9.2.1 Aspects de la syntagmatique terminologique

Dans les pages précédentes nous avons signalé comme procédé de formation lexicale, à côté de la composition traditionnelle et de la confixation, la composition syntagmatique 745 .

Il s’agit globalement de l’assemblage de bases lexicales séparées par des blancs. Bref, on forme des unités morphosyntaxiques complexes, cohérentes au plan sémantique et lexical, par l’union d’au moins deux mots constitutifs, dont un des éléments constitue le terme noyau. On peut pousser plus loin le raisonnement en considérant qu’un composé syntagmatique se trouve entre la proposition et le terme, pouvant devenir une unité lexicale graphiquement continue (Kocourek, 1982). Ces formations syntagmatiques peuvent être, de surcroît, un produit de plusieurs types de transformations (nominalisations, adjectivations, verbalisations) survenues dans le discours 746 et qui, simultanément au développement et à l’institutionnalisation effective du champ des connaissances auquel elles appartiennent, s’imposent par l’usage.

Néanmoins, on est confronté à un problème délicat et complexe à traiter en analyse terminologique. En partant du principe que l’aspect cognitif des terminologies est essentiel pour la compréhension d’un domaine, nous considérons que ces séquences dénominatives (Lerat, 1992) dépendent et résultent des champs conceptuels du domaine qui les concerne.

Comme les termes, elles sont également des unités fonctionnelles. En outre, ces séquences ou syntagmes peuvent constituer un baromètre fiable pour mesurer les tendances de variation et de stabilisation terminologique du domaine. Elles se comportent comme des descripteurs, elles se répandent au fur et à mesure que le domaine évolue et elles répondent vraisemblablement à un objectif d’organisation et de clarté conceptuelle de la pensée spécialisée. Ces combinaisons peuvent finalement être analysées dans leurs rapports avec les termes fondamentaux du champ de spécialité dans des situations syntactico-sémantiques caractéristiques (cooccurrences ou collocations 747 ).

Toutefois, la question mérite d’être approfondie car, en effet, on est confronté à plusieurs points de vue, plusieurs pratiques et plusieurs courants. Au coeur de la question on trouve la distinction entre les véritables unités terminologiques complexes et les unités libres ou fortuites 748 .

Les études se dirigent donc inéxorablement vers l’analyse de la combinabilité / commutabilité d’éléments, du processus de figement et de codification lexical du terme (lexicalisation). C’est pourquoi d’aucuns englobent dans les modèles de formations syntagmatiques la composition, la phraséologie, la combinatoire, la collocation, la corrélation, etc. On peut même considérer que les visées sont fondamentalement typologiques avec des zests de classement à but pragmatique. De toute façon, accorder une place importante à ces dénominations phraséologiques au sein des Lsp contribuera à ouvrir de nouvelles perspectives en analyse des terminologies, notamment, au niveau de l’analyse thématique du domaine et surtout vis-à-vis le type de démarche désignative utilisée par chaque champ de connaissances.

C’est une question qui fait couler beaucoup d’encre. Et cela nous amène directement à la problématique de la phraséologie qui, depuis environ les années soixante dix, intéresse de plus en plus les linguistes et, plus récémment, les terminologues, phraséologues et phraséographes. On est, de plus, en présence d’une profusion de désignations et d’acceptions qui sont autant de projets et de recherches réels pour déterminer la nature et la fonction de ces unités au sein du diasystème langue, en générale, et au sein des différents langages spécialisés, en particulier. Parmi ces formes, nous pouvons citer : “syntagme lexicalisé”, “syntagme terminologique”, “terme-syntagme”, “syntagme codé”, “syntagme lexical” 749 ; “composé syntagmatique” ; “groupe lexical”, “groupe de mots”, “lexème complexe” ; “synapsis”, “lexie complexe”, “synthème” 750 ; “expression”, “locution”, “paralexème” ; “phraséolexème”, “entité phraséologique”, “unité phraséologique”, “phraséologie”, “phraséologisme”, “phrasème” 751 .

Il est bien vrai que si on arrive à connaître, d’une façon globale, les mécanismes qui engendrent et font évoluer les constructions syntagmatiques ou phraséologies, on apportera ainsi une contribution majeure, notamment, aux méthodes d’apprentissage d’un langage spécialisé aussi bien au niveau cognitif que terminologique, voire rédactionnel, sans oublier la traduction et l’interprétation en langues de spécialités.

