III - MODELES INTEGRATIFS

Depuis que la célèbre formule de Lewin (C = P x M) définit la conduite (C) comme fonction des caractéristiques de la personne (P) et de son milieu (M), les théoriciens en criminologie se sont de plus en plus orientés vers une approche intégrative de l'explication du comportement délinquant en privilégiant soit le psychologique, soit le sociologique, soit le comportementaliste, soit le multifactoralisme, soit intégrant diverses explications sociologiques faisant fi des différences individuelles (Leblanc, 1993a, 139). Il est possible de regrouper ces modèles en six modèles principaux : modèle de processus et de relation socio-pathique de l'Ecole de Louvain ; modèle de Bayonne ; modèle du sujet auto-poiétique de l'Ecole de Porto ; modèle longitudinal expérimental sur l'agression physique de Montréal ; modèle du comportement social différentiel ; modèle intégratif et multidimensionnel de Montréal.

Contrairement à la précédente présentation, nous exposerons au niveau de chaque modèle les axes explicatif et préventif dans la mesure où ces modèles sont très structurés.

Il serait utile de rappeler que depuis quelques années, des réflexions militent en faveur d'une orientation intégrée ou intégrative da la criminologie. Szabo (Leblanc, 1990, 23 ; 1995, 184) avait déjà recommandé des formes d'intégration dont l'intégration multidisciplinaire et l'intégration des niveaux d'analyse du phénomène de la délinquance, mais également que la criminologie soit à l'écoute de la biologie, de la psychologie et de l'anthropologie culturelle et sociale et qu'elle soit mise en rapport avec la norme changeante sociale et le droit (Szabo, 1993). C'est dans cette même perspective que Pinatel (1980, 270) prôna une criminologie intégrale _ et intégrée par leur association profonde dans une conceptualisation commune, spécifiquement criminologique. Avec Canepa (1990, 199 ; 1991a, 51 ; 1991b, 254), «l'évaluation isolée des facteurs biologiques et sociaux, reconsidérée en dehors du cadre clinique et global de référence, ne présente aucune valeur et aucune signification» ; et les traits psychologiques sont modifiables sous l'influence des facteurs ambiants ou des facteurs culturels et sociaux qui deviennent criminogènes dans la mesure où chaque sujet va les accepter, au plus profond de sa propre psychologie individuelle, au point de modifier l'image de soi (Canepa, op. cit.). Born (1983, 147) opte pour une perspective de la délinquance basée sur l'apprentissage social et Cario (1991a, 221 ; 1991b, 219-236 ; 1991b, 137-159 ; 1994, 98 ; 1996, 68-73), à partir des théories neurophysiologiques comportementales du biologue Laborit, note que le crime est un comportement social différentiel dans une analyse intégrée phénoménologique, dans une approche globale multi-disciplinaire, axe pouvant déboucher sur la formation globale et intégrée en criminologie. Enfin référons-nous à Walgrave qui propose de recentrer la délinquance persistante grave autour du concept de confrontation entre «un jeu et le système de contrôle social formel de la société» et examine les liens entre délinquance, source et résultat de cette confrontation, et vulnérabilité sociétale (1990, 427-431 ; 1993, 9 ; Cario, 1996a, 111).