9.1 Les termes de la Pollution : unités systématiques de connaissance et de signification

Le terme est essentiellement un signe linguistique au sens défini par F. de Saussure (1916), c’est-à-dire une unité linguistique comportant un signifiant et un signifié (...).

‘Ce qui distingue le terme des autres signes linguistiques, c’est d’abord que son extension sémantique se définit par rapport au signifié plutôt que par rapport au signifiant. En terminologie, en effet, la question est non pas de savoir ce que signifie telle forme linguistique, mais bien plutôt, une notion ayant été délimitée clairement, de savoir quelle est la forme linguistique qui la représente. (...) En somme, un terme ne peut pas être considéré isolément, il se présente toujours comme relié à un ensemble sémantique qui peut être, soit une discipline ou une science, soit un domaine d’activités, soit une technique, etc., toujours dans un domaine spécialisé”. (RONDEAU, 1984 : 19)’

L’auteur, en explicitant la place du terme au sein des études linguistiques, insiste avec pertinence sur sa spécificité par rapport au signe linguistique défini par Saussure.

D’autres spécialistes ajoutent des éléments de réflexion tout aussi importants sur la problématique du terme. Gouadec, notamment, insiste sur le fait qu’ “un terme est une unité linguistique désignant un concept, un objet ou un processus” (1990 : 3). Pour Boulanger, le polymorphisme du terme apparaît plus nettement car (1991 : 24) “ le terme n’est terme qu’en vertu d’une suite de statuts imbriqués : celui du texte-discours, celui du créateur du texte, celui du destinataire-décodeur et celui de la situation interdiscursive ou interdisciplinaire”. Lerat (1995) souligne que ce qui caractérise le terme est la “relation biunivoque” qui l’unit à la définition spécialisée. Le terme est marqué dans son essence, au niveau, notamment, scientifique, culturel et sociolinguistique.

Cabré (1998 : 147) est, d’ailleurs, assez catégorique : les terminologies constituent l’aspect le plus frappant des textes spécialisés, chaque terminologie reflète la structure conceptuelle du sujet et chacun des termes qui la constitue dénomme un concept du réseau structuré du domaine.

La position du terme au sein d’un langage spécialisé est précise : il fait partie d’un référentiel, il désigne un concept qui à son tour possède une dénomination. Dans la perspective terminologique, l’analyse du terme est liée à la problématique de l’objet et du concept. D’ailleurs, la Terminologie classique préconise l’approche onomasiologique comme unique méthode d’analyse global du terme. En revanche, la lexicographie, elle, s’appuie sur la démarche sémasiologique. A l’heure actuelle - pratique terminologique oblige ! - la démarche mixte est recommandée car la Terminologie traite non seulement de la problématique du concept mais également celle des termes en tant que signes.

Dans le sens de cette approche mixte, les termes sont des unités de connaissance spécialisée, des unités linguistiques (signes) 686 et des unités de communication spécialisée dont la valeur fonctionnelle, selon le point de vue adopté, apparaît dans les actes de dénommer, de représenter et de signifier 687 .

Par exemple, si, en tant qu’unités cognitives (conceptuelles) les termes permettent l’accès à la connaissance, de plus, en tant que signes, ils représentent les manières de connaître, tout en facilitant le transfert et la diffusion de connaissances spécialisées.

C’est pourquoi, il est important que l’analyse du système conceptuel du domaine détermine les relations qui sont de type logiques et ontologiques, lesquelles aideront à déceler et à organiser les séries terminologiques. Quant à l’analyse des termes, dans l’ordre du langage spécialisé de la pollution/poluição, elle fait appel aux relations de type horizontal, au niveau du lexique, et de type vertical au niveau, notamment, des relations morphosyntaxiques. Cette démarche permettra, au bout de l’analyse, de déterminer les matrices terminogéniques caractéristiques du domaine en étude.

Les termes, en tant qu’ensemble sémiotique spécifique, constituent des éléments de signification. On a souvent, d’ailleurs, l’impression que dans leur contexte spécialisé, la forme des termes suggère leur propre sens ou bien une partie du sens.L’approche sémantique mettra en évidence leur ordre en langue à partir de la détermination des relations, par exemple, de type hiérarchique. Cela peut également aider à éclairer les liens qui existent entre les concepts et les termes au niveau, notamment, de la désignation dans son rapport au concept.

Cet éclairage met en évidence différentes facettes nécessaires à l’étude du terme. Rappelons au passage que la perspective linguistique appliquée au travail terminologique ouvre des nouvelles perspectives à une théorie des termes.

Depuis le début de notre travail nous avons fait référence à la variation textuelle et discursive qui caractérise la communication spécialisée. Mais cette variation s’applique aussi aux concepts et aux désignations, donc aux termes.

Elle aussi, la terminologie de la pollution/poluição constitue un ensemble logique car elle occupe une place spécifique dans l’univers de la connaissance spécialisée. De la même façon, le discours de la pollution/poluição dispose d’une terminologie propre et d’un ensemble conceptuel caractéristique. Cet ensemble est en mesure de représenter valablement les phénomènes, l’enchaînement d’opérations, les savoir-faire, les moyens, les méthodes, les finalités et les résultats. Et il fait apparaître le schème morphosémantique et la convention langagière.

La connaissance spécialisée qui est déterminée par un environnement pragmatique et socioculturelle particuliers, s’articule sémiotiquement, autour des concepts, des termes, des moyens de représentation et de transfert. Enfin, les matériaux utilisés pour l’expression et la communication de la pollution/poluição constituent son système sémiotique de spécialité.

Notes
686.

Cabré, par exemple, indique que les termes sont des unités cognitives spéciales. Elle distingue également les unités de signification spécialisée des unités terminologiques. En tant que signes, les termes sont distinctifs et significatifs. Le terme constitue est une structure coordonnée de nature cognitive, significative et désignative.

687.

Cf. triangle sémiotique.