Nous rappelons, pour mieux évaluer l’état de la question, que si ces constructions commencent à être mieux expliquées au niveau de la langue générale, l’analyse de la composition syntagmatique en langue de spécialité est pour l’instant tributaire d’expérimentations limitées à certains domaines, souvent à l’état de prémisses, et à certains outils offerts par l’informatique (concordanciers, par exemple). La vision de l’ensemble de la question aussi bien au niveau conceptuel, terminologique, linguistique et pragmatique fait défaut.

Sous l’angle linguistique, c’est une problématique qui se double de deux aspects en intersection : l’axe syntagmatique, ou les combinaisons linéaires “in praesentia”, et l’axe paradigmatique, rapports de ces unités “in absentia” 752 . Des rapprochements entre la stabilité syntaxique et la stabilité léxico-sémantique sont à approfondir. En effet, ces séquences syntagmatiques sont, ou traitées comme des unités en langue (unités phraséologiques), ou traitées comme des unités en discours (syntagmes). Qui plus est, reste latent le flou créé entre syntagmes terminologiques et syntagmes discursifs.

Voyons un peu plus en détail la question de la phraséologie en analyse terminologique en convoquant des auteurs qui apportent des éléments de réflexion sur la problèmatique ci-dessus énoncée et qui s’encadrent dans les commentaires que nous ferons en l’occurrence.

Ainsi, Picht (1990, cité par S. Pavel, 1993) dit que la phraséologie est une branche des Lsp qui étudie, au niveau du discours spécialisé 753 , les connexions syntaxiques (notamment, la synonymie et l’équivalence). L’étude se prolonge au sein du système conceptuel, notamment, en ce qui concerne les modifications et les créations de solidarités conceptuelles et lexicales liées à l’univers cognitif du champ de connaissances et des normes linguistiques qui le gèrent.

Il semblerait donc que le phraséologisme, au même titre que le terme, possède une idiosyncrasie conceptuelle et a un caractère lexicale et syntaxique inéluctables. Ainsi, chaque champ de connaissances aura les phraséologies qu’il mérite.

Cela oblige le terminologue à se poser un certain nombre d’interrogations. Ne serait-il plus raisonnable, en tant que terminologue faisant une recherche thématique, de s’approprier une méthode cohérente et productive en termes de repérage et d’extraction de phraséologies ? Et pour ce faire ne serait-il pas plus judicieux de procéder à un certain nombre d’opérations ? Par exemple, situer ces formations dans le réseau conceptuel et en dégager sa pertinence conceptuelle / terminologique ou thématique, relever les traits définitoires, mesurer le degré de lexicalisation et de spécialisation ? Ainsi, le chercheur pourrait s’appuyer sur un corpus textuel bien sélectionné dont il dégagerait, à partir des contextes, des occurrents et des collocations, pour obtenir des résultats conséquents. Ces formules pratiques l’aiderait sûrement à confirmer les coordinations entre l’axe syntagmatique et l’axe paradigmatique.

Ainsi, n’est-il pas plus judicieux, dans une première étape, et au moment de la démarche cognitive, de procéder à l’identification et à la distinction des phraséologies au sein du réseau conceptuel à l’étude ? Et dans une deuxième étape, de vérifier les alliances fixes ou libres de ces unités dans le discours même, c’est-à-dire, dans les textes du corpus et par rapport à l’ensemble terminologique du domaine 754 ? Et finalement, dans le but de consigner ces unités dans un répertoire terminologique, n’est-il pas plus judicieux de bien pondérer le type d’intégration 755 dans la macrostruture et dans la microstructure ?

Mais on bute sans cesse sur la question de leur identité. Ce type de séquences dénominatives correspondent-elles à des concepts stables, leur forme reste-elle immuable ? En somme, s’agit-il d’unités lexicalisées, ayant une assise institutionnelle et une signification au sein du secteur spécialisé où elles sont utilisées ?

Dubois dans son dictionnaire français-anglais des locutions et expressions verbales (1973) souligne qu’une structure syntagmatique est une phraséologie quand la combinaison qu’elle constitue est stable. Comme nous l’avons vu précédemment, une unité lexicale reste stable dès lors que le concept qu’elle désigne le reste aussi. Nous insisterons donc sur le besoin de commencer l’analyse des combinatoires syntagmatiques dans l’ordre des concepts et de leurs relations, en tant que membres effectifs de la terminoclature d’un domaine d’expérience. Ce faisant nous serons en mesure d’apprécier les différents degrés de figement de telle ou telle formation. Cette analyser est d’autant plus pertinente que le portugais et le français, langues analytiques par excellence, ont une grande tendance à la périphrase, et donc à la phraséologie.

