur d’activité : la pollution, exprimé dans deux langues, le français et le portugais.

S’agissant du corpus dans son entiereté, il convient de respecter les paramètres méthodologiques de l’analyse descriptive et comparative. C’est pourquoi ce corpus est scindé en deux sous-ensembles : le corpus de référence et le corpus d’analyse. Le corpus documentaire de référence servira à approfondir une compétence cognitive sur la pollution et à régler des questions méthodologiques sur le traitement terminologique pour la constitution de champs terminographiques ; quant au corpus d’analyse ou de base il servira, entre autres, à la détermination du type de discours en pollution et à l’extraction des éléments terminologiques (termes, contextes, occurrences, etc.).

Quelle méthode avons-nous suivi ? Elle est le fruit d’une expérience acquise au cours d’une recherche pour la constitution du DTPE 1 . À cette expérience collective s’ajoute l’enrichissement que constitue le va et vient constant entre réflexion théorique et la pratique dans le cas de la présente étude.

En ce qui concerne la structuration et la présentation du travail, il est composé de trois parties réparties en neuf chapitres.

La première partie intitulée “La Terminologie - questions politico-institutionnelles et problématique du savoir” présente un état des lieux sur l’histoire et sur l’importance actuelle de la Terminologie comme champ de connaissance bidimensionnel.

Elle situe la Terminologie au sein de la problématique des enjeux politico-institutionnels en mettant l’accent sur son rôle pratique et disciplinaire. Seront abordés, d’une part, les questions que pose la Terminologie comme pratique sociale, professionnelle, culturelle et institutionnelle. D’autre part, seront traités les rapports entre les savoirs et la Terminologie, notamment, les questions liées au concept/terme “Technologie”. L’accent sera mis sur les relations entre langue et technologie. Finalement, la Terminologie y apparaît comme un moyen important de politique linguistique des États liée à leur développement économique. La Terminologie apparaît également comme un partenaire privilégié de l’essor et du développement des connaissances ; comme un outil important pour l’internationalisation du savoir ; et comme une discipline à part entière à la fois autonome, interdisciplinaire et transdisciplinaire.

Cette partie est divisée en deux chapitres. Le premier porte sur l’avènement et l’essor de la Terminologie à partir d’un bref aperçu historique. Seront soulignés les aspects politique, institutionnel et (socio) linguistique qui caractérisent la discipline. Seront recensés également les relations entre langue et science, dans le contexte des pays que nous étudions. Dans ce sens seront abordés les relations entre science, savants/spécialistes et terminologies, sans négliger les questions liées à la planification linguistique et terminologique, aux processus de normalisation et aux moyens d’intervention appliqués plus précisément au cas de la francophonie et de la lusophonie. On trouvera également quelques aperçus sur l’enseignement des Lsp et de la terminotique. Le chapitre s’achève sur les liens qui unissent les terminologies aux savoirs modernes.

Le deuxième chapitre est consacré à la science, ses approches, problématiques et enjeux. Quelques pages sont consacrées à la place et l’identité du savoir dans une perspective historique, philosophique, terminologique, sémiotique et socio-économique. Sera alors entamé le parcours épistémologique et historique des sciences nécessaire à l’analyse, à la description de la Pollution. On focalisera l’attention sur l’évolution des liens entre science et technique, ainsi que la constitution de nomenclatures dans les moments de ruptures épistémologiques. On tiendra notamment compte des questions de paradigme lié à la Science, aux questions de méthode(s) et aux éléments qui présentent un intérêt terminologique pour la science : science comme produit sémiotique, comme ensemble de discours et de textes, comme vecteur de connaissance par l’information et la communication. Cette relation importante entre la Science et la Terminologie sera rendue sensible non seulement par des exemples tirés de notre étude de cas mais parallèlement avec le concours de la Terminologie diachronique qui se base sur une approche conceptuelle et sémantique. Nous soulignerons également la place croissante que la Science occupe dans nos sociétés et corrélativement la terminologie comme miroir de la culture scientifique. Nous aborderons le cas du Portugal en ce qui concerne l’essor et le développement des Sciences liées aux préoccupations terminologiques.

