A. AUX FRERES

En dehors des prises de parole officielles, que ce soit par exemple lors d’un chapitre général397, ou que ce soit par écrit398, les occasions familières au sein de l’Ordre sont nombreuses.

La Cronica posterior affirme de Jourdain de Saxe qu’ "il avait coutume, lorsqu’il était à Paris, de faire presque tous les jours une collation aux novices lorsqu’il n’y avait pas de sermon399." C’est sans doute à ces collations qu’il faut rattacher certaines paroles rapportées par les Vitæ Fratrum, et qui semblent témoigner de ces instructions aux frères. Le texte l’indique : Semel monens fratres. La fraîcheur de l’histoire suivante rappelle l’impétuosité de jeunes novices :

‘Un jour, en avertissant les frères de se préserver de toute légèreté, il s’exprima de la sorte : "Il m’arrive, comme aux vrais prélats, ce qui arrive à tout berger, qui a plus de mal à garder un bouc que cent brebis. C’est ainsi qu’un religieux indocile pèse plus à un supérieur et trouble plus le couvent que deux cent autres frères qui suivent leur berger, comme des brebis du Seigneur, comprennent son sifflet et ne séparent pas de ses compagnes. Elles vont toujours unies, s’arrêtent, se couchent, mangent, boivent, broutent ensemble en baissant la tête, donnent du profit en toutes choses et presque jamais de l’ennui. Mais d’autres, semblables à des boucs, troublent pasteur et troupeau, vont, viennent, font du bruit, donnent des coups de tête à leurs compagnons, escaladent les hauteurs, quittent la route, dévastent les champs des autres et n’obéissent ni à la houlette ni à la voix du berger ; enfin ils ont une queue courte, c’est à dire peu de patience ; aussi montrent-ils parfois leurs honteuses faiblesses. Pour Dieu, mes bien-aimés, fuyez ces mœurs de bouc et soyez comme des brebis du Seigneur400."’

L’exemplum suivant, qui semble lui aussi renvoyer à une collation aux novices, est une invitation aux verba ædificatoria :

‘Une autre fois, il disait aux frères, en leur recommandant de fuir l’oisiveté : "Vous savez, mes très chers, que, si haut qu’on entonne un psaume, la voix des chantres tombe peu à peu et baisse imperceptiblement. Ainsi, quelques bonnes paroles que nous disions au commencement, dans les conversations, nous tombons peu à peu dans la futilité, par suite de la corruption de l’humaine nature. Le religieux fervent et qui s’en aperçoit, doit faire comme le chantre au chœur, qui élève le ton en temps convenable. Dès qu’il s’aperçoit qu’on en vient à des paroles oiseuses, il doit entremêler des mots ou des traits édifiants, pour couper court aux conversations nuisibles. De même encore, lorsque la corruption de la chair nous a fait décliner peu à peu de la ferveur religieuse, nous devons nous exciter mutuellement401."’

La sollicitude de Jourdain ne se limitait pas aux seuls novices. Toujours selon Gérald de Frachet, "affectueux et compatissant pour ceux qui étaient éprouvés par la tentation ou la maladie, il avait soin de leur rendre de fréquentes visites et de les soutenir par sa parole, ses exemples, ses exhortations et ses prières. Aussi avait-il coutume, dès qu’il arrivait dans un couvent de visiter les malades, d’appeler les novices à table, et de s’informer s’il y avait des frères tentés, afin de pouvoir les consoler402." De nombreux passages des Vitæ Fratrum attestent de cette sollicitude de Jourdain pour ses frères. Non seulement sa parole attire les novices, mais elle les retient dans l’Ordre lorsque survient le doute. Jourdain visite toujours les frères malades, parfois même possédés du démon.

