Interprétation

Avant d’aborder l’interprétation, il faut situer les circonstances dans lesquelles l’entretien s’est déroulé. Normalement, nous effectuons les entretiens dans une petite salle à l’intérieur de la prison, servant à des tâches multiples. Par malchance, cette fois-ci, la salle était occupée par des enquêteurs qui sont venus voir un des prisonniers, alors, l’officier responsable nous a introduits dans une petite chambre longitudinale avec deux lits (où dormaient les gendarmes de garde), à peine il y avait-il la place pour une chaise. L’interviewé s’est assis sur le lit face à la chaise où je m’installais, tout l’entretien, je tâchais de veiller à ce que nos genoux ne se touchent pas.

Cet entretien nous laisse percevoir des traits de douleur morale, d’angoisse et d’anxiété, le ralentissement de pensée ainsi qu’une sorte d’indifférence et des obsessions.

Il débute, en réponse à ma question : « Mon père a divorcé la mère, il y a vingt et un et demie, (un silence), j’ai un frère plus grand que moi et deux filles plus petites, à propos des voisins, ils me prennent en considération195 (aussitôt le thème et le sentiment de pouvoir commence à apparaître, cette expression prend plus de signification dans l’ensemble de l’entretien), si parfois je rentre tard, ils s’intéressent à moi, comme si je suis leur fils. J’habite avec mon père, moi et mon frère et mes soeurs, je n’aime pas toutes les études au monde (il veut dire fréquenter l’école), je travaillais la nuit, ma famille (ses oncles paternels) m’aidait, elle était aux Etats-Unis, ils m’envoyaient de l’argent, mon grand frère les contrariait toujours, moi, non, je ne les contrarie pas, j’aidais mon père dans la maison, mon frère dépensait trop l’argent, moi, je travaillais sans en dépenser, mon père m’a acheté une boutique, j’ai payé le reste, mon oncle m’a envoyé de l’argent ».

Il n’y a pas une bonne belle-mère, nous nous sommes séparés, tout l’immeuble est pour nous, en haut les salons, en bas les chambres à coucher, quand nous sommes éveillés, nous nous sommes séparés, il est difficile de manipuler avec elle, s’entendre avec elle est difficile de même (quand t’es né, t’es allé chez ton père ?) Il dit oui avec sa tête, puis avec un geste de main il ajoute : il m’a tiré, mon père était dominant. Ma mère (pour la première fois, il dit « ma ») était chez ses parents, elle ne s’est pas remariée, on lui a interdit de nous visiter, au début, il nous emmenait chez elle, puis durant la période du divorce un problème s’est passé et il s’est arrêté, après cinq ans nous ne la reconnaîtrions plus, nous sommes éveillés sur 750 mille problèmes, rien n’est juste, dans ma famille tout est tombé par terre, avec ses maladies, elle avait une hypertension. (Elle n’a rien fait pour que vous reveniez chez elle ?) Non, et elle voulait pas, elle avait quatre enfants, elle devrait faire l’impossible pour en rendre même un demi (enfant) et pas seulement un, oh! combien t’es rapide en écrivant, même la famille, la belle-mère et ma grand-mère étaient contre elle, ma grand-mère vivait avec eux (ses parents) elle voyait ses comportements et ses manières bien sûr, elle me dirait la même chose (pourquoi étaient-ils contre ta mère ?) au nom de Dieu196, la seule réponse que non seulement moi-même veux la connaître mais mes frères197 aussi, pourquoi elle s’est divorcée trois fois, on a essayé, on lui demande elle dit, c’est sa (son époux) faute! on demande la famille, ils disent, c’est sa (la maman) faute, sûr, sûr, c’est la faute de mon père, parce que jusqu’à maintenant, il a des comportements que même la mouche ne peut supporter, si ma belle-mère ne désirait pas son argent, elle n’aurait pas dû le supporter jusqu’à maintenant, combien de prisonnier t’en demandent ? (Quatre environ) pourquoi, la psychologie est facile ?»

Nous remarquons que parfois, il passe d’un thème à un autre sans lien logique, sans toutefois perdre le lien avec la réalité. Tout au début de l’entretien, il désignait sa mère à la troisième personne, il semble qu’il la dénigre, qu’il la dévalorise. La séparation précoce et les problèmes continus des parents ont laissé l’enfant, peut-être, dans un état d’instabilité.

