QUELLES SONT LES CONDITIONS REQUISES DE L’OBJET D’AMOUR ?

Le choix de l’objet :

Selon Freud, cela se fait suivant le complexe maternel plutôt parental, dans son article « La psychologie de la vie amoureuse » en 191076, il dégage trois types différenciés qui rentrent en jeu dans le choix d’objet chez l’homme. Nous allons citer un de ces types, nous permettant à introduire des notions qui nous semblent intéressantes à notre étude.

Ce type exige deux conditions, l’une peut s’ajouter à la première ou peut aussi se présenter très souvent seule.

  1. La condition du tiers lésé : elle exige que le sujet choisisse comme objet d’amour une femme qui n’est pas seule ou libre mais exclusivement une femme dont un autre homme peut faire valoir des droits de propriété.

  2. La deuxième condition disant qu’une femme chaste et insoupçonnable n’exerce jamais l’attrait qui l’élèverait au rang d’objet d’amour ; seule l’exerce une femme dont la réputation et la vie sexuelle varient dans la gamme de la conduite d’une femme mariée qui ne répugne pas au flirt jusqu’à la conduite d’une « artiste d’amour » Freud appelle cette condition l’amour de la putain.

A l’amour de la vierge s’oppose l’amour de la putain. Un caractère d’opposition se trouve tranché entre la mère et la putain, C’est juste ce caractère d’opposition qui va nous inciter à étudier l’histoire du développement et le rapport inconscient de ces deux complexes, car il nous permettrait de mieux situer l’ambivalence de l’image de la femme détectée souvent chez nos agresseurs sexuels ainsi que leurs conduites envers elles.

Nous savons depuis longtemps que ce qui, dans le conscient, se représente clivé en deux termes opposés, bien souvent ne fait qu’un dans l’inconscient.

Cette manifestation puise son énergie du complexe infantile maternel plutôt paternel. En revenant aux conditions de choix de l’objet d’amour, certains comportements sont repérés chez l’amant ; l’homme est convaincu que la femme aimée a besoin de lui, que sans lui, elle perdrait tout contrôle moral, et qu’il faut à tout prix la sauver!

  • Pourquoi sauver la femme aimée ?

  • D’où vient ce sentiment, ce besoin ?

  • Quelle est sa nature ?

Selon Freud, les différents traits du comportement de l’amant envers l’objet d’amour choisi qui vont de la condition que la femme aimée ne soit pas libre, et celle qui l’apparente à une putain, la haute valeur accordée à la femme aimée, le besoin de jalousie, la fidélité...etc. sont, après avoir été approfondis par la psychanalyse, l’histoire des personnes en question, puisés à la même source.

Le choix d’objet et ce comportement amoureux ont la même origine psychique que ceux rencontrés dans la vie amoureuse du sujet normal ; ‘«’ ‘ leur source est dans la fixation de la tendresse de l’enfant à sa mère et ils représentent l’une des issues de cette fixation’ ». La libido, dans ce type, s’est attardée si longtemps pour se détacher de la mère, même après le début de la puberté, que les objets d’amour ultérieurement choisis conservent l’empreinte des caractères maternels et deviennent tous des substituts matériels facilement reconnaissables. Tel que la « non liberté » de la femme ou condition du tiers-lésé, ou la surestimation qui fait que la femme aimée est l’unique, l’irremplaçable... toute ces conditions s’intègrent au contexte de l’enfance. Pour l’enfant, la mère appartient au père lui-même, d’autre part, elle est unique car on ne possède jamais qu’une seule mère.

Pour l’autre condition déterminant l’amour et qui paraît s’opposer à toute déduction à partir du complexe maternel, celle qui apparente l’objet choisi à une putain. Freud, l’explique comme suivant ;

La mère est considérée volontiers dans la pensée consciente des adultes comme une personnalité d’une pureté morale inattaquable et tout ce qui vient de l’extérieur menaçant cette image est offensive, surgissant de l’intérieur sur cette caractéristique de la mère.

Le problème se situe à l’époque ; au moment, où l’enfant acquiert pour la première fois une connaissance des rapports sexuels entre les adultes. Ces informations brutales font provoquer chez lui ’mépris et révolte”, le mettant alors au fait du secret de la vie sexuelle, détruisent l’autorité des adultes, qui s’avère incompatible avec le dévoilement de leur activité sexuelle. Ce qui impressionne le plus le nouvel initié, c’est le rapport à ses propres parents qui, pour lui, semblent très loin d’exercer un tel rapport, les autres peut-être, mais pas les siens.

A cette information s’ajoute un corollaire, c’est la connaissance de l’existence de certaines femmes qui font un métier de l’acte sexuel et sont de ce fait l’objet du mépris général. Freud ajoute que ce mépris est étrange à la pensée de ce garçon qui n’éprouve à l’égard de ces femmes qu’un mélange d’attirance et d’horreur, car à travers elles, il peut être introduit, lui aussi, à la vie sexuelle ; le monde des grands. Après avoir cédé devant ce qu’il entend, et qu’il ne peut plus douter que ses parents ne font pas exception aux normes de cette ’vilaine activité’, il se dit qu’après tout la différence entre la mère et la putain n’est pas si grande que cela, puisqu’en définitive elles font la même chose.

De nouveau, ces explications nouvelles qu’il a reçues vont éveiller chez lui des traces mnésiques des désirs datant de son enfance et réactivés à partir de ces traces des motions psychiques. Il tombe sous la domination de l’oedipe en désirant la mère elle-même, et haïssant de nouveau le père, comme un rival. Ces motions trouvent leurs issues dans les fantasmes, ceux-ci ont pour contenu, sous les formes les plus variées, l’activité sexuelle de la mère, et la tension qui les accompagne trouve sa résolution dans la masturbation.

Notes
76.

- S FREUD, Contribution à la Psychanalyse de la vie amoureuse, in La vie sexuelle, Puf, 1969.