2.4 - Expansion des besoins de sécurité (matérielle et affective

Adolescents de justiceAdolescents non de justice  
Insécurité matérielle Sécurité matérielleInsécurité matérielle Sécurité matérielle
Eff. %Eff.% TotalEff. %Eff.%Total  
Adolescents Abandonnés157 91,3158,7 17279 792121100  
Adolescents non abandonnés00 006100 0602 2,67697,478  
Total157 88,22111,8 17881 45,59754,5178  
X2 = 103 ; X2 TS au seuil de 0,001 pour 1dl. P(x ≥ 10,83) = 0,001.X2 = 41,7 ; X2 TS au seuil de 0,001 pour 1dl.
C = 0,61.
P(x ≥ 10,83) = 0,001
C = 0,44.
 

Chez les adolescents de justice, l'insécurité matérielle sous forme de besoins constamment ressentis est très prononcée (91,3 %) alors qu'elle l'est moins (2,6 %) chez les adolescents non de justice. La différence entre les deux distributions est significative. Cette insécurité est liée à l'abandon parental et traduit les besoins matériels constants (argent, nourriture, habillement).

L'insécurité se présente ici comme un état ressenti constamment par rapport à un manque matériel au cours de l'enfance, mais aussi par rapport à un manque affectif A. A., 14 ans : «J'avais besoin toujours d'argent» ; G. A., 17 ans : «je voulais à manger» ; S. L., 15 ans : «je cherchais à m'habiller».

Adolescents de justiceAdolescents non de justice  
Insécurité matérielle Sécurité matérielleInsécurité matérielle Sécurité matérielle
Eff. %Eff.% TotalEff. %Eff.%Total  
140 92,1127,9 15261 69,32730,788  
Séparation tardive18 69,20830,8 2633 55,92644,159  
Sans séparation0 000 003 9,72890,331  
Total158 88,82011,2 17897 54,58145,5178  
X2 = 32,7 ; X2 TS au seuil de 0,001 pour 2dl. P(x ≥ 13,82) = 0,001.X2 = 16,1 ; X2 TS au seuil de 0,001 pour 2dl.
C = 0,39.
P(x ≥ 13,82) = 0,001
C = 0,29.
 

Si les adolescents de justice ont éprouvé durant l'enfance un sentiment prononcé d'insécurité matérielle, ils éprouvent également une insécurité affective (92,1 %) par rapport aux adolescents judiciarisés chez qui la sécurité affective domine (90,3 %). Notons que le sentiment d'insécurité ressenti est étroitement dépendant de la séparation précoce parent-enfant et renferme des besoins affectifs : absences subites de parents ressenties : K. J., 14 ans : «je ne me sentais pas protégé» ; M. F., 15 ans : «je n'avais pas de soutien» ; K. P., 15 ans : «je n'étais pas en sécurité» ; M. A., 17 ans : «je ne me sentais pas en insécurité».

Il apparaît à partir de ce qui précède que les facteurs socio-criminogènes primaires d'une manière générale et le dysfonctionnement familial primaire d'une manière particulière, par les mécanismes de précocité, régularité et de singularité, ont favorisé la construction progressive de traits psychologiques "primaires" chez la plupart des adolescents de justice, traits coexistant chez un même individu. Ces traits moins atténués chez les adolescents non de justice sont fortement liés aux facteurs du dysfonctionnement familial ; ceci signifie que les sentiments de rejet et d'abandon, la dévalorisation de soi, l'hypertrophie du Moi et l'insécurité matérielle et affective que nous considérons comme formant la personnalité à risque délinquant primaire sont des constructions progressives des comportements parentaux (séparations précoces parents-enfants, abandon, rejet, dévalorisation, carence des repères socio-moraux). Ces traits sont susceptibles de préparer les sujets-enfants à la dyssocialité. Dans cette perspective, ils vont soutenir le comportement délinquant.

En effet, la personnalité à risque délinquant primaire comme construction deviendra facteur qui contribuera à l'émergence du comportement délinquant.

Les différents traits retrouvés chez les adolescents de justice sont fortement liés aux comportements délinquants au cours de l'enfance. (Les calculs du X2 montrent qu'il y a une forte relation entre les comportements délinquants et les traits psychologiques primaires observés chez les adolescents).

Dans cette perspective, la personnalité à risque délinquant décrite et vécue à une époque (enfance) par les adolescents de justice pourrait avoir contribué, au même titre que les facteurs du dysfonctionnement familial avec lesquels elle est par ailleurs en interaction, à l'émergence des comportements délinquants. Elle constitue par conséquent l'ensemble des facteurs psychocriminogènes primaires. Ainsi deux types de facteurs sont déterminants dans l'émergence des comportements délinquants : les facteurs socio-criminogènes primaires et la personnalité à risque délinquant primaire qui conduit à la vulnérabilité psychologique. Deux "terrains" sont donc favorables à l'émergence des comportements délinquants ; mais suffisent-ils pour expliquer les premiers passages à l'acte ? Etant donné que des sujets dans les mêmes conditions, c'est-à-dire présentant une vulnérabilité sociale et psychologique apparente ne passent pas toujours à l'acte, n'existe-t-il pas un groupe de facteurs dont le rôle serait de déclencher le comportement délinquant ou de servir de détonateur à celui-ci ?