Devant l’étendue des réflexions et des pratiques actives que cette question soulève, ce n’est pas sans raison que Cabré (1993) suggère trois types de formations syntagmatiques : les formations lexématiques à valeur terminologique (termes syntagmatiques), la phraséologie, les formations libres (syntagmes libres du discours).

Bref, on s’aperçoit que depuis le discours jusqu’à l’institutionnalisation de ces unités complexes, par le réseau conceptuel et par la langue, se développe tout un processus de phraséologisation. Les composés syntagmatiques peuvent être des unités syntaxiques non figées, en voie de figement ou déjà entièrement des unités terminologiques, désignations de concepts. C’est le caractère stable de leur combinatoire et de leur environnement linguistique qui sont à la base de la plupart des études sur les unités syntagmatiques. On voit, par exemple, qu’une alliance syntaxique, qui au départ répondait à un besoin immédiat de spécialisation et de dénomination, une fois utilisé avec une certaine cadence dans un discours spécialisé, s’impose et par la forme et par le sens spécialisé acquis. Cette nouvelle unité terminologique complexe est alors prête à produire des nouvelles interdépendances avec d’autres unités du secteur, devenant ainsi en langue un élément de paradigme. À titre d’illustration : águas residuais en pollution, et tratamento terciário de águas residuais terme technologique (les processus de traitement) de la dépollution.

Ieda Alves (1990 : 51) souligne que la composition syntagmatique existe quand les membres d’un segment se trouvent en intime relation syntaxique, aussi morphologique que sémantique, de façon à constituer une seule unité lexicale.

L’auteur fait la distinction, au sein du groupe plus vaste des termes complexes, entre les composés syntagmatiques et les autres composés. Elle explique que, selon la tradition grammaticale, une unité est composée dès lors que sa lexicalisation n’est plus mise en cause 756 . Tout naturellement surgit alors la question de la lexicalisation des compositions syntagmatiques. On dit qu’une composition syntagmatique se lexicalise quand, grâce à la fréquence de son utilisation, elle ne peut plus admettre l’inclusion d’un autre élément qui impliquerait une modification de sa forme et l’altération sémantique de l’ensemble. Il s’agit, de fait, d’un processus à cadence lente et progressive, montrant le figement d’une alliance libre de morphèmes vers un syntagme lexical soudé. Il résulte souvent de l’usage, mais pas toujours. Il ne faut donc pas oublier qu’il s’agit d’une unité de forme et de contenu.

En fin de compte, ces formations se répétent dans les discours spécialisés parce qu’elles jouent, comme nous l’avons déjà remarqué, un rôle cognitivo-discursif, communicatif et terminologique important au sein de leur univers langagier. Par exemple, dans l’optique décrite “efeito de estufa” (Portugal), et sa variante topolectale “efeito estufa” (Brésil), est une expression lexicalisée parce qu’il y a inséparabilité des éléments, elles signifient en bloc et elles sont des unités soudées au plan syntagmatique. À cet ensemble de caractéristiques il faudra ajouter qu’il s’agit d’un défini d’une définition spécialisée 757 .

Pour le spécialiste, reconnaître dans ces unités syntagmatiques des unités lexicales complexes, désignations de concepts, n’est pas difficile. Il en est tout autrement pour un terminologue qui n’est pas forcément spécialiste d’un domaine d’expérience comme la pollution, par exemple. C’est pourquoi des recherches et des réflexions sont nécessaires pour procéder à la reconnaissance des unités lexicalisées.

Par exemple, Kocourek (1982) cite comme critères de lexicalisation d’unités complexes, les critères syntaxique, sémantique et de maniabilité syntagmatique ; et le critère d’usage. Le critère syntaxique est censé démontrer que l’unité a une cohésion syntaxique et, notamment, que l’ordre des mots est stable 758 . Quant au critère sémantique il doit préciser si l’unité est monoréférentielle, vérifier le rapport entre le défini et la définition, entre un concept et un référent. Finalement, le critère de mémorisation est fondamentalment attaché aux vecteurs temps et usage. Ces critères relévent finalement plus d’une approche syntaxique que des particularités cognitives et sémantiques des syntagmes.

En s’appuyant sur ces critères Kocourek a proposé quatre opérations : déplacement, expansion, ellipse, commutation 759 . La première utilise le test de la permutation du déterminant, la deuxième celui de l’ajout ou test de l’inséparabilité des éléments du syntagme au niveau du déterminé et du déterminant, la troisième utilise la suppression du déterminé ou du déterminant, la dernière utilise la commutation du déterminant ou du syntagme en entier.