Mais il est aussi une conversation plus familière, fruit et expression de la vie fraternelle, comme le dit cet amusant exemplum :

‘Un couvers qui à Paris servait au couvent des prêcheurs posait des questions aux frères. Un jour, alors que mangeait là frère Jourdain, maître de l’Ordre, il lui dit qu’il poserait une question à lui comme aux autres. Et il demanda : "Qui fut le père de Melchisedech ?" "La réponse est facile, secundum ordinem fut son père, et c’est pourquoi on le met toujours devant lui, comme le père doit précéder le fils." Le convers admira beaucoup la réponse, comme le maître de l’Ordre était le meilleur des clercs, et dit : "C’est bien, je le crois." Et ainsi on se moqua beaucoup de lui403.’

Parfois aussi, ce sont des paroles de correction. Et lorsque c’est Jourdain lui-même qui est repris par ses frères en chapitre, son humilité et ses réponses deviennent à leur tour verba ædificatoria. Gérald de Frachet affirme que "sa charité déborda de son âme, au point que, souvent, dans ses voyages, il se dépouillait de sa tunique afin de couvrir, pour l’amour de Jésus-Christ, ceux qui n’avaient pas de vêtements ; ses frères l’en reprirent fréquemment et l’accusèrent même quelquefois au chapitre général404." Cette accusation des frères devient l’exemplum suivant :

‘Il arriva un jour que maître Jourdain, ayant donné sur la route sa robe à un fripon, qui se faisait passer pour pauvre et infirme, celui-ci la porta dans une taverne. Un frère en fut témoin et dit à maître Jourdain : "Voyez, Maître, comme vous avez bien fait de donner votre robe à ce misérable, qui l’a portée dans une taverne !" - "Je l’ai fait, répondit-il. croyant qu’il en avait grand besoin, à cause de son indigence et de son infirmité, et que c’était là un acte excellent de miséricorde. Et maintenant encore, j’espère qu’il vaut mieux avoir perdu ma robe que cette vertu405."’

Un autre passage des Vitæ Fratrum rapporte dans d’autres mots une situation analogue :

‘C’est au chapitre général que sa patience et son humilité brillaient d’un vif éclat. Lorsqu’il était proclamé par les définiteurs, et qu’on lui disait que s’il le voulait, il pouvait s’excuser, il répondait humblement : "Est-ce qu’on doit croire un voleur qui s’excuse ?" Parole qui édifia beaucoup tous les assistants406.’

Jourdain de Saxe ne réservera pas sa parole aux seuls frères prêcheurs. Le liber de adventu minorum in Angliam rapporte quelques paroles de Jourdain aux franciscains de Londres, comme celle-ci sur la valeur du mea culpa :

‘Aussitôt que l’un deux était repris par son supérieur ou son compagnon, il répondait : "Mea culpa", et souvent se prosternait à terre. Le maître des Prêcheurs, frère Jourdain, d’heureuse mémoire, raconta que, une fois que le diable lui était apparu, il avait dit que ce "Mea culpa" lui retirait tout avantage qu’il pensait obtenir des frères mineurs, parce qu’ils se disaient leurs fautes l’un à l’autre, si l’un d’un avait offensé quelqu’un407.’

Jourdain de Saxe sera également en contact avec d’autres Ordres religieux. Ainsi le pape avait chargé les frères de visiter certains monastères408, ce qu’ils firent, quand bien même les méthodes utilisées pour amener à la réforme parurent expéditives. L’un ou l’autre exemplum en témoignent :