La deuxième partie est consacrée aux questions épistémologiques et théorico-méthodologiques concernant la connaissance, la circulation du savoir et la communication spécialisée. Questions liées, dans une perspective terminologique au corpus, aux domaines, aux textes et aux discours spécialisés. Cette deuxième partie a pour but d’exposer la problématique nécessaire pour mener à bien un travail terminologique adapté aux besoins et aux objectifs d’une recherche spécifique en langage spécialisé, aussi éloignée que possible de l’idée d’un moule universel d’analyse du langage spécialisé. Elle est constituée de quatre chapitres (numérotés de III, IV, V et VI)

Le chapitre III est consacré aux questions sur la connaissance scientifique et le rôle du terminologue, sur les théories et les paradigmes comme axes d’un observatoire terminologique, sur la circulation du savoir et l’importance du chercheur, du langage et du discours scientifique. Sur le plan épistémologique, l’accent sera mis sur les acceptions de terminologie et d’éditologie, toujours dans une optique d’application à notre étude. Le processus de production et de renouvellement de connaissances sera également traité. On abordera la question des théories et des paradigmes, notamment, “l’âge écologique” et la connaissance en tant que processus sémiotique et ensemble discursif. Les rapports herméneutiques (chercheur/producteur de sens et public destinataire), élargiront les questions sur l’activité scientifique, la communauté discursive et la circulation du savoir. Le discours sera analysé comme le résultat d’opérations de cognition et de langage et comme un moyen de production et de renouvellement de connaissances. À ce titre, il est un facteur de progrès de la spécialité grâce à la présence dans chaque domaine de terminologies organisées en réseaux et grâce à des formations discursives. Nous conclurons par une incursion linguistico-terminologique dans le champ des typologies du discours spécialisé.

Les chapitres IV et V sont consacrés aux questions relatives à la communication spécialisée, sa variabilité, ainsi que les conditions pragmatiques de sa production. Il sera accordée une attention particulière à l’univers discursif des langages spécialisés, notamment, en insistant sur les éléments information, communication et système matriciel des textes spécialisés. La variation linguistique des discours ainsi que les relations entre discours, rhétorique et communication seront traitées. On présentera le discours de la pollution en tant que structure descriptive et constructive, s’identifiant à partir de thèmes organisés de façon permanente, cohérente et rigoureuse par la conjonction d’une structure spécifique de concepts et objets et d’un certain type d’énonciation. La vulgarisation comme ouverture sociale de la Science ainsi que les notions de savoir partagé et de savoir réparti feront l’objet d’une particulière attention.

Le cinquième chapitre porte, plus précisément, sur les textes, unités fondamentales de la communication spécialisée, en tant que moyens et supports de l’analyse terminologique. On considérera l’hypothèse de la scripturation comme moyen pour le terminologue de connaître les schémas argumentatifs, les mouvements conceptuels et terminologiques d’un domaine. Ce sont des aspects qui aideront à mieux cerner la structure conceptuelle et terminologique d’un domaine dans une étape précise de recherche terminologique. De la sorte, l’utilisation de la documentation en terminologie prend tout son sens. Les choix documentaires s’avéreront primordiaux pour cerner les contours du domaine. Ainsi, les textes de la Pollution apparaissent comme marqueurs d’un savoir composite, interdisciplinaire et transversal. C’est pourquoi, il était du plus grand intérêt d’utiliser une méthodologie ouverte et appropriée à ce domaine à la fois technologique, économique et social.

Le chapitre VI est, par conséquent, consacré au corpus de la pollution. L’importance des choix et l’analyse documentaire sont ici confirmés. L’importance de la linguistique de corpus pour le traitement du domaine de la pollution sera évoquée. Seront formulées des questions telles que : Comment définir aujourd’hui un corpus ? Quelle est l’importance de la linguistique de corpus pour les études terminologiques ? Quels types de corpus rendent le mieux les résultats de l’analyse terminologique ? Le rapprochement nécessaire et évident du corpus, en tant que base documentaire et vivier de données, sera fait avec les SIC (sciences de l’information et de la communication) et l’Informatique.

