7.2.1.2 Les apports du XIXes : de la proto-écologie à l’écologie

Au XIXes, un autre terme passe-partout joua le rôle de concept écologique. Il s’agit du terme organisme (ou entité unique) qui était pris dans l’aception économie de la nature. Les notions linéennes de l’économie de la nature constituaient le thème écologique, par excellence, traité encore dans les premières décennies du XIXes 486 par les scientifiques anglais et américains.

Comme on peut le constater, ce siècle s’ouvre à la pensée écologique du siècle précédent : les espèces sont interdépendantes et ont des lieux de vie. L’écologie demeure une méthode descriptive et qualitative. Par ailleurs, on voit apparaître, à côté des écologues, les romantiques et leur vision idyllique de la nature.

H.D. Thoreau était l’héritier de G. White. Il utilisa la même démarche pour décrire la flore et la faune de Concord. Néanmoins, Thoreau était convaincu que l’occupation des terres américaines avait été réalisée au prix de destructions brutales non exemptes de conséquences fâcheuses.

L’histoire de l’écologie au XIXes fut également une histoire parsemée de voyages d’observations de la flore et de la faune, dans des écosystèmes souvent hostiles 487 .

À tout cela venait s’ajouter une nouveauté : la foi en la science. Les hommes de science devenaient les “scientifiques”, c’est-à-dire, les professionnels exerçant un métier noble, exigeant de très hautes compétences 488 . Ce siècle fut donc celui des apports nouveaux de la géologie et de la biologie, ainsi que de l’approfondissement des contributions de la botanique, de la géographie, et de la zoologie.

À une époque où les relations de l’Homme avec la nature sont devenues beaucoup plus pessimistes, le géologue Charles Lyell, l’auteur de Principes de Géologie (1833), expliquait que l’homme était, certes, un élément perturbateur de l’équilibre naturel, il produisait des déséquilibres écologiques, mais aussitôt après surgissait un nouvel équilibre. Il croyait à la stabilité globale de l’environnement, à l’existence d’un ordre immuable dans la nature.

Cependant, un autre événement important était venu contribuer à la complexité des débats tout en aidant le développement de la science écologique. Thomas Malthus avait publié son livre Essai sur le principe de la Population (1798)qui montrait la problématique de la surpopulation et des ses méfaits. Ce livre a beaucoup influencé la pensée de Charles Darwin. À son tour, celui-ci a également contribué à l’implantation de la science écologique avec son ouvrage De l’origine des espèces par voie de sélection naturelle (1859) où il annonçait que l’évolution, idée déjà développée par Jean Lamarck 489 , est le résultat de la sélection naturelle.

Notes
486.

Dieu avait créé une nature intégrée et ordonnée fonctionnant comme une machine universelle “bien huilée”. Ces idées perdurèrent environ jusqu’à la publication du livre de Darwin.

487.

Le naturaliste Charles Darwin (1809-1882), réalisa un voyage pendant cinq ans, au bord du Beagle, en Amérique du Sud et dans les îles Galápagos. Alexandre von Humboldt réalisa un voyage en Amérique tropicale (1799-1804) dont il publia les résultats des observations entre 1805-1832 (30 volumes), puis vers l’Asie centrale. Humboldt est le créateur de la géographie botanique ou géographie des plantes (Essai sur la géographie des plantes en 1805) et contribua également à l’essor de la climatologie et de l’océanographie.

488.

Ce fut le philosophe et mathématicien anglais William Whewell qui créa en 1840 le terme scientist pour désigner ce nouveau métier.

489.

Selon lui, les espèces descendraient les unes des autres par une évolution qui était menée par l’action du milieu.