C.7.5 Du fondateur filicide au tyran, un même fantasme

‘«La figure révolutionnaire, dès l’instant où elle triomphe et s’établit pour gouverner, se transforme en une caricature. C’est qu’il y a passage de la communion libératrice à la domination instituée, de l’acte sacrificiel qui efface un pouvoir à l’acte fondateur qui en établit un autre» (G. Balandier 1992541).’

Au travers de cette «variation» sur la figure du «révolutionnaire» nous retrouvons ces confusions mortifères entre la personne en place de directeur et «son objet». Cette confusion précipite les sujets dans le fantasme qu’ils sont ceux qui donnent vie, qu’ils sont l’âme de l’institution, rejoignant en cela le fantasme qui caractérise les fondateurs au moment où ceux-ci agissent l’emprise mortifère qui les conduit à devenir des filicides. Une telle inflation narcissique et imaginaire ne permet plus de faire barrage au fantasme qu’ils possèdent (ou qu’ils sont en droit de posséder) l’institution.

Cette proximité entre les deux positions est liée à la surchauffe incestuelle-incestueuse qui se donne à entendre dans chacune, sous le primat d’un «rangement généalogique» manquant ou défaillant. Le fondateur peut jouer une telle position : prétendre à un statut d’exception, et en sa place de créateur détruire son propre lien à ses ascendants dans la génération, se mettant alors dans la posture (imaginaire) de s’originer de façon nouvelle. Avec ce formateur-Pygmalion, on retrouve ce même vertige, issu du dérangement des légitimités et des processus d’affiliations groupaux.

Dès lors que l’interdit de l’inceste ne trouve pas à se figurer de façon suffisante, les agirs meurtriers s’ensuivent. Dans les institutions, ils revêtent la forme du filicide et celle du tyran.

Notes
541.

Georges Balandier (1992), Le pouvoir sur scène - Paris, Balland, p. 20.