Longtemps attachés à l’idée de juger un syntagme lexicalisé par les rapports entre le déterminé et le déterminant, ce qui valait dire rester au niveau d’une analyse en langue, la Terminologie ne pouvait pas mettre l’accent sur l’immense importance des syntagmes au sein des terminologies. Éléments fulcraux de constitution de terminologies et donc de connaissances, les syntagmes lexicalisés sont des termes, des signes, désignations de concepts.

Les critères énoncés présentent des avantages et des faiblesses. Au nombre des avantages, il faut citer, notamment, la connaissance de ces syntagmes au niveau de leur fonctionnement en discours et de leur degré de cohésion interne. Quant à la principale faiblesse, elle apparaît lors de la lexicalisation effective des syntagmes analysés. Par exemple, on s’aperçoit que restent ouvertes les questions concernant l’opacité ou la transparence sémantiques, la délimitation du sens en unité syntagmatique (par exemple, sens propre, sens spécifique, extension de sens), entre locutions employées en langue générale et en langage spécialisé, entre termes et termes-syntagmes, entre syntagmes terminologiques et définition.

Pour résumer en quelques lignes les éléments présentés, nous dirons que les procédés les plus utilisés pour déterminer la lexicalisation des syntagmes terminologiques et de locutions diverses restent attachés aux critères qui mesurent le degré de cohésion des bases, le type de liens syntaxiques, l’ordre des mots et les possibilités de nouvelles expansions. Peut-être obtiendra-t-on de meilleurs résultats si le processus était précédé et même croisé avec la méthode terminologique d’analyse conceptuelle.

À ces questions qui ouvrent beaucoup de pistes en syntagmatique terminologique, vient s’ajouter la question du traitement de ces segments dans un but pragmatique. Est-ce qu’il y a des principes méthodologiques propres à déterminer et à distinguer les phraséologismes qui répondraient aux besoins de différents utilisateurs ?

Gouadec (1993), sous son autorité d’enseignant 760 et de phraséographe, et dépassant le cadre de la lexicalisation, met l’accent, par une approche textuelle et descriptive, sur les modèles d’extraction, description, gestion et exploitation des entités phraséologiques ou stéréotypes phraséologiques. Ces stéréotypes appartiennent à la même catégorie ou à une catégorie différente et attestent l’idée que les termes, dans un un environnement écrit, ont des préférences d’affiliation 761 .

Il explique que le terme entité phraséologique correspond à des expressions de caractères, ou inter-relations d’entités terminologiques ou d’entités lexicales, produite à partir de “chaînes de caractères significatives”, pouvant être d’étendues variables. Les entités phraséologiques sont des formes récurrentes. Elles témoignent d’une part d’une spécialisation, possèdant un “capital risque” ou une “plus-value professionnelle” et, d’autre part, elles peuvent faire partie d’un programme d’aménagement terminologique. Chaque entité phraséologique 762 est représentée par un phraséologisme.

L’extraction de ces phraséologies se fonde, selon Gouadec, sur deux critères : les critères objectifs (de spécialisation, de fréquence, de récurrence) et les critères subjectifs (les risques et les plus-values). Pour l’auteur ces critères peuvent se croiser ou se coordonner. On doit non seulement tenir compte de la spécialisation et de la répétition de ces formations mais aussi, dans un but phraséographique, voire pédagogique, vérifier les risques et les avantages pour les différents utilisateurs.

Ces unités peuvent, effectivement, imposer des contraintes ou créer des problèmes de manipulation aux utilisateurs 763 . Pour limiter les difficultés, Gouadec propose un modèle à plusieurs fiches servant à l’extraction, la description, la gestion et l’exploitation de ces entités. Avec ce modèle on doit pouvoir traiter et inventorier de façon rigoureuse et différentielle,spécialement, des phraséologies sectorielles, des phraséologies notionnelles, des phraséologies catégorielles, en fonction d’applications diverses. Dans chaque fiche correspondante, Gouadec propose, par exemple, que pour les phraséologies sectorielles l’accent soit mis sur les mots-clé et les descripteurs de champs, pour les phraséologies notionnelles / fonctionnelles les mots-clé et les descripteus de concepts, pour les phraséologies discursives-typologiques les caractères du discours. Ce sont des phraséologies qui peuvent être traitées selon le domaine d’application, le concept, la fonction et la typologie.