La maman de F.M a été obligée malgré elle de quitter ses enfants, nous comprenons plus tard qu’elle a été divorcée trois fois de son époux ; le père de F.M, « dès ma naissance, il m’a tiré, il était dominant » il nous semble qu’il lui (à la mère) donne un excuse, pourtant les lois de leur religion198 donne à la mère le droit de garder le fils jusqu’à sept ans et la fille jusqu’à neuf ans donc, la loi était avec elle, surtout que F.M était nouveau-né. F.M semble avoir mal vécu la séparation d’avec sa mère, nous ignorons qui s’occupait du bébé loin de sa mère, l’unité mère-fils semble mal instaurée dès le début de sa vie, pour lui le mot «sein» ne lui dit que « il complète la beauté de la femme », F.M, semble-t-il, a vécu un traumatisme narcissique précoce, loin d’être encore à cette époque une menace de castration.

La séparation due aux divorces successifs a laissé l’enfant devant une menace continue de perte de l’objet primaire qui, dès le départ n’a pas été bien établi, l’identification primaire de l’enfant semble mal introduite.

L’imago maternelle d’une mère tantôt « mauvaise » tantôt « bonne » selon M. Klein et qui est la plupart de temps insaisissable et instable influence le reste de sa vie, cela se traduirait par des sentiments d’angoisse et d’instabilité qui comblent la vie de F.M et que seules les relations sexuelles, en passant d’une fille à une autre, pouvaient calmer. Ces relations multiples seraient-elles un moyen de rechercher l’imago maternelle insaisissable? « J’ai d’angoisse vingt-quatre heures sur vingt-quatre, je sens pas le repos que, je te le dirai au cours de la conversation, je dirai maintenant, je ne me repose que lorsque je suis avec ma petite copine, je bois un peu (quand tu199 fais une relation sexuelle ?200) Il remue la tête positivement (quand est-ce tu as découvert ce moyen ?201) je sais pas précisément, quand est-ce que j’ai fait la première relation, être perdu, depuis mon enfance mais le repos, depuis trois ou quatre ans ». Oublier sa première relation sexuelle nous étonne un peu, cela nous interroge sur la réalité qu’il veut oublier, qu’est-ce qu’il voulait vraiment oublier ? Que s’est-il passé il y a trois ou quatre ans ? Malheureusement cet unique entretien laissera ces questions toujours sans réponse.

Il réagissait face à ces divers sentiments d’angoisse et de perte par une décharge de l’impulsion sexuelle, voire une pénétration. L’angoisse provenant d’une menace d’anéantissement qui au départ est en relation avec l’objet primaire ne trouvait qu’un seul moyen pour la calmer, c’est pénétrer! C’est encore pénétrer un monde propre à lui, c’est posséder ce qu’il n’a pas, ainsi l’acte de viol accompagné de meurtre serait-il un moyen défensif contre la folie complète ? Ce sentiment était-il si puissant qu’il fallait à tout prix le décharger ? « Quand, je m’énerve ou je m’angoisse, je veux me soulager, je vois la cendre, je me sens perdu, une épilepsie vient dans ma tête, je pense plus ». Après avoir accompli ces actes criminels, F.M retrouve le repos tant cherché, après une longue histoire d’insomnies, qui l’étonne lui-même « avant, (il veut dire avant sans incarcération) je ne dormais pas, ici, je dors, ça m’étonne, comment les gens pouvaient dormir ainsi tandis que je pouvais pas le faire, dehors, ma tête n’était pas reposée ».

A un autre niveau, des sentiments de blâmes allant parfois jusqu’à la haine sont évoqués au cours de l’entretien : « elle n’a rien fait pour nous garder », « elle n’a pas voulu de nous », « elle a quatre enfants, au moins elle devrait faire l’impossible pour en rendre même un demi (il veut dire, un demi-enfant) », d’où un conflit précoce d’affect.

Le sentiment d’anéantissement comme nous allons le voir plus tard a semble-t-il deux origines : paternelle et maternelle. D’autre part, comme moyen de se défendre contre l’angoisse, il cherche l’unité dans la relation sexuelle, il cherche l’imago maternelle dans ses relations continues et multiples.

