III LE POINT DE RUPTURE : LES EVENEMENTS ET LA FOI

A ceux qui lisent l’histoire de Jeunesse de l’Eglise comme celle du rétrécissement inéluctable d’un grand dessein, passé d’une ambition de réconciliation de l’Eglise avec le monde moderne à des préoccupations strictement centrées sur la classe ouvrière, l’équipe de JE pense qu’il est temps de fournir des explications. C’est ce sentiment d’un déficit de lisibilité du parcours et du projet de Jeunesse de l’Eglise qui est à l’origine de l’ouvrage Les événements et la foi 719. Il explique aussi la structure de l’ouvrage, composée d’une mise au point sur l’état des recherches - un rapport d’étape en quelque sorte -, puis d’un historique du mouvement et enfin d’une sélection de documents significatifs du travail mené durant les dix années écoulées.

Trois éléments ont donné à ce douzième Cahier un retentissement particulier : son contenu, avant tout, et notamment le texte de Maurice Montuclard qui, sans apporter vraiment du nouveau, enfonce quelques coins d’une manière percutante qui ne passera pas inaperçue ; son titre, ensuite, qui, dans une formule inspirée, résume si bien toute la démarche de J.E. ; son aspect de bilan, enfin, donné autant par la forme choisie, la date de parution - peu avant l’année 1952, qui marque dix années de publications - que par la condamnation qui fera a posteriori de ce Cahier le dernier recueil de Jeunesse de l’Eglise.

Rappelons une évidence. Ce douzième Cahier n’avait pas vocation à être le dernier. L’équipe de J.E. ne pouvait imaginer la tournure bientôt prise par les événements et possédait plusieurs projets dans ses cartons. Pourtant cette ultime livraison a des allures de chant du cygne. Dans le texte très inspiré que signe Maurice Montuclard, J.E. brûle toutes ses cartouches. Son projet est exposé d’une manière qui ne laisse plus aucune équivoque possible. Le mouvement sera jugé sur ce qu’il pense vraiment. Le discours est à l’image de la pensée : clair, vigoureux, radical. Le temps des passes à fleuret moucheté est révolu. L’ouvrage se clôt par cette injonction : « Que celui qui a des oreilles pour entendre entende. »

La procédure d’élaboration du Cahier est la même que celle des livraisons précédentes : les thèmes de travail ont été répartis par équipes de rédaction et six questions mises à l’étude. En voici les grandes lignes :

De nombreux collaborateurs placés dans chaque commission sous la responsabilité pratique d’un membre du « noyau » de J.E. –Maurice Montuclard, Marie Aubertin, François Le Guay, Gilles Ferry - sont pressentis pour traiter chacun de ces points. On retrouve ainsi les noms de Georges Suffert, Maurice Combe, Henri Desroches, Louis Althusser, Charles Maignial, Jean-Jacques Kirkyacharian... Une intervention du père Chenu est envisagée pour traiter la quatrième question. Mais le projet était sans doute trop ambitieux et la structure trop lourde. Au bout du compte, le résultat est, comme souvent, bien éloigné du projet initial. Seule la première question sera effectivement traitée et par le seul père Montuclard. Le travail de documentation prévu par la troisième équipe sera recentré sur les publications de Jeunesse de l’Eglise. Enfin, sous la forme d’une « lettre à un ami » inquiet des ruptures et des engagements de Jeunesse de l’Eglise, Gilles Ferry retrace l’itinéraire de J.E. depuis les années 40 et cherche à expliquer ses prises de position.

Notes
719.

« Un ami nous disait, en juin dernier : « Après bientôt dix ans de travail, le moment n’est-il pas venu pour vous de ramasser, en une synthèse solide, l’ensemble de vos positions ? Croyez-moi, même les lecteurs qui vous ont suivi depuis 1942 souhaitent que vous fassiez cette mise au point ». Les événements et la foi, avertissement, page 7.

720.

F.M., 16, 1, 19.