Cette méthode phraséographique se prête à l’élaboration d’inventaires spécifiques destinés aux différents utilisateurs : des repértoires de phraséologies sectorielles pour les traducteurs, des repértoires de phraséologies notionnelles-fonctionnels ou catégorielles pour les rédacteurs. De la même façon elle facilite d’abord la prise en considération de l’importance cognitive et systémique de chaque terminologie, et ensuite le traitement de ces unités en dossier unique (termes / phraséologies), et, dans une perspective d’agencement au sein d’une macrostructure terminographique, le découpage des unités phraséologiques comme vedettes uniques ou multiples.

Enfin, pour résumer ces points, la phraséologie est bien évidemment fondée sur des rapports étroits entre les combinaisons syntaxiques, la sémantique 764 et l’évolution du réseau conceptuel-discursif et pragmatique des domaines d’expérience où elles apparaissent.

On a effleuré au début de cet exposé, la question de la variabilité de l’étendue des syntagmes terminologiques ainsi que la récurrence de certaines matrices de formations. Les termes complexes suivent en général un schéma déterminé.

Les plus usuels sont :

  • N+N, genre “mots tandem” 765 ou syntagme asyndétique comme abondance dominance, Directive Seveso (lieu-phénomène), méthode TVD 766 ;
  • N+A 767 , genre très répandu et très productif, base déterminé / base déterminant comme poluição atmosférica, poluição hídrica, poluição química, aterro sanitário, aterro nacional, agricultura integrada, contaminação ambiental, contínuo ecológico, corredor ecológico ; agent orange, technologie propre, système écologique 768 , réacteur aérobie, réacteur anaérobie ;
  • N+P+N, du type synapsie, comme poluição da água, poluição dos solos.

Les deux derniers modèles, formations très stables, se prêtent eux-mêmes au jeu de nouvelles extensions, se transformant dans de nouveaux génériques, bases de nouvelles formations 769 . En fait, les plus actuels langages spécialisés s’inspirent des modèles de productivité lexicale des formules et tournures syntagmatiques utilisées en langue générale. Un langage spécialisé a une terminologie de base qui servira comme matrice pour de nouvelles formations. L’ensemble terminologique est ainsi progressivement une intrication et un mariage d’unités, producteur de composés et de termes-syntagmes formant “des concaténations de syntagmes à structure hiérarchique” 770 (Kocourek, 1982 : 54), de plus en plus longs et/ou parallèllement, par sa dynamique discursive, se créant des variantes abréviatives, ou des troncations diverses, par l’effacement d’un ou de plusieurs de ses éléments. L’expansion des syntagmes, qui est formelle et sémantique, devient un moyen d’élargissement du nom.

Considérons à nouveau le champ pratique de notre étude. Il est à noter dans l’analyse des termes complexes en pollution/poluição certaines idiosyncrasies intéressantes. Dans les formations du type N+A on maintient généralement l’ordre de distribution régissant / spécificateur. À l’intérieur du syntagme, ces éléments conservent les relations grammaticales caractéristiques de la classe à laquelle ils appartiennent. Néanmoins, et selon une certaine fréquence, on vérifie la fixation de la forme sans le déterminé (nominalisations par l’ellipse dont le nom dérivé était l’hyponyme du terme enlevé) : (compostos) (os) bifenilos policlorados, (produtos) (os) tóxicos, (organismos) (os) decompositores, (agente) (o poluidor) 771 . Importé de la langue général ou d’autre domaines, le déterminé ou régissant sert dans une première phase à fixer la notion spécifique. Il devient par l’usage une notion général du domaine de la pollution.

Le langage de la pollution / poluição est un discours très fortement phraséoactif du fait de son développement technologique, d’une phase de grande actualisation terminologique, des programmes d’harmonisation et d’aménagement terminologique des secteurs comme les polluants et les déchets.

Cette problématique de l’expansion du syntagme peut être analysée dans le domaine à partir des syntagmes - fleuves (Kocourek, 1982 : 54) qui ont une fréquenceassez importante. Les syntagmes-fleuves sont des désignations généralement longues, descriptives et explicatives de la nature et des fonctions de l’objet designé. Ils dénotent, par leur compléxité sémantique, une très grande spécialisation conceptuelle

Ces syntagmes sont une expansion des schémas, particulièrement, du type N+A et N+P+N. À titre d’illustration :

