Interprétation

H.M débute l’entretien, toujours avec un grand sourire (si quelqu’un vient de raconter une blague, à peine peut-on se contrôler pour garder un air sérieux, je pense qu’un léger sourire m’a échappé).

Cependant son comportement au début nous paraissait un peu bizarre, il paraît «l’homme gai » là où il est! Néanmoins, l’apparence paraît parfois fictive, pouvant nous détourner de la réalité, c’est durant l’interprétation que nous posions ce problème ; derrière cette apparence gaie, cacherait-il une dépression masquée ?

« Tout le monde est sérieux et religieux à mon exception », sa mère est décédée après une maladie grave, son père “a essayé de se remarier sans le pouvoir, car il est devenu âgé, l’homme a besoin d’une femme pour le servir”, il semble que la femme pour lui paraît non respectée et considérée comme un objet sans valeur, cela nous fait nous interroger sur l’image de la femme ainsi que sur l’imago maternelle au départ.

Il paraît que le rôle de cette dernière, comme son environnement l’exige, était dans l’enfantement, prendre soin de sa maison et surtout de son mari. L’enfant semble perdre son repère d’identification primaire parmi les diverses occupations de la mère, sa mère instable ne répondrait-elle pas à ses besoins affectifs ?

D’autre part l’expression “sans le pouvoir” serait-il signe direct de l’incapacité sexuelle de son père ?

Il quitte l’école pour travailler dans des bistrots, à l’âge de dix-sept ans il rejoint une milice armée, il y reste cinq ans sans participer à aucun combat. Cela nous fait penser que peut-être par faillite du rôle paternel, H.M avait toujours besoin d’une imago paternelle forte et d’un repère d’identification et d’intériorisation, raisons pour lesquelles il a rejoint la milice comme substitut.

Dans un témoignage ultérieur, il dit « celui qui pense seul, rien ne va marcher, j‘ai essayé, quand j‘ai voulu me fiancer, si j’avais demandé l’avis de mon père et ma mère, tout aurait changé, tout à la fin était faux ». Cela révélerait-il encore son désir de dépendance primaire ?

Face au mot « sein » il dit « tête », il paraît toujours être dans la phase orale, puis il ajoute : « tu cherches des choses embarrassantes ! » Cela nous fait nous interroger sur son éducation sexuelle et la manière dont il concevait la scène primitive, malheureusement, le reste de l’entretien nous fait défaut. Il a eu sa première relation sexuelle à l’âge de quinze ans avec une fille de même âge, du village.

Selon ses dires H.M était différent de toute sa fratrie, d’autres paroles vont dans le même sens : « j‘ai une mentalité très différente de ma fratrie, je reste toujours en mauvaise entente avec eux, surtout mon frère aîné, il est très religieux, moi, j’aime, comme on dit je suis méchant, j’aime les problèmes, des drogues et des bagarres, c’est pour ça que je suis entré ici, quand je suis devenu membre dans le parti, j‘étais presque adulte, j’ai mené une vie à ma guise, j’avais des mauvais copains, ils m’ont fait arriver là ». En ce qui concerne l’acte de viol, il semble fonctionner sur un sorte de déni lui servant comme défense, mais en ce qui concerne ses autres actes de délinquance, plus tard, des témoignages ultérieurs pourraient nous montrer un fond dépressif.

Son image de soi semble ici mise en jeu : «tous sont des bons à mon exception », « je suis différent...» etc. Cela est-il vraiment ce qu’il pense de lui-même ou est-ce le miroir de ses parents à travers lequel il se voit, son image réfléchie par les yeux de ses parents ?

Il semble que H.M ait connu une diminution de ses capacités à assumer son rôle au sein de sa société et son environnement. « J’évite les gens, la plupart du temps je reste solitaire, je suis timide », « chaque décision m’angoisse », « je suis pas bon », « c’est de ma faute, Dieu nous demande pas d’être pareil ».

Plus tard, au cours de l’entretien, il commence avoir l’air un peu sinistre, le sourire le quitte, il nous confie que ni sa vie affective ni sa vie sexuelle ne lui donnent satisfaction.

Manifesterait-il des symptômes de dépression derrière sa perte d’intérêt, sa fugue de l’école, sa consommation d’alcool, de drogues et son union à la milice ?

Il évoque le décès de sa mère sans commentaire et sans émotion en signalant simplement qu’elle était cancéreuse. Il paraît incapable de faire le deuil. Son passage à l’acte de viol vient-il juste après cette période de séparation, il agresse une jeune fille de son milieu de travail. Passe-t-il à l’acte face à un sentiment de perte de l’objet primaire, devant une menace d’inexistence personnelle, pénétrer serait-il une façon de prouver sa propre existence ?

Note : il refuse de dessiner.