‘Le pape Grégoire avait chargé des frères de faire une enquête sur certains monastères. Ils déposèrent quelques abbés, à cause de leur indignité, sans observer les formes juridiques. Le pape et les cardinaux en étaient si mécontents, qu’ils voulaient casser tout ce qu’ils avaient fait, lorsque survint le maître : "Saint-Père, dit-il, pour le calmer, il m’est souvent arrivé, en voulant me rendre à une abbaye de Citeaux, de trouver si longue et si détournée la route ordinaire qui conduisait à la porte, que c’était, pour mes compagnons et pour moi, un véritable ennui de la prendre quand l’abbaye était là devant nous. Je traversais donc parfois les prés et j’arrivais plus vite à la porte. Si le portier m’avait alors demandé : "Frère, par quel chemin êtes-vous venu ?" Et si, après lui avoir répondu que j’étais venu par les prés, il m’eût dit : "Vous n’êtes pas venu par le bon chemin ; retournez sur vos pas et venez par la voie ordinaire", n’eût-ce pas été trop cruel ? De même, Saint-Père, bien que les frères n’aient pas suivi la voie du droit, pour aboutir à la déposition de ces abbés, ceux-ci ne méritent pas moins d’être déposés, ainsi que vous pourrez vous en convaincre aisément, si vous voulez prendre des informations. Maintenant donc, je vous prie de ratifier ce qui a été fait, quel que soit le chemin qu’on ait pris pour y arriver409."’

A l’occasion d’un passage dans une abbaye de Citeaux, Jourdain définira ce qui fait le propre du nouvel Ordre des prêcheurs :

‘Maître Jourdain se trouvant un jour dans une abbaye de l’Ordre de Citeaux, fut entouré par plusieurs moines, qui lui dirent : "Maître, comment votre Ordre pourrait-il subsister, puisque vous n’avez pas d’autres ressources que les aumônes ? Car, vous le savez bien, encore que le monde vous soit dévoué maintenant, il n’en est pas moins écrit dans l’Evangile que la charité d’un grand nombre se refroidira. Alors vous ne recevrez plus d’aumônes et vous périrez." Le Maître leur répondit avec une grande douceur : "Je vais vous prouver logiquement, par vos propres paroles, que votre Ordre succombera avant le nôtre. Examinez bien le passage de l’Evangile, que vous citez, et vous verrez que lorsqu’il est dit : La charité d’un grand nombre se refroidira, il parle du temps où l’iniquité abondera et où surgiront des persécutions intolérables. Or, vous n’en doutez pas, ces persécuteurs et ces tyrans remplis d’iniquité vous enlèveront vos biens temporels, et alors, vous qui n’êtes pas habitués à passer d’un lieu à un autre et à demander des aumônes, vous succomberez nécessairement. Quant à nos frères, ils seront dispersés, sans doute, mais ils produiront de plus grands fruits, comme les apôtres au temps de la persécution. Ils ne s’en effrayeront pas autant que vous. Ils iront, deux à deux, de bourgade en bourgade, en quêtant leur nourriture, comme ils en avaient la coutume. Et je dis plus encore : ceux qui vous auront dépouillés leur donneraient volontiers, si les frères voulaient s’y prêter. Nous en avons déjà fait l’expérience bien des fois. Si nous voulions y consentir, les ravisseurs et les pillards seraient souvent très heureux de nous donner une part des biens qu’ils ont enlevés aux autres410."’

Notes
397.

Ce dont témoigne par exemple ce passage des Vitæ Fratrum, III, 42, 12, p. 142, cité plus haut, qui rapporte quelques paroles de Jourdain lors d’un chapitre général, prononcées à la place du sermon que la maladie l’empêchait de faire.

398.

JOURDAIN DE SAXE, Litteræ encyclicæ annis 1233 et 1234 datæ, a cura di Elio Montanari, Spoleto, 1993. La paternité de l’encyclique de 1234 à Jourdain est contestée par Simon TUGWELL, The so-called ‘encyclical’ on the translation of St Dominic ascribed to Jordan of Saxony. A study in early Dominican hagiography, Oxford, 1987. Selon la Cronica posterior, Jourdain de Saxe prit l’habitude d’envoyer du chapitre des lettres aux frères, Cronica ordinis posterior, MOPH I, Louvain, 1896, pp. 328 : "Ipse autem induxit consuetudinem quam magistri ordinis de mittendo litteras de capitulo generali. Scribebat enim sepe fratribus quos uidere non poterat litteras dulcissimas sancte consolationis et exhortationis plures, et modo omnibus, modo aliquibus prouinciis uel fratribus sic scribebat."

399.

