V. CONCLUSION

Synthèse des expériences réalisées auprès des personnes âgées contrôles et des différents groupes de patients DTA (débutants, modérés et sévères)

  1. En début de pathologie, l’organisation hiérarchique ou taxonomique des attributs pour un même objet en mémoire est globalement préservée. Toutefois, le vieillissement mais aussi la pathologie affectent la rapidité de récupération de ces informations. La présence de temps déviants donnant lieu à une réponse correcte (Expériences 9 et 10) observée uniquement chez les patients montre que, pour eux, seul l’accès aux informations est ralenti, l’intégrité du stock de connaissances étant encore préservée en début de DTA.

  2. La présentation imagée des stimuli (Expérience 10) favorise, chez les personnes âgées comme chez les sujets adultes jeunes, l’utilisation d’une stratégie basée sur l’imagerie mentale visuelle (processus de complément et de scanning). Cette stratégie, encouragée par la présentation imagée des stimuli, favorise spécifiquement le traitement des informations structurales. Son utilisation se manifeste de deux façons : (1) par un effet global de la nature avec un avantage pour les attributs structuraux et (2) par une absence d’effet du niveau de l’information sur ces informations structurales. Pour ces deux populations (adultes jeunes et sujets âgés contrôles), le passage à la version strictement verbale cette épreuve (Expérience 10) s’accompagne de la disparition de ces deux indicateurs : en version verbale, l’effet global de la nature disparaît et l’effet du niveau pour les informations structurales est observé.
    Pour les patients, la DTA affecte quelque peu la capacité à utiliser cette stratégie basée sur l’imagerie mentale visuelle. Pour cette population, seul un des deux indicateurs est présent et se maintient au cours du suivi : l’absence d’effet du niveau pour les informations structurales est observable en version imagée (Expérience 9) alors qu’en version verbale (Expérience 10), cet effet du niveau pour les informations structurales est observé. Concernant le deuxième indicateur (effet global de la nature) ; celui-ci produit seulement une tendance lors de la première passation, puis disparaît définitivement au cours des passations suivantes.

  3. L’évolution des performances des patients dans la version strictement verbale (Expérience 10, suivi longitudinal et Expérience 11 réalisée auprès de patients DTA modérés et sévères) met en évidence un effet particulier de la DTA sur l’organisation des connaissances sémantiques en mémoire. Cet effet est observable à travers les effets de cette pathologie sur l’indépendance des niveaux de traitement de l’information : cette indépendance est conservée avec la pathologie mais, au fur et à mesure de l’évolution de la maladie, elle s’exprime avec des indices différents
    Pour les sujets adultes jeunes et les contrôles âgés, l’indépendance des deux niveaux de stockage se manifeste (1) à travers l’effet significatif du niveau (les informations de niveau d’entrée sont mieux et plus rapidement traitées que celles du niveau supra-ordonné) et (2) à travers l’observation d’une sensibilité différente de chacun de ces deux niveaux à la nature de l’information. Le niveau d’entrée est le niveau privilégié pour le traitement des informations fonctionnelles alors que le niveau supra-ordonné l’est pour les informations structurales.
    Avec la pathologie, ces deux indices disparaissent : la progression de la DTA entraîne la disparition de l’effet du niveau et de la sensibilité spécifique de chacun des niveaux à la nature de l’information. Mais, parallèlement, un nouvel indicateur de l’indépendance entre les niveaux de la hiérarchie émerge : la pathologie affecte alors différemment les connaissances contenues à chacun de ces niveaux :
    • Les informations supra-ordonnées deviennent rapidement difficiles à récupérer en mémoire. Toutefois, le stock de ces connaissances est préservé. Pour récupérer ces connaissances de niveau supra-ordonné, les patients mettent en place une stratégie basée sur un compromis entre rapidité et exactitude : en prenant plus de temps, ils parviennent à récupérer les informations correctes. Mais cette stratégie trouve ensuite ses limites avec la progression de la pathologie : ces connaissances ne sont plus disponibles (perte du stock), les taux d’erreurs pour ces informations supra-ordonnées augmentent alors fortement. De plus, nous pouvons préciser que ce sont d’abord les informations supra-ordonnées fonctionnelles (plutôt que structurales) qui sont les premières affectées par cette pathologie.

    • Les informations de niveau d’entrée sont relativement préservées en début de pathologie, alors que les informations supra-ordonnées sont déjà affctées. Puis, la progression de la pathologie provoque la perte du stock de ces connaissances. Les sujets mettent alors plus de temps pour tenter de récupérer ces propriétés en mémoire mais n’y parviennent pas. Les informations de niveau d’entrée structurales (plutôt que fonctionnelles) sont les premières affectées.