C.6.1 Un directeur-fondateur casse son «objet», en son départ

C.6.1.1

‘«Un exemple frappant (de l’envie destructrice) est celui où le fondateur d’un groupe, ou l’équipe fondatrice, préfère parachever la mise à mort du groupe et de ses activités ou de ses accomplissements plutôt que de se retirer et de passer la main. Le groupe est bon à «mettre à la casse». L’action des fantasmes de casse est là déterminante. La tentation du créateur est de se faire le meurtrier de sa création ; c’est là un des destins des fantasmes de casse.» (D. Anzieu 1999490).’

L’institution pour adultes handicapés «La Rivière» a vu le jour à l’initiative de quelques personnes militantes et de personnes touchées dans leurs propres familles par la question du handicap, dix-huit ans auparavant - ces modalités de création étaient fréquentes dans le secteur du handicap, notamment à une époque où les parents se heurtaient à un manque de structures. On peut entendre dans ces créations d’institutions par les parents, la tentative de réparation d’une parentalité blessée, la difficulté de confier à d’autres, le soin de s’occuper de leur enfant, hors d’un contrôle direct. Il s’agit de l’une des manières de pactiser avec les fantasmes d’exclusions et de meurtre qui se trouvaient réactualisés à l’occasion du placement de ces enfants - certains de ces parents se retrouvaient ainsi à des postes de responsabilité administratives (référant à des places parentales), notamment à la présidence des associations gestionnaires des institutions (où se trouvait leur enfant), et donc en position de contrôle direct et de pouvoir à l’égard de l’institution et du personnel (à défaut de trouver une confirmation narcissique dans la génération de leur enfant). Ces configurations ont pu donner lieu à des positions d’ingérences et à des rivalités massives491.

L’institution «La Rivière» s’est progressivement développée en répondant aux besoins des résidents au fur et à mesure de leurs apparitions et notamment de leur vieillissement. Elle a ainsi joui d’une large autonomie sous l’égide d’un directeur-membre fondateur, sans subir de crise majeure dans son développement.

Peu de temps avant le moment où nous allons croiser la route, cette institution a vécu une période de forte turbulence, qui s’est rapidement muée en crise (entraînant grève du personnel, lettres aux tutelles administratives, ...). C’est ce conflit qui a fait appel à une intervention extérieure, à partir de la pression du groupe des professionnels sur la direction.

Notes
490.

Didier Anzieu & Eugène Enriquez (1999), La rencontre du groupe - in Revue Française de Psychanalyse ; 3, Groupes, Tome LXIII, p.748.

491.

Ainsi de cet autre foyer de handicapés dont le fondateurnotion fondateur notion fondateur notion fondateur notion fondateur notion fondateur notion fondateur notion fondateur notion fondateur est lui-même père d’une fille lourdement handicapée. Ce président-fondateur-père de la «première résidente» procèdera au recrutement d’un premier directeur lui-même père d’une fille présentant un léger handicap physique qui se définissait toutefois en ces termes : «Je suis un père boiteux». On a donc affaire à une institution où un père blessé embauche un père boiteux pour s’occuper de sa fille. Le fondateur-président va passer de très nombreuses années à nier la part de handicap mental de sa fille, et pour ce faire, va devoir disqualifier abondamment le travail des professionnels, afin de justifier de l’absence de progrès de sa fille. Le directeur se fera alors lui-même évincer par sa chef de service, et licencier 5 années à peine après la fondationnotion fondation notion fondation notion fondation notion fondation notion fondation notion fondation notion fondation notion fondation , avec l’aval du président-fondateur-père. L’institution dans les dérives conflictuelles auxquelles cette exclusion a donné lieu, se retrouvait dès lors aussi souffrante que le fondateur-président-père, qui avait ainsi mis en oeuvre son envie disqualifiante et meurtrière à l’endroit de cette institution qui ne lui permettait pas de maintenir l’espoir d’une possible «évolutionnotion évolution notion évolution notion évolution notion évolution notion évolution notion évolution notion évolution notion évolution « de sa fille.