Conclusion partielle

La fiction pose la question essentielle du langage. S'il semble évident que la fonction première du langage est de communiquer selon un code commun, il semble non moins évident que cette fonction restreint considérablement le champ du langage. Pour les poètes, le langage est un imparfait instrument existentiel car un conflit existe entre l'individu et le groupe, entre la langue socialisée et la langue personnelle. Par ailleurs, le pouvoir du langage est tel que chacun cherche à se l'approprier, quitte parfois à manipuler ou à détruire l'autre. Les écrivains tentent de résister contre ce pouvoir d'assimilation et cherchent une langue différente qui donne toujours plus de liberté à l'individu, en créant des réalités imprévisibles. La fiction montre de nouvelles configurations verbales qui permettent une autre perception du monde. La fiction est donc une construction qui permet la venue d' une autre langue et par conséquent de nouvelles manières de penser : elle est un outil didactique dans la mesure où elle apparaît comme une expérience qui permet de valider des savoirs indémontrables. La fiction confère à l'anecdote une valeur de vérité car l'histoire racontée est inséparable de la démonstration. Elle apporte des réponses fictionnelles aux questions posées dans une société et propose ainsi à chaque lecteur de se poser les mêmes questions. En ce qui concerne le rapport à la langue, les fictions proposées suggèrent l'idée selon laquelle la langue est le lieu de tous les affrontements, individuels ou collectifs ; dans le même temps, la langue est présentée comme le moyen de régler les conflits. Cependant, si les fictions posent le postulat d'une langue «de l'autre côté», elles suggèrent la difficulté, pour cette langue, d'être perçue, entendue, comme telle.