Cronica, p. 329 : "Erat autem illi consuetudo quando erat Parisius quasi omni die quando non erat sermo facere collationem noviciis."

400.

Vitæ Fratrum, III, 42, 13, pp. 142-143 : "Semel monens fratres, ut levitates caverent, ait : "Michi et aliis prelatis accidit sicut pastori, qui magis gravatur custodia unius hirci quam centum ovium. Sic magis unus insolens gravat prelatum et turbat conventum, quam alii fratres ducenti, qui sicut oves pastores sequuntur, et sibilum eius intelligunt, nec socios relinquunt, sed simul vadunt, stant, accubant, comedunt, bibunt, capite inclinato herbas colligunt, in omnibus fructuose, in paucis tediose. Sed aliqui ut hirci turbantes pastorem et gregem, discurrunt, perstrepunt, in sociis capita inpingunt, et alta saliunt, viam non tenent, sata aliorum ledunt, nec virga nec pastoris clamore prohibentur, et ad ultimum brevem caudam id est curtam penitenciam habent ; et ideo quandoque feda sua ostendunt. Pro Deo, karissimi, fugite huiusmodi mores hircinos et estote oves Dei."

401.

Op. cit., p. 143 : "Semel monens fratres, ut ociosa caverent, ait : "Videtis, karissimi, quod inperceptibiliter quantumcumque alte incipiatur psalmus, paulatim vox cantancium frangitur et cadit. Sic quantumcumque bona verba incipiamus dicere et alterutrum conferre, paulatim ex humana corrupcione ad vana prolabimur. Sed qui bonus est et hoc percipit, debet facere sicut cantor in choro, qui in locis competentibus elevat vocem ; sic bonus vir casum ociosorum verborum advertens, debet interponere aliqua verba vel exempla grata, ut interrumpat nociva. Eodem modo cum ex carnis corrupcione paulatim non solum a verbis, sed eciam a solito religionis fervoris tepescimus, nos invicem excitare debemus."

402.

Vitæ Fratrum, III, 5, p. 103 : "Temptatis autem et infirmis se pium et compassibilem exhibebat sua presencia sepius visitando, et eos verbis et exemplis et exhortacionibus et oracionibus confovendo. Unde consuetudo illi erat, ut, cum ad aliquem conventum veniret, visitaret infirmos, ad mensam suam vocare novicios, et si essent aliqui temptati, inquirere, ut consolaretur eosdem."

403.

Compilacio singularis exemplorum, Berne, Burgerbibliothek, cod. 679, f. 11rb-11va : "Conuersus quidam Parisius seruiens in hospicio predicatorum petebat a fratribus questiones. Quadam uice, comedens frater Iordanus magister ordinis, ait illi quod peteret ab eo aliquid sicut aliis. Qui quesiuit : qui fuit pater Melchisedech ? Quis, inquit, facilis est aduersio sic, secundum ordinem fuit pater eius et ideo ponitur ante eum, sicut pater debet precedere filium. Quod admirans conuersus et quod magister ordinis melior clericus esset, ait : bene credo. Et sic fuit multipliciter derisus."

404.

Vitæ Fratrum, III, 5, p. 103 : "In religione tantum in eo pietas habundavit, ut frequenter exueret tunicas, dum iret per vias, nudos tergens pro Christo ; super quo fratres sepe reprehenderunt eum, ac eciam accusaverunt eum in capitulo generali."

405.

Vitæ Fratrum, III, 42, 7, p. 140 : "Cum magister Iordanis dedisset semel in via unam de tunicis suis uni ribaldo, qui simulabat se pauperem et infirmum, accidit quod portabat eam ad tabernam. Frater autem, qui hoc vidit, dixit magistro : "Ecce, magister, quomodo bene dedistis tunicam vestram ? nam ribaldus ille portavit eam ad tabernam." Respondit magister : "Sic feci, quia credidi, quod multum indigeret tamquam pauper et infirmus, et videbatur valde pium ei succurrere ; adhuc iudico, melius amisisse tunicam, quam pietatem."

