Dans ses recherches d’«anthropologie politique 413 », P. Clastres indique le mouvement de légitimation de ce qu’il nomme «la chefferie» par le groupe, comme la manière dont celui-ci contrôle celui à qui il octroie de le représenter, son «chef». Si en effet c’est le groupe qui le légitime, ce même groupe peut tout autant le délégitimer, le disqualifier, - c’est du reste ce que nous voyons mis en acte, dans la violence des crises de successions au sein des institutions, soit précisément avec des directeurs qui ne sont pas en position de fondateurs. Le groupe des professionnels peut alors développer le fantasme que celui-là «le leur doit».
‘«C’est le corps social lui-même qui détient (le pouvoir) et l’exerce comme unité indivisée. Ce pouvoir non séparé de la société s’exerce en un seul sens, il anime un seul projet : maintenir dans l’indivision l’être de la Société, empêcher que l’inégalité entre les hommes installe la division dans la société. Il s’ensuit que ce pouvoir s’exerce sur tout ce qui est susceptible d’aliéner la société, d’y introduire l’inégalité : il s’exerce entre autre sur l’institution d’où pourrait surgir la captation du pouvoir, la chefferie.» (P. Clastres, 1974414).’Dans le lien groupe professionnel-responsable, se trouve donc dans une double potentialité, celle qui joue du contrôle, et celle qui joue du consentement, (consentement à ce que celui en place d’être le garant de la différence et le représentant du groupe, soit à même d’incarner «quelque chose» « du père » et de la loi, et de protéger chacun de la dédifférenciation).
Ainsi, lorsque le mouvement de : «consentir à ce que ça échappe» parvient à se mettre en place dans les institutions, il ne saurait être que fragile et menacé. Tout groupe est en potentialité d’exercer un contrôle sur la «chefferie», et de veiller aux aliénations toujours possibles. Les dérives perverses et paranoïaques415 sont ainsi en permanence susceptibles d’être déployées et de conduire au parricide ou au filicide. La dérive paranoïaque signe une obturation de l’origine - il ne saurait y avoir de place pour un fils - là où la dérive perverse joue le leurre de s’octroyer un savoir sur cette origine, ce qui supprime toute référence à un père et à ce qui à cet endroit «échappe» - Il ne saurait donc y avoir de place pour un père.
Le travail de Pierre Clastres peut se définir selon le titre de son ouvrage de 1980, comme «Recherches d’anthropologie politiquenotion politique notion politique notion politique notion politique notion politique notion politique notion politique notion politique «, Paris, Seuil, 248p.
Pierre Clastres (1974), La société contre l’état - Paris Minuit, p. 172.
Eugène Enriquez fait la dérive paranoïaque l’une des deux dérives qui menacent sans cesse les institutions, situant l’autre comme étant la dérive perverse. Il les spécifie alors comme «les deux formes du pouvoir mortel» (1991), Les Figures du maître - Paris, Arcantère, p. 95-109.
Otto Kernberg titre pour sa part son article de 1996 : «L’évolutionnotion évolution notion évolution notion évolution notion évolution notion évolution notion évolution notion évolution notion évolution paranoïaque dans les institutions». Il y souligne comme causes de ces dérives qui menacent en permanence les systèmes institutionnels : - les ruptures qui affectent le système des tâches de l’organisation (surcharges, et autres mauvaises organisations), relatives à la tâche primairenotion tâcheprimaire notion tâcheprimaire notion tâcheprimaire notion tâcheprimaire notion tâcheprimaire notion tâcheprimaire notion tâcheprimaire notion tâcheprimaire , - la régressionnotion régression notion régression notion régression notion régression notion régression 171notion régression notionrégressionnotionrégression dans des conditions de «dysfonctionnement», liée à l’être en groupe, - et la «prédisposition latente à la régression paranoïde» des individus (dans une perspective kleinnienne). Il prend soin de rajouter dans sa synthèse de ces causes des dérives paranoïaques : une «direction défaillante» comme cause majeure des «ruptures du système de tâches de l’organisation». (O. Kernberg - in R. Kaës, et alii, Souffrance et psychopathologie des liens institutionnels, Paris, Dunod, p. 86).
Si les propos d’O. Kernberg soulignent cette menace permanente des dérives paranoïaques et s’ils font échos à l’importance que nous accordons à ce qui se joue au niveau des directions d’institutions, ils ne prennent pas en compte ce qui de la violence institutionnelle prend place dans le lien générationnelnotion générationnel notion générationnel notion générationnel notion générationnel notion générationnel notion générationnel notion générationnel notion générationnel . On va voir qu’il s’agit là d’un des lieux (l’investissement des dirigeants) et des moments (le passage générationnel) où la paranoïa est la plus manifeste dans ses agirs meurtriers de l’altériténotion altérité notion altérité notion altérité notion altérité notion altérité notion altérité notion altérité notion altérité .