B.1.2.1 Composantes professionnelles et «contre-transfert»

En rapport avec ces parts de la psyché que nous définissons comme celles qui échappent au «Je» et dont nous postulons que la position professionnelle permet (partiellement) de les révéler et/ou de jouer de leur méconnaissance, de les agirs et/ou de les symboliser, nombreux sont les travaux de recherche qui énoncent des perspectives analogues.

À la question des identifications professionnelles, nous pouvons en effet articuler en premier lieu la notion de «contre-transfert ». Un nombre considérable de travaux réalisés à partir de la situation princeps de la cure analytique, interrogent la position et la formation de l’analyste, et tentent d’appréhender ce mouvement qui s’est vu désigné comme «contre-transfert». Freud emploiera ce terme dès 1910, désignant alors un registre réactionnel, au sein de la relation thérapeutique. Ce n’est que très lentement au cours du développement de la clinique analytique qu’au-delà des seules réactions du thérapeute au patient, ce terme dans sa désignation englobera aussi la part que le thérapeute joue dans l’analysant, pour maintenir sa propre méconnaissance, et/ou en révéler des «bouts».

Nombre d’auteurs se rejoignent autour de l’idée d’un reste appartenant à l’analyste, ces parts insues qui se déposent dans le cadre et dans le lien - le lien (la modalité relationnelle spécifique) peut alors être assimilé au cadre, à ces parties de l’inter-subjectivité et de la trans-subjectivité constitutives du «Je». Le «reste», l’analyste le met en jeu via sa position dans sa relation aux analysants. Il n’est pas de réflexions sur le devenir analyste, et/ou sur les processus de formation des analystes qui ne fassent référence à cet aspect, et qui n’interrogent ce qui anime cette position (P. Aulagnier 1973, M. Neyraut 1974 H. Searles 1979, J.P. Valabrega 1979, M. Safouan 1988, pour ne citer que quelques-unes des interrogations qui ont balisé ce champ82). En ce sens le «devenir analyste» n’échappe pas aux questions inhérentes à tout processus de formation : à ces interrogations sur la demande identificatoire (P. Aulagnier) que le sujet réalise au travers de toute visée de formation professionnalisante, (D. Anzieu le souligne dès 197583), ainsi qu’aux effets institutionnels trans-subjectifs, aux héritages et aux transmissions qui s’y réalisent.

Notre propos n’étant pas de nous centrer sur le devenir analyste, ni sur la position de l’analyste, nous nous contenterons de nous référer à deux articles de J.B. Pontalis pour situer cette question. Suite à cela nous irons consulter quoique succinctement, quelques travaux évoquant la «personnalité professionnelle» (A. Missenard, P. Dosda), l« identité professionnelle» (L. Ridel, J.C. Rouchy), le «spectre d’identité» (M. de M’Uzan), et plus largement les «devenir des identifications» (J. Guillaumin).

Notes
82.

Piera Aulagnier (1973), Temps de parole et temps de l’écoute : remarques cliniques - in Topique n°11-12, p. 41-69, repris dans Un interprète en quête de sens - Paris, Ramsay, p. 117-142. / Michel Neyraut (1974), Le transfertnotion transfert notion transfert notion transfert notion transfert notion transfert notion transfert notion transfert notion transfert - Paris, Puf, 281p. / Harold Searles (1979), Le contre transfert - (1981 pour la trad. fr.) Nrf, Paris, 264p. / Jean Paul Valabrega (1979, 1994), La formation du psychanalyste - Paris, Payot, 366p. / Moustapha Safouan (1988), Le transfert et le désir de l’analyste - Paris, Seuil, 252p.

83.

Didier Anzieu. (1975/1984), La fantasmatique de la formation psychanalytique - in : Kaës R., Anzieu D. & Thomas L.V., Fantasmes et Formation - Paris, Dunod, (1984 pour la 2° édition), p. 93-123.