3. 4. 2 La dynamique du psychisme : l’énergie mentale

Sigmund Freud, comme l’a bien montré Paul Ricoeur dans De l’interprétation (1965), n’est pas non plus resté insensible à la prégnance de cet imaginaire énergétique. Toute l’Esquisse d’une psychologie scientifique, écrite en 1895, apparaît ainsi traversée d’une exigence de scientificité - que Freud abandonnera ou du moins nuancera par la suite - tout entière calquée sur le modèle de la thermodynamique et des théories physico-chimiques de Mayer et Helmholz. La Naturphilosophie et son vitalisme sont supplantés au profit d’une théorie basée sur les notions de force, d’attraction, de répulsion, de conservation de l’énergie. La notion de constance «Q», unifiant sous un unique concept tout ce qui produit de l’énergie, est transférée vers la psychologie, la science psychologique que tentait à l’époque de construire Freud. Le cerveau est alors ramené à une somme d’excitations proche de la circulation de l’énergie physique. Paul Ricoeur à propos de l’Esquisse écrit ‘: ’ ‘«’ ‘c’est un courant qui circule, qui ’ ‘«’ ‘ occupe ’ ‘«’ ‘, ’ ‘«’ ‘ remplit ’ ‘«’ ‘ ou ’ ‘«’ ‘ évacue ’ ‘«’ ‘ et ’ ‘«’ ‘ charge ’ ‘«’ ‘ les neurones ; la notion si importante d’ ’ ‘«’ ‘ investissement ’ ‘«’ ‘ a d’abord été élaborée dans ce cadre neuronique, comme synonyme d’occupation et de remplissement [...] ; c’est en ce sens que l’Esquisse parle de ’ ‘«’ ‘ neurones investis ’ ‘«’ ‘ ou ’ ‘«’ ‘ vides ’ ‘«’ ‘ ; on parlera encore d’élévation ou d’abaissement du niveau de la charge, de décharge et de résistance à la décharge, de barrière de contact, d’écran, de quantité emmagasinée, de quantité librement mobile ou ’ ‘«’ ‘ liée ’ ‘«’ ‘.’ ‘»’ (1965 : pp. 85-86) Partant, cette psychologie quantitative tente d’élaborer une théorie générale du fonctionnement des neurones ramenés à un système mécanique traversé de flux, de forces en interaction. L’appareil psychique du sujet, dans ce jeu complexe ou sens et puissances se confondent, se spatialise en autant de topos interdépendants. Comme l’indique Ricoeur, ‘«’ ‘il y a des lieux, parce qu’il y a des relations d’exclusion qui sont des relations de force (résistance, défense, interdiction).’ ‘»’ ‘ (’ ibid. : p. 129) L’inconscient - Ics, le préconscient - Pcs, le conscient - Cs - vont de fait délimiter ces lieux psychiques distincts où topiques et énergétiques s’agencent et se complètent.