Ainsi, dans les deux premières parties les grandes lignes d’orientation théoriques et méthodologiques ont été tracées. La deuxième partie, plus applicative, a contribué à la préparation spécifique du travail de recherche terminologique sur la pollution.

Quant à la troisième partie, elle est consacrée aux phases du travail terminologique qui suivent le choix de la documentation, la sélection du corpus et l’analyse des textes/discours. Il s’agit d’une étape plus linguistique, au cours de laquelle seront finalisés les éléments destinés, selon une méthode terminologique appropriée, à intégrer une structure terminographique de type dictionnaire. Nous partirons du principe que le listage de termes, à eux seuls, ne peuvent pas caractériser un type de discours spécialisé car les termes vivent dans un environnement linguistique. C’est, précisément, l’analyse linguistique qui contribuera à la construction des définitions et autres aspects essentiels à l’analyse terminologique : type de structures discursives, éléments objectifs/subjectifs. Finalement, une telle analyse permet, entre autres, de dégager les unités de compréhension (concepts, catégories), les différentes catégorisations et variables du champ conceptuel, les modèles de lexicalisations, subsumées par des relations sémantiques, ainsi que les rapports entre unités linguistiques et unités non linguistiques.

Dans le chapitre VII on traitera le problème de la délimitation de la thématique ainsi que celui des classifications appliquées à la Pollution. Une approche historique et interdisciplinaire permettra de mieux définir le domaine de la pollution sous ses divers aspects. Un tel traitement peut apporter des réponses pour la détermination des limites de la nomenclature, elle-même candidate à la macrostructure d’un support de type dictionnaire. En considérant que le domaine décrit et valide le terme, travailler à partir du domaine est un moyen stable d’identifier, de délimiter, de dénommer et de visualiser une structure cognitive et un système conceptuel. Dans le droit fil de ces observations, une attention particulière sera portée aux questions de découpage des savoirs en domaines, à leurs liaison avec les catégorisations et le classement. On soulignera l’importance de la classification comme support préliminaire à l’acquisition et à la structuration du savoir. On s’arrêtera sur le concept d’archipel des savoirs pour aboutir à la distinction entre domaine et discipline. On montrera que la délimitation du domaine est nécessaire pour donner une première carte géographique du champ thématique et pour indiquer la topographie des termes, constituant l’un et l’autre une table d’orientation pour le travail à venir. Quelques considérations seront faites sur les langages documentaires en tant que moyens de préstructuration du domaine et d’harmonisation de terminoclatures.

Le chapitre VIII traite des tableaux de la pollution conçus comme un échantillon conceptuel/terminologique du domaine. Ils sont la représentation graphique du système conceptuel et terminologique de la Pollution et contribueront à la constitution de sa terminoclature. Ces tableaux, par leur type de classement, contribueront à l’analyse descriptive et systématique des unités terminologiques au niveau conceptuel, dénominatif et significatif. Deux jeux de tableaux sont présentés, un pour le français et l’autre pour le portugais, sous la base d’un réseau de rapports de superordination, de subordination et de coordination.

Le dernier chapitre sera consacré à l’analyse de la terminoclature de la pollution, sous l’angle linguistique, conjuguant analyse formelle, sémantique et fonctionnelle. On procèdera à l’analyse descriptive et systématique des termes au niveau conceptuel, morphosyntaxique et sémantique ainsi qu’à la présentation de ses particularités terminologiques. Un intérêt particulier sera accordé à l’analyse conceptuelle et sémantique, ainsi qu’aux rapports entre concepts dans la mesure où ce sont des éléments à intégrer dans les champs textuels d’un recueil terminographique.

Au terme de cette introduction, nous espérons avoir poussé des portes au-delà desquelles s’ouvriront de nouvelles perspectives. Ainsi se dessinent à l’horizon des possibilités qui restent à approfondir aussi bien au niveau de notre recherche que d’autres travaux terminologiques.

Notes
1.

Dictionnaire des Termes Préférentiels de l’Écologie en cours d’élaboration au sein du GRLLP de l’Université Lumière Lyon2