Chapitre 4 - Etudes neurophysiologiques de l'intégration multisensorielle chez l’homme

Malgré le caractère multimodal de la plupart de nos perceptions quotidiennes et les nombreuses études comportementales qui leur ont été consacrées (voir chapitre 1), ce n'est que très récemment que les recherches ont porté sur les bases neurophysiologiques de l'intégration multisensorielle chez l'homme. Ce développement tardif peut s'expliquer en partie par la difficulté à appréhender ces questions en raison de la complexité spatio-temporelle des interactions bimodales, et par la disponibilité seulement récent des techniques d'imagerie cérébrale.

Les données rapportées ici concernent des mesures électromagnétiques (potentiels évoqués (pe/eeg) et magnéto-encéphalographie (meg)) et hémodynamiques et métaboliques (tomographie par émissions de positons (tep) et imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (irmf)). Les premières offrent une très bonne résolution temporelle des phénomènes observés (de l'ordre de la milliseconde) alors que les secondes ont une meilleure résolution spatiale. Ces deux types de mesures sont donc complémentaires ; cette complémentarité est cependant encore très peu investie ce qui ne permet pas de comparaisons directes des résultats obtenus par ces différentes approches. Outre cette diversité méthodologique, il est difficile de synthétiser les données disponibles en raison de la variabilité due aux modalités sensorielles examinées (visuelle et/ou auditive et/ou somesthésique), aux protocoles mis en oeuvre (observation passive, détection, discrimination et identification, localisation, apprentissage …), et aux types de stimulations utilisées (stimuli congruents ou non-congruents, parole, objets).

Une différence majeure également à prendre en compte concerne le type d'analyses effectuées. Nous distinguerons en effet les études utilisant une analyse par intersection et les études utilisant une analyse par interaction. Les premières pourront mettre en évidence des aires cérébrales de convergence intersensorielle, c'est-à-dire pouvant être activées par des informations de plusieurs modalités (par exemple, l'image d'un chien et un aboiement). En revanche, les secondes examinent les interactions multisensorielles proprement dites, c'est-à-dire les activités liées spécifiquement au caractère bimodal du stimulus. Par ailleurs, les études portant sur l'intégration dans le domaine de la parole bimodale seront traitées séparément étant donné le caractère particulier du langage chez l'homme.