Pour la période gothique, nous remarquons le très fort développement du nombre de fondeurs connus par des sources assez diversifiées. En effet, nous trouvons des noms de fondeurs sur les cloches encore existantes mais aussi et surtout dans les archives. Ces archives qui témoignent de l’histoire des campaniers 660 sont en fait de deux natures. D’une part, nous avons un certain nombre de documents commerciaux 661 qui consistent généralement en des contrats de réalisation de cloches. Ils n’ont pas été dépouillés dans l’ensemble de la France. Cependant, compte tenu de la richesse rencontrée dans les départements étudiés, il existe un fort potentiel. Ce travail serait néanmoins fort long car ces documents sont très dispersés dans les divers dépôts d’archives (voir 1.3.3.1). Les départements les plus étudiés sont l’Hérault et les Pyrénées-Orientales.
La seconde catégorie de documents d’archives qui nous fournissent des renseignements sur les fondeurs sont les actes d’état-civil bien que ce terme soit impropre pour cette période. Ce sont les registres religieux de baptêmes, mariages et sépultures qui nous fournissent des renseignements sur les fondeurs et nous montrent dans quelques cas 662 des mariages entre familles de fondeurs. Ils ont été largement étudiés pour les départements cités auparavant mais aussi pour le Bassigny. Cette région a fourni un très grand nombre de fondeurs à l’ensemble de la France. Dans le cadre de notre vaste travail envisagé avant tout sous l’axe archéologique, nous ne disposions pas du temps nécessaire pour entreprendre un dépouillement systématique des archives afin de localiser tous les fondeurs ayant exercé sur le territoire. Un tel travail doit être envisagé dans le futur mais ne peut pas être le travail d’une seule personne. Il faudra que sous une approche historique, plusieurs chercheurs se partagent le territoire français pour arriver à dépouiller le plus grand nombre d’archives possible pour déceler un maximum de fondeurs et ainsi parvenir à une bonne image de cette profession durant le Moyen Age.
Dans cette perspective, il ne faut pas négliger les noms de fondeurs que nous pouvons découvrir au détour des œuvres qu’ils n’ont pas laissé. Ainsi, un fondeur particulièrement important de la région parisienne de la seconde moitié du XIVe siècle 663 est connu principalement par les cloches qu’il a réalisées aussi bien à Sens qu’à Vincennes, Montargis, Paris, Camelin, ou Montceaux les Meaux 664 . Il s’agit de Jean Jouvente dont nous ne possédons que peu d’informations issues des archives.
Nous disposons au total d’environ deux cent soixante noms de fondeurs. Ce fichier est en grande partie celui issu du regroupement des informations opéré par la S.F.C. et qui a permis d’éditer le Répertoire des fondeurs de cloches ayant exercé sur le territoire français depuis le Moyen-Age jusqu’à nos jours, S.F.C., 1996. Nous y avons rajouté les quelques noms de fondeurs que nous avons pu observer sur des pièces encore existantes et qui n’étaient pas connus par ailleurs. Nous avons également pu apporter quelques précisions à la date d’exercice de certains fondeurs. Il n’est pas question ici de détailler chacun des fondeurs que nous pouvons connaître. Il convient de noter que pour certains, nous disposons de fort peu d’informations. Les données les concernant se limitent simplement à une date de mariage ou un seul contrat de fabrication. Nous ne pouvons donc pas réaliser leur biographie. Notre présentation des fondeurs se bornera donc à signaler leur statut social et leur mode de vie tel que nous pouvons le comprendre au travers des documents qui nous sont parvenus. De plus, nous ne disposons presque jamais des documents eux-mêmes mais simplement de leur exégèse sous forme d’une fiche synthétique.
La répartition des fondeurs entre les différents siècles de la fin de notre période d’étude montre bien sûr un très fort développement du nombre de noms connus pour la fin de la période, c’est-à-dire le XVe siècle. Pour le XIIIe siècle, seuls dix fondeurs sont connus dont trois par le biais de la signature de leurs cloches (voir le corpus).
Les fondeurs du XVe siècle sont de loin les plus nombreux de notre période d’étude : cent soixante dix-neuf fondeurs sont connus pour ce seul siècle et montre, outre un développement des ressources archivistiques, un essor de la production campanaire. Cet essor peut avoir une double origine. D’une part, l’apparition des horlogeries municipales qui nécessitent des instruments de signalisation sonore ; d’autre part, il faut également prendre en compte l’amélioration constante des qualités sonores des cloches que nous avons pu mettre en évidence ainsi que les progrès parallèles de la musique instrumentale. Ces éléments peuvent inciter à créer les premiers carillons (voir 3.1.5). La population campanaire des clochers ainsi que le nombre de clochers tendent donc à se développer. Trente et un de ces fondeurs sont connus grâce aux signatures des cloches et certains le sont, tant par ce biais que par les archives. Cela montre encore l’importance des sceaux de fondeurs pour connaître l’histoire des fondeurs de cloches. Cependant, ces signatures sont assez peu informatives puisqu’elles ne mentionnent que le nom du ou des fondeurs sans jamais signaler leur origine.
Les fondeurs jouissent sans doute d’un statut social assez élevé comme nous l’avait déjà indiqué l’utilisation du terme fusor dans le texte de l’abbaye de Herrenchiemsee (voir 2.2.3.1). Dans le dictionnarius de Jean de Garlande datant du XIIIe siècle 665 , nous trouvons en effet la description suivante du fondeur de cloches :
‘I. Artifices illi subtiles sunt qui fundunt campanas de ere sonoro, per quas in ecclesiis horae diei denuntiantur motu batillorum et cordarum attractarum. (Jean de Garlande, Dictionnarius , cité dans Mortet et Deschamps, 1923, p. 272) ’ ‘Des artisans subtils sont ceux qui fondent des cloches d’airain sonore, par lesquelles dans les églises les heures du jour 666 sont annoncées par le mouvement des battants et la traction des cordes.’L’auteur rend donc ici hommage au talent des fondeurs ce qui indique qu’ils sont d’un statut particulier sans doute par la destination des pièces qu’ils réalisent et par leur qualité sonore.
Nom ancien des fondeurs de cloches ; un autre nom ancien est celui de saintier.
Nous en avons donné un exemple en 2.2.2.2.3.
Surtout à l’époque moderne.
Il a exercé entre 1359 et 1380.
Certaines de ces cloches ont désormais disparu mais nous en avons une trace dans les précieuses archives Berthelé, déjà citées mais incomplètement dépouillées.
Aux environs de 1240.
C’est-à-dire les heures canoniques.