3.3. Littérature et éthique

Les disciplines d'enseignement résultent de choix politiques qui se justifient par des finalités que se fixe la société à un moment donné de son histoire. L'Etat garantit les contenus disciplinaires : ainsi, les thèses créationnistes ne peuvent être enseignées dans le cadre de l'école.

Le contexte international actuel témoigne du nécessaire dialogue entre les cultures. Cela suppose une éducation à la confrontation de systèmes de valeurs qui passe par une remise en cause de toute forme d'ethnocentrisme culturel. L'école a pour objectif une éducation fondée sur l'ouverture à l'altérité culturelle. Pour cela, elle propose une réflexion sur les valeurs véhiculées dans les textes du patrimoine quand il s'agit de parler de l'altérité. L'histoire littéraire témoigne de cette constante préoccupation. Elle propose une ouverture à la pluralité culturelle en racontant des expériences particulières. Par ailleurs, on sait que le lecteur partage l'expérience des personnages par identification ; de ce fait, les fictions littéraires permettent de s'ouvrir sur les autres et de comprendre d'autres expériences du monde.

Certes, la fiction est une construction autoréférentielle, mais elle est en même temps ancrée dans le réel ; de ce fait, comme le fait remarquer Jean-Louis Dumortier 442 , elle ‘«’ ‘coupe le public de son expérience de la vie, mais, en même temps, (…) le relie au monde des hommes.’ ‘»’ ‘’Dans le même sens, Bertrand Leclair 443 fait remarquer que ‘«’ ‘si la littérature a pour vocation de dépasser, de s'arracher à son époque, il faut bien, pour qu'elle s'en arrache, qu'elle y soit mêlée. (…) la littérature ne se lit pas plus qu'elle ne s'écrit hors du monde, c'est-à-dire hors de l'époque et de la communauté au sein desquelles elle s'affirme vivante et active, pas plus qu'elle ne se lit ou s'écrit hors de la culture qui lui préexiste et dont elle doit également s'arracher (peu de livres ont été aussi manifestement écrits, non pas pour ou en fonction, mais dans leur époque que La Métamorphose, sans jamais s'y référer, et c'est bien pourquoi il a su la transcender.’ ‘»’ ‘’De ce fait, le récit de fiction élargit les limites du monde dans lequel baigne le lecteur. Dans le même temps, le récit de fiction est idéologique dans la mesure où il appartient à un système de représentations et de valeurs ; le lecteur est amené à se situer par rapport à cette idéologie et à questionner sa propre idéologie. Ces différents discours par rapport à l'altérité culturelle permettent de faire comprendre le recouvrement des discours et des idéologies et de prendre conscience de leur pluralité.

Notes
442.

Jean-Louis Dumortier, Lire le récit de fiction, p. 96

443.

Bertrand Leclair, Théorie de la déroute, p.43