B.3.1 Les identifications et les transmissions au sein des «professions de la relation125 »

‘«Être stoïque, c’est se figer, avec les beaux yeux de Narcisse. Nous avons recensé toute la douleur qu’éventuellement le bourreau pouvait prélever sur chaque pouce de notre corps; puis le corps serré, nous sommes allés et avons fait face». (René Char126).’

Il n’est de traversée, de transformation identitaire, qui ne requière sa «livre de chair». Lors du cheminement pour prendre place dans certaines professions, ce vont être des parties de la psyché, des pans entiers de la pensée, qui vont être sacrifiés au processus d’affiliation, à la construction des identifications professionnelles.

Dans les secteurs du soin, (somatique et psychique) et du travail social, les formations professionnalisantes ont pour projet d’amener les futurs professionnels à être en mesure de réaliser la «tâche primaire » (soigner, accompagner, éduquer, ...). Le «postulant» doit au terme du cursus de formation, se retrouver en capacité d’agir son pouvoir d’acteur social, sans être psychiquement détruit par la rencontre avec «les objets» autour desquels est bâtie la profession, et sans représenter lui-même un danger, ni pour les groupes susceptibles de l’accueillir, ni envers la population auprès de laquelle est exercée l’activité. Considérée depuis ce versant, on peut assimiler la mise en place d’une position professionnelle à une construction visant à rendre psychiquement possibles les rencontres induites par une pratique.

Notes
125.

Ce chapitre reprend et prolonge un article paru en 2001 : Georges Gaillard, Identifications professionnelles, assignations institutionnelles et paralysies de la pensée - in Revue de Psychothérapie psychanalytique de groupe n° 35, 2001, Éditions Érès, p. 185-200.

126.

René Char, in : «Feuillets d’Hypnos» (1943-1944).