Deux situations très différentes existent en Europe : d’une part, des fondeurs itinérants dans l’Europe continentale ; d’autre part, des fondeurs qui se fixent dans les grandes villes en Angleterre comme à York (RICHARDS, 1993).
Durant la période gothique (entre 1230 et 1260), le fondeur Jean d’Amiens est connu pour avoir produit des cloches à Rouen (voir le corpus). Ce cas n’est pas isolé. L’itinérance se poursuit donc au cours de cette période et assure la transition entre la tradition des moines itinérants et celles des familles de laïcs qui produiront des cloches dans des régions éloignées de leur village d’origine. Le fondeur Jean Jouvente (XIVe siècle) est également connu par ses œuvres tout autour de la région parisienne (voir le corpus), montrant des déplacements assez importants (voir carte 13).
Au cours du XVe siècle, l’itinérance dépasse désormais le cadre national puisque nous rencontrons des fondeurs étrangers qui exercent en France. Le principal pays dont proviennent les fondeurs étrangers est les Pays-Bas d’où viennent les familles 656 Waghevens et Van der Ghein 657 . Ce deuxième nom est connu pour notre période d’étude dans un seul cas pour la réalisation de la cloche de St Pierremont (02) connue par les archives de J. Berthelé. Ces deux familles originaires des Pays-Bas seront particulièrement importantes dans l’histoire campanologique du début de l’époque moderne au XVIe siècle. Leur implantation en France s’explique par les conditions politiques de l’époque et en particulier la domination des Pays-Bas sur un certain nombre de territoire du monde français de l’époque actuelle. Ainsi, la présence de Simon Waghevens à Arcy-sur-Cure (89) en Bourgogne en 1483 s’explique par la domination des Pays-Bas sur la Bourgogne durant cette période. Ces ascendants (Georges I et Henri) ainsi que ses descendants (Pierre) ont également travaillé sur l’actuel territoire français pour les mêmes raisons. L’itinérance des fondeurs de cloches n’est donc pas seulement tributaire de la volonté propre des fondeurs mais également des conditions politiques. Si Waghevens s’est rendu à Arcy-sur-Cure, il l’a sans doute fait à l’invitation des Ducs de Bourgogne et donc à l’incitation des empereurs des Pays-Bas.
Cette itinérance n’est pas sans rappeler celle de moines artistes comme le moine Jean de la Trinité de Vendôme qui se rend au Mans pour reconstruire une cathédrale (MORTET, 1911, document LXXIV, §1) ou le moine Guinamand de la Chaise-Dieu qui se rend à St Front de Périgueux pour sculpter le tombeau d’un saint (MORTET, 1911, document CIII). La situation des fondeurs de cloches n’est donc pas une situation isolée dans le domaine de la création artistique médiévale. Elle relève plutôt de la norme de cette pratique artistique.
Elles commencent à officier à l’extrême fin du XVe siècle.
Cette famille est particulièrement importante puisqu’il s’agit sans doute de la famille qui donnera naissance en 1721 à Mathieu Van den Gheyn, premier compositeur à avoir écrit spécifiquement pour le carillon.