2.3 - Re-appropriation des valeurs socio-morales et culturelles traditionnelles

Une autre tendance consacre à la ré-appropriation des valeurs africaines traditionnelles, un axe de prévention notamment en insistant sur le ressaisissement des parents (en particulier du père) de plus en plus démobilisés (Bassitché, 1974, 182), de moins en moins de modèles identificatoires (Bassitché, 1979, 42). Nous retrouvons dans cette problématique Mungal qui, conclu sur la nécessité d'éduquer les masses, de les enseigner, d'inculquer aux jeunes générations les valeurs africaines, témoins de l'authenticité africaine dans la mesure où l'importance de la déviance est une conséquence de la disparition des valeurs traditionnelles essentielles (Mungal, 1987, 436). Koudou K. (1990, 560), en guise de stratégie, préconise une cohérence entre le dire sur les valeurs et les comportements par rapport à ces valeurs car l'incohérence morale, les décalages quotidiens entre la morale ou le discours sur la morale et les comportements sociaux influenceraient négativement l'appropriation des valeurs morales chez l'enfant. Cependant, la question essentielle aujourd'hui est celle de savoir si les valeurs que les adultes prônent pour les enfants sont les mêmes que les enfants _ surtout de la rue _ défendent. Car il semble que nous nous projetons trop facilement en projetant nos propres valeurs qui pourraient être aux antipodes de celles des enfants ; en effet, selon la plupart des adultes, les enfants devraient mener une vie saine dans laquelle la satisfaction de leurs besoins seraient garantie, vivre dans un environnement protégé, une famille ou une institution où leur sont enseignées les valeurs fondamentales de la société etc. Or il se trouve par exemple que les valeurs des enfants de la rue sont celles de survie, c'est-à-dire celles qui leur permettent d'apaiser leur faim (Dallade, 1990, 14). Ces considérations révèlent qu'il faut prendre en compte les valeurs des jeunes dans la rue et de la rue qui ne sont pas forcément les nôtres, voire les valeurs ancestrales qui sont différentes selon les pays (Kabena-Basue, 1987, 458). L'appropriation des valeurs constitue donc une préoccupation pour les spécialistes dans les stratégies de prévention de la délinquance juvénile. La question est celle de savoir si cette re-appropriation peut être efficace si elle ne s'accompagne pas d'une volonté politique. Il faudrait donc renforcer ces valeurs par d'autres mesures comme par exemple le renforcement juridique de la protection des mineurs.