La belle-mère, au contraire, n’a pas pu remplacer la mère dans son rôle affectif et psychologique pour l’enfant, devant le mot « épouse » il répond : « ça dépend de l’intelligence, tu prends une, belle, tu découvres qu’elle est folle ! » D’autre part, et au niveau oedipien, les parents de F.D ont connu trois divorces, entre eux, ils ont eux deux autres enfants que F.M et son frère aîné, malheureusement nous ignorons comment F.M concevait l’arrivée d’un nouveau-né à chaque fois que la relation se réconciliait entre ses parents, ce nouveau-né serait-il vu comme signe de trahison de la mère ?

Quant à l’indifférence, il dit : « au contraire, quand il y a une joie de la famille, j’éprouve de la joie, quand il n’y en est pas de la famille, j‘éprouve de la tristesse, c’est un complexe, non, je sais pas », serait-ce la façon de dire que toute joie doit venir de l’intérieur, l’intérieur de la mère ou l’intérieur de la femme ?

Quant à l’opinion sur lui-même, il dit : « je suis calme, comment te le dire, je m’envie je suis calme plus qu’une fille, calme parfois et énervé d’autre fois, parfois tu me parles comme si je suis ivre, je n’ai pas peur de moi » ; ailleurs, il ajoute : « comment ? Généralement, quand cet accident (les crimes) m’est arrivé et ce procès, je pense que je ne l’ai pas fait, tous les gens croient que j’ai fait fâcher tout le monde et j’ai éprouvé de la joie, mais au contraire, mais dehors, j’ai essayé de reposer mes nerfs mais en vain, mais à force que j’ai été bon avec la mère, les voisins, même mon père qui me dominait, j’étais très bon avec lui, je suis devenu pareil à un ressort déformé ne pouvant plus revenir à son état d’origine, à chaque fois je disais quelque chose de naïf, il écoutait sans le prendre en considération, cela veut dire comme un ressort, il m’a maintenu en croyant qu’il puisse finir l’affaire aussi simple que ça, si je dis à mon voisin bonjour et je lui raconte, il me dit ne lui dis pas, fini, l’histoire se termine et je le dis pas, je croyais que l’état va devenir plus soutenable mais avec le temps ça devenait plus difficile ».

Un paragraphe riche en significations ; tout d’abord, nous pouvons constater qu’il fonctionne sur un certain déni : « je pense pas que je l’ai fait» qui lui assure une défense pour garder son propre équilibre psychologique intérieur. En plus, l’association libre peut nous guider vers un fait pouvant être assez important, F.M part de l’opinion de lui-même pour arriver à l’histoire de l’emprise de son père, serait-ce le noeud de ses affects ?

F.M. vit sous une emprise complète de son père, dont il est complètement conscient ; plusieurs propos l’indiquent : la vie entière de F.M est minutieusement dirigée et esquissée par son père, la vie quotidienne de même, avec ses détails les plus banals, l’effet du père influence intensément ses pensées ainsi que ses sentiments, plus tard, au cours de l’entretien nous saurons que F.M était soumis à une forme de violence physique autre que celle morale- née de cette emprise- qui, à notre avis, était puissante au point de causer un traumatisme si pesant d’effondrement et d’écoulement.

Un père violent-dominant, que F.M blâme en quelque sorte pour la séparation d’avec sa mère ; au début de sa vie F.M éprouve un grand attachement envers son père, il essaie d’être bon, de lui obéir à tout instant, son frère et soeurs ne suivaient pas la même politique; il croyait qu’ainsi il pouvait obtenir l’amour complet de son père, mais ce dernier après avoir divorcé de sa mère se remarie encore une fois, il entretient une très mauvaise relation avec sa belle-mère.

Tout le refoulement surinvesti de cette emprise, semble-t-il, à tout instant refoulé et face à un sentiment d’anéantissement total, ce qui est refoulé s’échappe et cette fois-ci sans contrôle : « pareil à un ressort déformé » ; rien ne serait comme avant, il passe à l’acte délictuel double, son acte de viol et d’homicide, serait-ce face à ce sentiment d’anéantissement et la peur de perte d’identité ?

Selon ses dires, il tâchait même d’être gentil avec tout son entourage et voisinage, il était presque le préféré chez tout le monde. Malgré tout, le père de F.M ne répondait pas tellement aux besoins de l’enfant et ne partageait pas aux yeux de son fils l’amour demandé ; donc, le père, semble-t-il, cesse d’être à la fois source de sécurité et repère d’identification et d’intériorisation, d’où perturbation à la fois de son identité personnelle et de son Surmoi.

