Deuxième partie
Mise en place du dispositif filmique : la captation

Comme seconde approche que nous aurons du déplacement, considérons à présent le dispositif filmique mis en place par le cinéaste.

Ce dispositif particulier est le moyen de provoquer non seulement l’activité physique des acteurs au coeur de la scène mais également la naissance de l’événement qui déterminera alors le degré de la puissance ou de la présence narratives du film - dès lors que l’on considère que la présence d’un événement au sein du récit, est une donnée essentielle au fondement de la narrativité -.

Ainsi et dans un premier temps, il s’agira pour nous de comprendre en quoi l’événement chez Pialat, peut participer à la conception de la narration ou du « narratif » au sein de son oeuvre.

Comme ce fut le cas dans le néoréalisme italien, les histoires racontées par Pialat sont teintées d’une réalité sociale qui donne un statut et un rôle particuliers à l’événement ; ainsi, nous nous proposons d’étudier à présent ce rôle mais aussi son statut, qui pourraient finalement déterminer les déplacements et les contaminations entre une démarche documentaire et une écriture plus ancrée vers la fiction.

Mais l’événement et sa fonction au coeur du récit, sont-ils réellement les seuls garants ou créateurs du « narratif filmique » et sont-ils les éléments qui permettent d’aborder la question du documentaire chez Pialat ? Qu’est-ce qui nous permet au fond d’envisager les glissements ou déplacements vers le documentaire autant dans une démarche qu’au sein de la représentation filmiques décidées par le cinéaste ?

Ces questions qui s’imposent à nous, démontrent à quel point le sens et la création de la narrativité chez Pialat ne semblent pouvoir exister que sous l’influence d’un regard documentaire dont nous nous proposons de définir l’identité dans le second chapitre de cette seconde partie.

Enfin, dans les derniers chapitres, nous tâcherons d’analyser le dispositif technique créé par le réalisateur de manière à pouvoir approfondir la nature et l’action des personnages et de leur corps au coeur de la scène.

La profondeur de champ et le plan-séquence sont notamment des moyens précis utilisés pour solliciter la liberté et capter la vie physique des personnages dont les déplacements seront ainsi convoqués comme les éléments fondateurs d’une esthétique propre à l’auteur.

Etudier le dispositif filmique revient ainsi à étudier la démarche, le travail d’un cinéaste dont la seule volonté et l’unique désir, sont de proposer un espace ouvert et dynamique d’où pourront jaillir, à tout moment, l’événement, la crise, le contact physique, la vérité d’un mouvement ou l’énergie d’un déplacement...enfin, tout élément ou langage physiques, fondateurs et producteurs d’une narrativité sans cesse en attente d’une situation ou d’une action qui permettront la progression du récit.