406.

Vitæ Fratrum, III, 20, p. 117 : "In capitulo autem generali multum elucebat eius humilis paciencia. Nam cum proclamaretur a diffinitoribus de quocumque et diceretur ei, quod excusare se posset, si vellet, humili voce dicebat : "Numquid credi debet latroni se excusanti ?" Quo verbo multi edificati sunt."

407.

THOMAS DE ECCLESTON, Liber de adventu minorum in Angliam, éd. Andrew G. Little, Paris, 1909, p. 31 : "Quam cito quisquam eorum vel a superiore vel socio fuisset increpatus, statim respondit : "Mea culpa", et frequenter etiam prostratus. Unde magister prædicatorum bonæ memoriæ frater Jordanus dixit, quod diabolus, cum aliquando ei apparuisset, dixerat ei, quod "Mea culpa" abstulit ei quidquid lucrari credidit inter fratres minores, quia scilicet dicebant culpas suas invicem, si quis alium offendisset."

408.

On trouve trace de ces visites de monastères dans les Monumenta diplomatica.

409.

Vitæ Fratrum, III, 42, 8, pp. 140-141 : "Cum papa Gregorius commisisset inquisicionem quorumdam monasterium quibusdam fratribus, et ipsi non servato iuris ordine, deposuissent quosdam abbates, quia invenerant eos malos, et essent de hoc papa et cardinales turbati intantum, quod vellent revocare, quod fratres fecerant, superveniens magister et volens eos placare dixit : "Pater sancte, michi accidit, quod cum vellem declinare ad aliquam abbaciam Cisterciensem, inveni interdum viam communem, que ducit ad portam ita longam et circularem, quod tedium erat michi et sociis tantum circuire, cum abbacia esset prope et ante oculos meos, et tunc aliquando ivi per prata et sic cicius perivi ad portam. Si tunc michi dixisset portarius : "Non intrabitis, quia per viam rectam non venistis, revertamini retro et veniatis per viam usitatam, alioquin non intrabitis." Nonne nimia esset duricia ? Sic pater sancte, licet fratres non venerint per viam iuris, que forte videbatur eis nimis prolixa ad deposicionem istam, cum bene fuerint digni huiusmodi abbates, sicut potestis de facili scire, si volueritis inquirere, sustineatis, si placet, quod factum est, per quamcumque viam adidventum sit."

410.

Vitæ Fratrum, III. 42, 6, p. 139-140 : "Cum esset magister Iordanis in quadam abacia Cisterciensi, circumdederunt eum multi de monachis et dixerunt ei : "Magister, quomodo poterit durare ordinem vester, quia non habetis, unde vivatis, nisi elemosinas ? et scitis bene quod licet sit vobis, modo devotus mundus, tamen scriptum est in euuangelio, quod refrigescet caritas multorum, et tunc non habetis elemosinas et deficietis." Respondit magister cum omni mansuetudine : "Ostendo vobis racionabiliter ex verbis vestris, quod prius deficiet ordo vester, quam noster ; respiciatis in ewangelio et invenietis quod istud "refrigescet caritas multorum" scriptum est de tempore illo, quando habundabit iniquitas et erunt persecuciones intollerabiles. Tunc autem bene scitis, quod persecutores et tiranni illi habundantes iniquitate auferent vobis bona vestra temporalia : et tunc vos, qui non consuevistis ire de loco ad locum et querere elemosinas, necessario deficietis. Fratres autem nostri tunc dispergentur et facient fructum maiorem sicut apostoli, quando dispersi fuerunt tempore persecucionis ; nec ita terrebuntur, immo ibunt de loco ad locum, duo et duo, et querent victum suum, sicut consueti fuerant. Et plus dico vobis, quod illi, qui vobis auferent, dabunt eis libenter, si recipere voluerint, quia multociens iam experti sumus, quod raptores et predones cum magno gaudio volunt nobis dare frequenter de illis, que auferunt aliis, si recipere vellemus."