Dans sa vie sociale, il n’avait ni ami ni copain, que des petites amies. En ce qui concerne sa vie sexuelle, il révèle que malgré ses multitudes relations, il n’y trouve aucune satisfaction sexuelle, « tu peux te dire que j’ai pas un appétit sexuel » d’autre propos révèlent sa fierté concernant la manière de « baiser », « comme une cinquantaine » pour marquer l’effet de l’expérience.

D’autre part, il ne se hait pas, il ne se sous-estime pas, il se croit meilleur que ceux de son âge, pour lui le temps passe lentement.

A la moitié de l’entretien, et à une question détectant le ralentissement des pensées, il répond « ça dépend, où je me dirige, si je me dirige vers une sortie ou une conversation

avec une personne, j’en prends en considération, j‘ai pas compris la question! Non, difficilement, facilement, ce n’était pas compliqué avec moi, si tu veux dîner, même le dîner avec difficulté ». Il se lance dans la réponse, quelques instant après, il réalise l’incompréhension de sa réponse, je répète la question avec quelques éclaircissements, sa réponse vient toujours loin de la réalité de la question! Nous ne savons pas si cela nous renvoie à des traits psychotiques ou si cela revient à une mauvaise compréhension de la question, ou encore une simple fatigue pour nous dire qu’il commence à perdre l’intérêt.

A propos des hallucinations, il signale avoir toujours entendu des voix qui le fatiguent, avec un sourire il dit « c’est vrai, à force de fatigue, je sens entendre ces voix, je croyais que ça se passe avec tout le monde, cela me faisait interroger sans le dire à personne », d’autre part, comme une obsession : « la dernière conversation que j‘ai eue ou la dernière sortie que j’ai faite me revient toujours, puis le lendemain je l’oublie, quand je me sens coincé, d’autre me vient (comme quoi ?) Des choses, cela est difficile à se rappeler».

« C’est juste, comme tu le dis, à un temps donné, quand je ne marche pas, je dors, assis, quand je suis avec quelqu’un, je sens que je parle avec une autre personne, celui-là me comprend bien, me voit clairement, comprend chaque mot que je prononce. Une personne me cause trois quatre heures, si comme il n’a rien dit, ma tête n’assimile pas, ça rentre d’ici et sort de là202, il y a ma tête n’était pas vide, il y a autre chose, je me regarde, il me voit, je le vois pas, j’ai fait des tests, ils m’ont dit que j’ai des vibrations, j’ai fait un I.E.G en 92 ou 93. Je te fais souffrir en écrivant ? ».

« Me voit clairement » : cette expression peut nous renvoyer à un vécu conflictuel de l’emprise de son père, pour y échapper ; semble-t-il, F.M a créé ce personnage qui le prend en considération, qui le respecte et lui donne sa place et son importance, c’est ce qu’il a tant cherché, ce qu’il a tant éprouvé, comme moyen de substitut ; à mon avis il a crée ce personnage dans un essai défensif contre la folie complète. D’autre part, il semble qu’il a toujours besoin de sentir sa propre emprise envers les autres personnes : sa question sur ma souffrance du fait d’écrire ne révèle-t-elle pas cette tendance ? Fallait-il lui répondre par un «oui» au lieu d’un simple « non » pour lui faire plaisir ?

Il signale d’autres formes d’hallucinations en rapport au goût et enfin des hallucinations sensorielles, il lui arrive de sentir quelqu’un le toucher (serait-ce en rapport avec des fantasmes de scène primitive ?).

Quant aux circonstances qui l’ont amené en prison, il cite une liste de diagnostics, comme s’il récitait un rapport : « bref, écouter le père ; le bon coeur, l’incapacité d’exécuter ce que je veux qui serait utile pour moi et pas nécessairement nuisible, l’absence d’une mère qui éduque, comment te le dire, c’est le plus important, à propos de ma vie affective et sexuelle, j‘ai pas un problème, chaque personne pratique avec une, il a un sexe, je la baise comme une personne de cinquante ans ». « Le procès : homicide d’une petite amie ». Il ne nie pas l’homicide, mais ne dit rien du viol, cependant l’association libre peut nous mener vers le sexuel dans l’affaire, il parle de sa mère puis du sexuel, nous pouvons détecter le besoin d’éprouver son pouvoir, son existence dont l’acte sexuel est l’unique moyen.