  • determinação de metais pesados (Pb e Cr) em águas superficiais e resíduos de esgotos industriais ;
  • poluição ambiental devido à contaminação de águas fluviais por metais pesados ;
  • résíduos sólidos urbanos 772 ;
  • resíduos sólidos do tratamento de gases ;
  • resíduos inorgânicos com metais provenientes do tratamento de metais e do seu revestimento e da hidrometalurgia de metais não ferrosos ;
  • resíduos cianurados (alcalinos) contendo metais pesados excepto o crómio ;
  • resíduos cianurados (alcalinos) sem metais pesados ; - compostagem de lixo em leiras aeradas
  • unidade de incineração e tratamento físico-químico ;
  • sistema de tratamento de resíduos industriais ;
  • chromatographie en phase gazeuse avec détecteur ITD après “purge and trap” ;
  • chromatographie en phase gazeuse avec détecteur ECD, après extraction à l’hexane.

Un syntagme-fleuve est donc de nature descriptivo-explicative et classificatoire 773 . On le voit à l’oeuvre surtout dans les relations séquentielles, d’inclusion, d’implication. Les exemples nous montrent que ces syntagmes sont constitués de régissants et de modificateurs. Au niveau morphosyntaxique ils intègrent des adjectifs qualificatifs et relationnels, des infinitifs, des participes passés ou présents à valeur adjectival, des constructions verbales passives, des propositions de coordination, des subordonnées relatives, de cause, de conséquence. Le syntagme-fleuve peut avoir, finalement, diverses fonctions syntaxiques : sujet, objet, attribut, complément de nom ou d’adjectif, complément de détermination.

Notes
745.

Rappelons que nous considérons ici la composition traditionnelle comme celle qui a trait à la formation de composés par juxtaposition (identifiable par le trait d’union) ou par agglutination. La composition syntagmatique a tendance aujourd’hui à dépasser la confixation (ou recomposition à partir de pseudopréfixes, de A. Martinet). Le langage spécialisé est le plus souvent caractérisé par les modèles de formation du type confixation et composition syntagmatique. En prenant l’exemple de l’écologie et de la pollution, on remarquera que les formants à partir des racines classiques sont les matériaux privilégiés de la terminologie de l’écologie, tandis que les formations terminologiques à base d’unités phraséologiques constituent les matériaux de la dynamique et de la créativité en pollution (processus d’autonomisation). À ce sujet, on pourra lire avec intérêt les travaux de Guilbert (cf. Bibliographie).

746.

Représentation de ces segments selon leur forme syntaxique ou alors par compléxité concise (condensation syntaxique). Par exemple, la transformation syntagme verbale-syntagme nominal dans les langages spécialisés d’action : “o ambiente degrada-se” et “a degradação do ambiente”, “os resíduos devem ser recolhidos” et “a recolha de resíduos”, “a energia deve ser reciclada” et “a reciclagem de energia”, “l’air a une bonne qualité” et “la qualité de l’air”.

747.

On peut les extraire par le système de recherche de mots-clés en contexte (KWIC). Certains auteurs préfèrent le terme de collocation à celui de phraséologie. La collocation est globalement un agencement conventionnel de deux lexèmes dans un environnement linguistique particulier, liée aux idées d’implication, affinités et sélection entre éléments. Les collocations lexicales englobent les catégories du nom, adjectif, verbe et adverbe ; les collocations grammaticales les plus usuelles sont celles des matrices N+A, N+P+N,N+N, V+N.

748.

Le distinction entre désignations de concepts qui renvoient à un référent précis et les unités qui vivent au gré des discours.

749.

Le “ syntagme lexicalisé” (Picoche) est considéré comme composé d’un signifiant et d’un concept unitaire et non une association de régissant et de modificateur ; un “syntagme terminologique” est une composition à plusieurs mots pour désigner des expressions et des tournures caractéristiques d’un langage spécialisé, il est pris parfois pour un “syntagme discursif”; le terme-syntagme (Kocourek) constitue une sous-classe des unités phraséologiques, il est lexicalisé et peut être attesté par une définition. Bref, le syntagme étant une unité de fonction, un constituant de la phrase, est un ensemble de mots ordonnés autour d’un nom (syntagme nominal), d’un verbe (syntagme verbale), d’une préposition (syntagme prépositionnnel).

750.

