1.2 - Urbanisation

La prise en compte de l'urbanisation s'inscrit dans la problématique générale du changement social. Balandier cité par Brillon, note que la vie provoque une transfiguration des rapports familiaux traditionnellement prescrite. Elle entraîne un relâchement des contraintes sociales et suscite un état de disponibilité engendrant un désarroi certain chez le nouveau citadin (Brillon, 1980b, 156). Elle transforme comportements et relations communautaires, induit des formes d'exclusion supplémentaires. Les structures familiales se transforment et la pression du mode de vie urbain les rendent fragiles et instables (Derquer, 1987, 413-416) si bien que l'enfant est victime du manque d'intérêt des parents (Marguerat, 1987). Ainsi, dans l'Afrique au Sud du Sahara, la délinquance juvénile est presque exclusivement un problème urbain (Dinitz, 1982, 291), dans la mesure où la vie moderne de type occidental a provoqué dans les villages un déchaînement d'appétits nouveaux. Il en résulte la délinquance et d'autres comportements vicieux : ce sont les écueils de la civilisation du monde moderne (Mungal, 1987, 426). Les conséquences de cette urbanisation en ce qui concerne le Zaïre (aujourd'hui République Démocratique du Congo), peuvent être résumées en ces termes :

Il ressort de ce qui précède que le fait urbain constitue la clef de voûte de l'explication de la criminalité africaine juvénile. Cette approche ne peut totalement nous éclairer car elle met au rebut les différences entre les individus donc accorde peu de place au Psychologique, ce d'autant plus que chaque famille, chaque individu à sa façon d'intérioriser les influences urbaines. A ces travaux nous objecterons par des critiques sociologiques. Trois auteurs, Kouakou N'Guessan, Memel-Fotê, Touré (1978, 17), montrent que l'urbanisation n'est pas un processus unilinéaire et qu'elle accuse des contradictions internes, car certaines institutions traditionnelles sont transposées dans les villes aussi bien dans les quartiers que dans les usines et dans les bureaux où elles transforment leur structure à un degré plus ou moins élevé par le processus de l'adaptation, ce qui dénote de la complexité de la société urbaine africaine contemporaine par ailleurs conflictuelle : de nouveaux schémas de relations sociales y émergent ; on constate des adaptations sociales à travers lesquelles le sujet s'efforce de se comporter pratiquement devant une diversité de cadres et de groupes de référence à partir d'une socialisation qui s'effectue dans des groupes primaires qui changent de nature (Houchon, 1983, 149). Ces données montrent que l'urbanisation n'est pas nécessairement pathologique, chaque individu ayant sa capacité propre à s'adapter ou non : «il est vrai que les jeunes qui émigrent vers les cités urbaines posent de sérieux problèmes en termes de logement et d'emploi (...). Or, contrairement à ce que l'on peut penser, tous ne deviennent pas délinquants» (Kabena-Basue, 1987, 449). Il y a donc des limites à ne considérer que le fait urbain comme susceptible d'apporter le seul éclairage sur les comportements délinquants des adolescents africains (Koudou O., 1994a). Peut-être le recours au facteur socio-économique permettra-t-il de comprendre ces comportements.