Pour le secret de sa vie, il dit qu’il n’y en a qu’un seul : c’est « découvrir le secret du divorce de la mère (toujours à la troisième personne), il m’a fait surtout tomber, toute ma fraternité a pu le surmonter, ils ont suivi leurs études, ont eu des boutiques, ils ont pensé à soi sauf moi, et l’emprise de mon père surtout, j’ai même oublié de penser à mon avenir» Ce secret qui le torture serait-il en rapport avec la scène primitive ?

Avant d’arriver à la fin de l’entretien, il révèle un sentiment phobique, d’écrasement ; il ajoute « oh! J’ai oublié te dire que lorsque j’entends des cris la nuit et que je suis à la maison, je vois un cercle (il s’approche de moi en indiquant son doigt à un dessin en forme de tourbillon sur ma chemise) je vois une ronde en désordre qui m’entoure, c’est la seule qui me faisait peur la nuit, elle me fait réveiller, ça m’étonnait de constater que je dormais (il te frappait ?) Oui, beaucoup, quand j’étais petit, maintenant il me domine, même, ici, parfois, dans la chambre, je sens que les murs s’approchent de moi, est-ce psychologique ou mental, je sais pas ? »

C’est à la fin de l’entretien que nous découvrons que durant toute sa période d’enfance, il était sous l’effet d’une violence physique, d’autre part, il semble de même que les scènes de disputes violentes entre les parents ne sont pas passées inaperçues à l’enfant et que leurs traumatismes demeurent toujours. Ce cercle qui l’enferme serait-il l’emprise de son père ? Les murs vont-ils l’écraser, seraient-ils signe de la peur d’anéantissement ?

Il clôture l’entretien en disant : « enfin, merci pour toi, tu m’as reposé, tout était dedans ! »

A la recherche du phallus paternel, un besoin d’éprouver son pouvoir, de sentir son existence face à un sentiment d’anéantissement devant un père violent, agressif, dictateur et opprimant, vécu d’un traumatisme narcissique précoce ; la séparation de sa mère, absence d’une identification primaire ; perturbation de l’identité subjective et personnelle.

Violer, prouver son pouvoir, sa virilité devant les yeux de son père.

Tuer serait-il en partie un geste adressé à la mère ? Telle peut être l’histoire de F.M.

En fin du compte, il faut le dire ici, il y a quelque chose qui ne marche pas, bien que, suivre ses intuitions dans n’importe quelle analyse ou conclusion scientifique semble non raisonnable, mais il faut le dire ici, que tout au long de l’entretien, j‘ai senti que F.M a déjà bien préparé son scénario, qu’il est très intelligent au point de bien connaître ce qui rend la société indulgente envers ses crimes, il présente les excuses de sa déviance sur «un plat en argent». Il me semblait qu’il jouait aux autres et qu’il cache la vérité au fond de lui-même pour échapper à la punition.

Il y a déjà deux ans que cet entretien s’est déroulé, j’ai suivi ses nouvelles du dehors de la prison, j’ai su qu’il a suivi des cours en « informatique » dans un programme de réhabilitation spéciale à l’intérieur de la prison, j’ai eu une conversation au téléphone, avec

son professeur qui m’a transmis que F.M était parmi les premiers même le meilleur. A un autre niveau, j’ai su encore qu’il est à présent à l’hôpital des maladies mentales étiqueté «fou » ; une fuite sûre de la punition.

Il refuse de dessiner.

Notes
195.

- Cette expression en langue maternelle de l’interviewé montre l’importance et sa place chez ses proches,

196.

- Expression don a l’habitude pour débuter une phrase pour montrer la sincérité.

197.

- En désignant toute sa fratrie.

198.

- Le mariage au Liban est religieux et non civil.

199.

- Dans la société libanaise, tutoyer les autres est très usuel et naturel.

200.

- Cette question concerne le repos, je voudrais savoir si le repos ne serait atteint qu’à partir d’une relation sexuelle, car l’expression « quand je suis avec ma petite amie » recouvre plusieurs sens, ce peut être dans la présence sans qu’il y ait une consommation sexuelle complète.

201.

- Ca pourrait nous envoyer vers des détails importants de sa vie.

202.

- Cela signifie qu’il ne retient rien dans la tête.