Qu’est-ce que le complexe organisateur ?

Nous trouvons nécessaire d’aborder ce sujet là, en partant de l’importance donnée dans les hypothèses, au complexe organisateur agissant dans certain cas sur le passage à l’acte de l’agression sexuelle.

Pour expliquer le complexe organisateur de la psyché, nous allons nous référer aux trois modes complémentaires de compréhension des faits cliniques. Il s’agit de points de vue fondamentaux, dits « économique », « dynamique » et « topique » :

  1. Le point de vue économique concerne directement la notion de pulsion, proche de celle de libido, celle-ci est définie comme l’énergie de base de mouvements pulsionnels, lesquels tendent à une « décharge » qui apporte satisfaction et plaisir.

  2. Le point de vue dynamique tient compte du jeu complexe des défenses qui s’opposent à la satisfaction trop directe des pulsions ou qui permet de leur trouver des issues compatibles avec les exigences de la réalité et de la morale.

  3. Enfin, le point de vue topique, définit trois « instances » complémentaires :
    1. Conscient.

    2. Par opposition au Conscient, l’Inconscient est le « lieu » d’inscription des représentations et des souvenirs refoulés63.

    3. Le Préconscient est la troisième instance, se situant comme lieu de passage de l’un à l’autre.

  4. Un afflux de faits nouveaux64 remet en discussion les cadres explicatifs, Freud formule une seconde topique, articulant trois nouvelles « instances », le Ca, le Moi et le Surmoi.
    1. Freud définit le ça comme le « réservoir des pulsions », et le « lieu » des représentations et des affects refoulés. Le ça ne coïncide pas avec l’Inconscient de la première topique, ainsi qu’on le perçoit mieux si l’on examine ses relations avec les deux autres instances de cette seconde topique, le Moi et Surmoi. Cette seconde topique n’annule pas la première.

    2. Le Moi est redéfini comme instance centrale, intégratrice, qui tout à la fois assure, ou tente d’assurer, une équilibration d’ensemble des conflits pulsions-défenses, et l’adaptation à la réalité, en particulier les relations interpersonnelles. Le Moi n’est plus assimilé à la conscience : pour une large part, les conflits qu’il gère et les défenses qu’il met en oeuvre fonctionnent de façon inconsciente.

    3. Le Surmoi peut-être approximativement défini par l‘ensemble des impératifs moraux, des obligations et des interdits qu’il impose au Moi avec sévérité, voire avec cruauté.

Selon la conception freudienne, le Surmoi est une différenciation du Moi, mais dérive assez directement du Ca, de ses poussées pulsionnelles et de ses retours du refoulé qui en émanent : d’où la « sauvagerie » de ses interventions.

Le Moi devient, selon une expression de Freud « serviteur de trois maîtres », le Ca, le Surmoi et la réalité. Il est en position centrale ; il est en effet en permanence sollicité par des exigences pulsionnelles, obligé de se défendre des infiltrations déguisées du refoulé, vit dans une crainte des punitions dont le menace le Surmoi, tente de se valoriser par référence à ce que lui propose l’Idéal du Moi, sans céder aux illusions infantiles du Moi Idéal..., tout ceci en tentant de s’adapter à la réalité, celle des choses, des événements, et surtout des personnes.

Tout un ensemble d’obligations et d’interdits sont ressentis comme édictés par une instance extérieure à soi (« il faut », « on ne doit pas », etc.), comme transcendant le Moi, voire extérieure et supérieure, cette caractéristique est essentielle de toute divinité représentative de ce système d’obligations et d’interdictions. Elle est intériorisée comme Surmoi, et devient par là partie intégrante de la personnalité. Le Surmoi tend à se confondre avec ce qu’on nomme usuellement « la conscience morale ». Le Moi et le Surmoi peuvent plus au moins s’accorder, mais ne cessent guère cependant d’être en conflit l’un avec l’autre. Tantôt le Moi se soumet aux obligations et impératifs édictés par le Surmoi, tantôt il proteste, ce qui peut déboucher sur des conduites transgressives et violentes.

Notes
63.

- Pour bien comprendre la vie psychique, il est indispensable de surestimer la conscience. Il faut voir dans l’Inconscient le fond de toute vie psychique. L’Inconscient est le psychique lui-même et son essentielle réalité. Sa nature intime nous est aussi inconnue que la réalité du monde extérieur, et la conscience nous renseigne sur lui d’une manière aussi incomplète que nos organes des sens sur le monde extérieur, S. FREUD, Interprétation des rêves, pp. 519-520.

64.

- L’accumulation du matériel clinique, le développement des discussions théoriques dans une communauté psychanalytique en extension, sans oublier les phénomènes universels tels que les processus de deuil et les phénomènes culturels tragiques mis en évidence par la première guerre mondiale.