La lexie complexe (Pottier) et la synapsie (Benveniste) se correspondent plus ou moins. La lexie est le terme préféré pour indiquer, dans un système linguistique, l’élément fondamental de la construction syntaxique. La lexie complexe est une combinaison cohérente d’éléments (une étude du lexique se base ici sur l’examen simultané des relations sémantiques et des relations syntaxiques). La synapsie est une unité composée de plusieurs éléments (lexèmes) de la catégorie substantif. Ainsi, la synapsie est le produit d’une union syntaxique (joncteurs du type à et de, par exemple) entre lexèmes qui conservent leur forme de départ, possède une structure fixe (déterminé + déterminant) et a une tendance à la monosémie. C’est une construction dynamique et conserve des possibilités d’expansion. Le “synthème” (Martinet) est une unité obtenue par dérivation ou par composition et se comporte syntaxiquement comme un monème. Tandis que les monèmes du synthème sont imposés, ceux du syntagme sont libres.

751.

La phraséologie, le phraséologisme et plus récemment le phrasème sont les termes utilisées en Terminologie pour essayer de décrire et de classer des phénomènes de formation syntagmatique, de phrases codées, d’expressions, de locutions (nominales), d’associations discursives, tournures idiomatiques, etc. Sur ce sujet une panoplie de réflexions, d’études, de propositions ont été menées, et sont menées, par des spécialistes, notamment, Bally, Dubois, Picoche, Auger, Gouadec, Cormier, Wagner, De Bessé, Greimas, Goffin, Picht, Rey-Debove, Hansman, Mel’cuk, Phal.

752.

De plus, la part de l’arbitraire n’est pas négligeable.

753.

Déjà en 1987, l’auteur avait remarqué qu’une unité phraséologique pouvait correspondre au contexte linguistique du terme dans un texte donné mais pas l’inverse. Les contextes aident à comprendre le comportement discursif et linguistique des phraséologies. Les occurrences et collocations relevées en contexte permettent de vérifier la fréquence et la récurrence des unités syntagmatiques, les contextes servant ainsi à juger du degré de leur figement.

754.

Dans le domaine qui nous occupe, avant de procéder au traitement semi-automatique de notre terminologie, il a fallu résoudre la question de la présentation des solidarités lexicales dans les programmes hypertexte, notamment, le programme Stablex. Quand nous avons procédé à l’analyse du discours par Stablex les termes complexes phraséologiques étaient déjà délimités (ainsi que les locutions et autres tournures de la langue générale) afin de ne pas fausser l’analyse paramétrique, de démontrer les collocations habituelles, leur fréquence et leur distribution. Ce qui nous a permis également de distinguer les unités complexes phraséologiques fixes des groupements de lexies du type “ambiente ecologicamente equilibrado”, agente potencialmente contaminante”, “actividades industriais potencialmente poluidoras”.

755.

Par exemple, comme adresse, notamment la question du découpage en plusieurs vedettes ou dans une seule vedette comme l’unité terminologique classique ; comme renvoi simple ou croisé, note, etc.

756.

L’unité phraséologique ou phrasème est pour la lexicologie une unité lexicale complexe à caractère fixe.

757.

“ Efeito de estufa” : fenómeno de aquecimento das camadas inferiores da atmosfera, resultante da retenção dos raios infravermelhos pelo vapor de água, dióxido de carbono, metano, ozono e outros gases atmosféricos .

758.

Pour chaque critère un certain nombre de tests sont proposés. Ainsi, pour le critère syntaxique, le lexicologue peut faire usage du test d’expansion du déterminant ou du déterminé ; ou bien l’ellipse du déterminant ou du déterminant. Cest ici qu’on peut voir, notamment, la maniabilité syntagmatique de l’unité : une unité peut fonctionner dans son étendue mais également par ses variantes de tupe sigles, acronymes (demande biologique en oxygène et DBO). Pour le critère sémantique on utilise le test de l’imprévisibilité ou de l’opacité sémantique.

759.

Dans une perspective d’indexation des unités de type phraséologique Thoiron et Béjoint (1989) élargissent l’éventail de ces critères : la prévisibilité, la combinabilité, la commutabilité, le degré de spécialisation et de figement, la fonction, la fréquence et la discontinuité d’une entité phraséologique,.

760.

Au Centre de formation de traducteurs et terminologues de l’Université de Rennes2 dans la recherche et l’enseignement de la phraséologie et de la phraséographie d’exécution utile à la traduction, à la rédaction spécialisée et à la formation linguistique en Lsp.

761.

Dans un environnement spécialisé, écrit, des termes apparaissent solidaires de manière constante. Les unités qui apparaissent autour des termes comme leurs associés ce sont des collocations, la présence simultanée de plusieurs unités, dits préférentielles, dans un même énoncé sont des cooccurrences.

