II.4.3. Genre des sujets testés

Plusieurs études tendent à montrer quelques différences d’organisation des connaissances en mémoire dans certaines catégories sémantiques selon le genre des sujets testés.

Dans des tâches de fluence verbale menées auprès d’une population de sujets ne présentant pas de pathologie particulière, les hommes produisent de meilleures performances pour la catégorie des outils, alors que la production verbale des femmes est meilleure pour la catégorie des fruits (Capitani, Laiacona et Barbarotto, 1999). Ceci est confirmé par Laws (1999) à travers l’étude des latences dans une épreuve de dénomination d’images dont la familiarité avait été controlée : les hommes sont plus rapides pour énoncer des noms appartenant à la catégorie des artefacts alors que les femmes sont plus rapides pour la catégorie des objets naturels. Mais cette spécificité catégorielle liée au genre des sujets ne s’exprime pas toujours dans cette opposition logique entre vivants et non vivants. Les travaux de McKenna et Parry (1994), basés sur une épreuve de dénomination d’images, montrent par exemple des distinctions selon le genre au sein du domaine du vivant : les femmes étant meilleures pour les fruits et les végétaux alors que les hommes présentent de meilleures performances pour les animaux. De même, pour le domaine du non vivant, les femmes produisent de meilleures performances pour les objets non manipulables alors que les hommes sont plus performants pour les objets manipulables.

Les observations neuropsychologiques réalisées par Laiacona, Luzatti, Zonca, Guarnaschelli et Capitani (2001) sur une population de 49 patients souffrant d’aphasie vont également dans le sens d’une influence du genre sur le traitement catégoriel. Dans cette population de patients, 6 cas ont été rapportés comme présentant des troubles particuliers à propos d’objets du monde vivant et 4 pour des objets non vivants. Parmi les 6 patients déficients pour les vivants, 5 étaient masculins alors que tous les déficits spécifiques pour les objets inanimés étaient exclusivement présentés par des femmes. Ces préférences catégorielles liées au genre des individus ont également été observées chez des patients atteints de DTA (Laiacona, Barbarotto et Capitani, 1998). Mais tous les travaux ne vont pas dans le même sens : ce sont parfois des hommes qui présentent des déficits pour les artefacts (Cappa, Frugoni, Pasquali, Perani & Zorat, 1998) et les femmes qui souffrent de difficultés particulières pour le traitement des objets du monde vivant (Sartori, Miozzo & Job, 1993 ; De Renzi & Lucchelli, 1994).

Il est difficile d’expliquer cet effet du genre seulement par la familiarité ou la fréquence : lorsque ces dimensions sont contrôlées, des différences entre les hommes et les femmes sont encore observables (Funnel & DeMornay Davies, 1996 ; Albanese, Capitani, Barbarotto & Laiacona, 2000). Mais, malgré le fait que cet effet du genre des sujets reste difficile à expliquer et qu’il se manifeste parfois différemment suivant les études, ce facteur doit être pris en compte dans les recherches portant sur les connaissances sémantiques en mémoire. Ainsi, dans nos expériences, nous nous attacherons à contrôler cet effet du genre en équilibrant le nombre d’hommes et de femmes. De même, nous nous attacherons à contrôler le niveau culturel ainsi que l’âge des sujets testés, car les différences entre les performances des sujets peuvent également être liées à ces facteurs (Kay & Hanley, 1999 ; Efklides, Yiultsi, Kangellidou, Kounti, Dina & Tsolaki, 2002).