PATHOLOGIE ET « NORMALITE »

D’autre part et au cours des dernières décennies, différents auteurs se sont penchés sur la dialectique normalité-pathologique.

Comte (1842)46 s’appuyant sur le principe de Broussais présente la maladie comme un excès ou un défaut par rapport à l’état «normal».

Pour Bernard (1865)47, toute maladie n’est que l’expression troublée d’une fonction «normale».

Pour E. Minkowski (1938)48, la subjectivité de la notion de « norme » semble souvent aller de soi comme un simple accord avec les nécessités et les réalités de l’existence.

G. Canguilhem49 définit la maladie comme la réduction de la marge de tolérance par rapport aux infidélités du milieu. « Normalité » serait ainsi synonyme « d’adaptation » ; cette idée comporte des nuances qui permettraient à Canguilhem de considérer comme demeurant dans les limites du « normal » certains états réputés « pathologiques » par d’autres, dans la mesure où ces états peuvent exprimer un rapport de « normativité » à la vie particulière du sujet.

A. Freud (1965)50 définit la normalité chez l’enfant à partir de la façon dont s’établissent peu à peu les aspects topiques et dynamiques de la personnalité et de la façon aussi dont s’engagent et se résolvent les conflits pulsionnels.

D. Anzieu (1959)51 définit la maturation affective, fondement de toute « normalité » authentique comme une attitude sans anxiété vis-à-vis de l’inconscient tant dans le labeur que dans les loisirs, une aptitude à faire face aux inévitables manifestations de cet inconscient dans toutes les circonstances où la vie peut placer l’individu.

C. Chiland (1966)52 montre que les enfants dont le pouvoir normatif est le plus étendu ne sont pas pour autant exempts de certains signes de la lignée névrotique ou phobique. C’est la souplesse du passage d’un bon fonctionnement situé au niveau du réel à un bon fonctionnement situé au niveau fantasmatique qui servirait de critère de normalité plutôt qu’un simple diagnostic de structure. C. Chiland précise (1965) :

‘« Notre but n’est pas nécessairement de rendre l’enfant conforme à ce que son milieu, la famille, l’école ou la société attend de lui, mais notre but est de le rendre capable d’accéder avec le moins de limitations possibles à son autonomie et à son bonheur.»’
Notes
46.

-A. COMTE, Cours de philosophie positive, III, 40e leçon, Rassmussen, Paris.

47.

- C. BERNARD, Introduction à la médecine expérimentale, Ballière, Paris.

48.

- E. MINKOWSKI, Etude sur la structure des états de dépression, Schweiz. Arch. Neurol. U. Psych. 1930.

49.

- G. CANGUILHEM, Le normal et le pathologique, Puf, Paris. 1966.

50.

- A. FREUD ,Le normal et le pathologique chez l’enfant (1965), Trad. Fr. Gallimard, Paris. 1968.

51.

-D. ANZIEU, le Psychodrame analytique chez l’enfant, Puf. Paris. 1956.

52.

- C. CHILAND et coll, Renseignements épidémiologiques fournis par l’étude longitudinale d’un groupe d’enfants du XIIIe arrondissement de Paris, Bull. INSERM, t. 21, n°3. pp 455-466.