762.

délimite un caractère ou une relation exprimée et est représentée par une chaîne de caractères qui exprime ce caractère ou cette relation. Le phraséologisme est constitué d’une chaîne de caractères continue ou discontinue qui exprime un caractère ou une relation. Il est composé d’un noyau (pivot terminologique pour Gouadec) autour duquel permutent un ou plusieurs variables significatives. Il y inclut une large panoplie : des groupes de mots, des locutions (comme les locutions nominales spécialisées), des expressions, des propositions, des segments de phrases, des phrases, etc. Gouadec dénombre la phraséologie à pivot terminologique et la phraséologie à variable terminologique. En pollution/poluição, par exemple, le terme matriciel pollution autour duquel “pivotent” des variables. De même, plus symptomatiques encore les classes de polluants/poluentes et déchets/resíduos. Ces termes matriciels entretiennent avec les éléments qui viennent s’y souder des relations conceptuelles et linguistiques, formant des paradigmes classificatoires et contribuant à l’affirmation et consistance des différents champs sémantiques.

763.

Il donne comme exemple “remote digital loopback “ en faisant la remarque que si pour certains cette unité peut être un terme, désignation d’une action, pour d’autres elle peut être un phraséologisme attaché au terme “remote digital loopback test”. En effet, la question première est de distinguer le terme du non-terme ; vérifier l’emboîtement des termes dans les phraséologismes et les phraséologismes sectorielles dans les phraséologismes discursifs.

764.

À l’oeil nu, par exemple, les question d’équivalence interne. Agent polluant (N+A) peut se réduire à polluant (N), demanda bioquímica de oxigénio (N+A+P+N) en D.B.O. (forme réduite à fonction de N).

765.

qui en bloc font référence à une même entité. De plus, il est à remarquer que les autres unités syntagmatiques possèdent au départ les sèmes caractéristiques de chaque élément qui les composent. C’est progressivement qu’une convention de sens s’impose, bien évidemment par les spécialistes du domaine et par leurs intentions communicatives. Le cas de pollueur-payeur peut être considéré comme un cas de composition par juxtaposition

766.

TVD pour tapis végétaux décontaminants.

767.

La formule A+N est moins productive. On peut, néanmoins, signaler big bang, haute température (mais température moyenne).

768.

La forme syntagmatique peut être en concurrence avec la forme composée : écosystème (déterminant /déterminé) et système écologique (déterminé / déterminant). Il s’agit,de fait, d’une quête d’unicité sémantique. Le même phénomène est constaté dans les cas d’abrègement et d’ellipses. La forme bioacumulação est plus utilisée que acumulação biológica, mais on utilise indifféremment indicador biológico et bioindicador.

769.

Par exemple, pollution des eaux-->pollution des eaux continentales.

770.

Un syntagme nominal peut participer à d’autres constructions demandées par le terme noyau ou régissant. Il y a maintes exemples en pollution/poluição. Ces constructions peuvent aller de la simple juxtaposition à des relations de coordination et de subordination. C’est pourquoi on trouve, également, dans le droit fil de l’évolution de ces compléxités une bonne quantité abondance de séries de nominalisations et/ou au contraire, des réductions.

771.

Au niveau morphosyntaxique, noms et adjectifs sont des catégories proches qui peuvent très facilement produire des échanges.

772.

Ces formules sont consignées dans le CED (catalogue européen des déchets) publié au Journal Officiel des Communautés Européennes, sous le titre Décision de la Commission du 20 décembre 1993 établissant une liste de déchets en application de l’article 1er point a de la directive n° 75-442 relative aux déchets, terminologie communautaire des déchets.

773.

Pour les polluants et les déchets les règles morphosyntaxiques sont très réglementées. Les bases sont nominales et les collocations sont, principalement, des noms, des adjectifs et des verbes. Il y a un certain nombre de degrés d’équivalences conceptuelle entre les classes morphologiques et les champs sémantiques. En effet, en ce qui concerne les polluants il s’agit de la nature, la provenance, le contenu et le milieu contaminé ; pour ce qui est des déchets dont les critères de classement conceptuel sont le producteur, l’espace de production et/ou de rejet et les risques potentiels, et donc l’ordonnacement majeure en catégorie et origine (avec composition, comportement, évolution, susceptibilité au traitement et la composition chimique), les champs sémantiques sont l’origine/provenance (hospitaliers, industriels), la nature (inertes, banals, spéciaux), la destination (destinés à l’incinération), le contenu et les caractéristiques (propriétés physiques et chimiques, composition chimique, aspects économiques).