B.3.2.1 Le «forçage identificatoire»

À considérer ce registre, il apparaît que la modalité essentielle de mise en lien entre un «postulant» à une de ces «professions de la relation», et les différents groupes de formateurs, d’enseignants et des professionnels, va se jouer sur le mode du forçage identificatoire 128, au travers de mises en scènes paradoxales qui relèvent (la plupart du temps) de rencontres traumatiques et qui précipitent des positions de sidération. Ces rencontres ont pour visées implicites de noyer les capacités réflexives et élaboratives du sujet. Le groupe va contraindre le «postulant» à abdiquer toute prétention à affronter seul la tâche primaire, et à revendiquer son aide, dans une obligation à identification, en deçà d’une élaboration consciente.

La professionnalité ne s’acquiert donc que par un incessant forçage, à l’instar de ce qu’il en est de l’émergence d’un sujet au sein de son groupe familial d’origine, au travers de l’établissement de l’institution généalogique (Pierre Legendre), et de «la violence de l’interprétation» (Piera Aulagnier, 1975).

‘«Les systèmes institutionnels sont des mécanismes de forçage du sujet humain. Le forçage fondamental, modèle de tous les forçages, c’est l’institution généalogique.» (P. Legendre 1985129).’ ‘«L’instauration de l’institutionnalisation relève d’un coup de force, (...) il s’agit d’une liaison en acte et par l’acte, d’une liaison violente et d’une liaison par la violence, sur fond de détresse individuelle.» (R. Roussillon 1999130).’

Au sein des processus d’affiliation la violence participe donc centralement du processus d’institutionnalisation des sujets.

Notes
128.

L’expression est de Pierre Legendre (1985).

129.

Pierre Legendre (1985), L’inestimable objet de la transmissionnotion transmission notion transmission notion transmission notion transmission notion transmission notion transmission notion transmission notion transmission - Paris, Fayard, p 94.

130.

René Roussillon (1999 b), La capacité d’être seul en face du groupe - in Revue Française de Psychanalyse; 3 Tome LXIII, Groupes, p. 787. Le passage en italique est souligné par nous.