2.2.2.2.2 Les techniques observables sur les cloches anciennes

Les éléments lisibles sur les cloches anciennes sont plus ténus que ceux que l’on peut tirer de la fouille des structures campanaires. En effet, nous pouvons distinguer les éléments suivants :

  1. les filets. Si des filets peuvent exister sur les cloches réalisées selon la technique « Théophile », ils sont moins réguliers que ceux réalisés à l’aide d’un gabarit selon la technique « Biringuccio » ou « Kricka ». De plus, selon ces deux dernières méthodes, les filets seront présents en plus grand nombre, permettant de guider une inscription et une iconographie qui se développe. Ainsi, il est probable que la cloche du Puy-en-Velay qui porte de nombreux filets a été réalisée à l’aide d’un gabarit selon la technique décrite par V. Kricka ;
  2. intérieurement, on peut souvent distinguer les traces du lissage de la paroi du noyau. Un tel lissage (fig. 22) est réalisé de deux manières, suivant que la cloche est fabriquée selon le procédé « Théophile » ou « Kricka ». Dans le premier cas, le lissage étant effectué à la main ou au chiffon, on peut distinguer des traces de doigts, des traînées formant des arrondis d’une vingtaine de centimètres de long alors que dans le second cas, on lira des traces circulaires décrivant un cercle horizontal. Ces traces ne doivent cependant pas être confondues avec les traces d’un éventuel accordage postérieur (voir chapitre 1.1.3.2) ;
  3. la décoration est un élément peu fiable. En effet, s’il semble que la gravure soit le procédé le plus ancien, le moine Théophile n’est pas très clair à ce sujet et la technique reste fort rare sur les cloches les plus anciennes observées. De plus, des exemples très récents (Ambronay, 01, cloche 3 du XIXe siècle) nous montrent que la gravure (en l’occurrence postérieure à la coulée) a été utilisée à des périodes tardives (voir également la cloche dédiée à Marie de l’église St Sernin de Toulouse fondue en 1992) ;
  4. les anses. Deux types d’anses sont connues : les anses simples disposées en ligne ; les anses plus complexes disposées en couronnes. Les auteurs ne sont pas explicites sur les types d’anses qu’ils utilisent. La première catégorie est connue comme étant la plus ancienne sans que l’on puisse dire exactement quand elle cesse d’être utilisée. Il semble qu’à la fin de son usage, elle soit utilisée conjointement aux anses en couronnes, ces dernières étant réservées aux pièces de grande taille. Cet élément permet donc plutôt de caler une cloche chronologiquement que de l’attribuer à l’une ou l’autre méthode de fabrication. Dans notre inventaire, les anses simples sont peu nombreuses.

Si l’on observe les données collectées sur les cloches encore existantes (tableau 10), on voit que l’évolution n’est pas aussi nette que l’on a pu l’indiquer : des filets sont présents sur toutes les cloches 270 et il n’est pas possible de véritablement distinguer plusieurs techniques. Le deuxième critère semble le plus pertinent mais un polissage ou un accordage récent (cf. 1.1.3.2) a pu effacer ces traces. Le polissage intervient en particulier lors du rechargement pour permettre une meilleure adhésion de l’apport métallique sur le métal d’origine.

Le type de four utilisé ne peut en aucun cas être identifié par une observation macroscopique de la cloche. Une analyse élémentaire d’un grand nombre de points de la cloche permettrait de savoir si le métal est homogène et donc si la montée en température a été bonne, permettant un mélange satisfaisant des deux composants de l’alliage. Si elle ne peut pas permettre d’identifier le type de four utilisé, cette étude peut néanmoins nous indiquer si le rendement thermique du four a été suffisant.

Notes
270.

A l’exception notable de la cloche 2 de Géhée (36). La cloche du Puy en Velay (43), sans doute fort ancienne elle aussi, présente des filets assez nombreux qui ont, entre autres, permis de guider la mise en place du décor de rinceaux.