I. G. Animateur social

Pierre travaille alors dans le domaine socio-éducatif, dans une commune notamment, espérant “ pouvoir faire partie du personnel communal en tant qu’animateur et maître-nageur ” : “ ‘J’ai été éducateur dans une ville avec des fonctions d’animateur. Et bien, pour arriver à motiver les enfants, c’est ce qui est le plus dur ... J’ai été choisi parce que, pour moi, motiver les enfants c’était vraiment la base ... J’avais trouvé des façons pour arriver à les motiver qui intéressaient donc les gens avec qui je travaillais. Et je le cache pas, j’allais dans les bars chercher les jeunes. Plutôt que d’aller se droguer, donc on allait faire de la voile, on mettait en place une structure de ski’ ”. Puis, Pierre relate une situation vécue. “ ‘Je me souviens avoir créé un stade pour des jeunes qui étaient défavorisés. Donc, j’ai travaillé de concert avec la mairie, la maison des jeunes à l’époque et, quand j’étais accueilli à cet endroit, on me lançait des cailloux sur ma voiture et sur moi. Et, au bout de trois mois donc, je commençais à être collègue avec les jeunes puisque j’allais jouer au ballon avec eux. Après, on a eu le projet de construire ce stade. Le stade existe toujours d’ailleurs. Donc, avec les jeunes, on avait eu le projet de monter un stade, le terrain était pas très loin de chez eux et c’était un terrain qu’on a fait aplanir avec des grosses machines, on a tracé des bandes et on a créé ce terrain. On a commencé à organiser des tournois inter-quartiers, que les jeunes ne se sentent pas exclus hors des quartiers. Ça marchait très bien ... Et l’année d’après donc j’étais toujours animateur la mairie m’a dit : “ c’est fini. on n’a plus de sous. On ne peut plus vous embaucher’ ”. Ce changement de la politique municipale “ ne plus avoir d’argent pour le travail des éducs ” induit Pierre à penser qu’il n’a “ pas pu vraiment arriver à (s’) intégrer ”, ce qu’il vit comme un échec et lui permet de comprendre la révolte des jeunes dans ce genre de situation intolérable : “ Dans la détresse où ils vivaient, leur faire miroiter cet espoir et puis après leur couper l’herbe sous le pied, c’est quelque chose d’inhumain. C’est les prendre pour rien. Et même nous ”.

L’échec au concours, même s’il est difficile en tant qu’échec professionnel, n’engendre pas chez Pierre une dévalorisation de son image personnelle. Il garde un excellent souvenir de sa formation à l’UFRAPS. De même, il est fier du travail d’animation accompli avec les jeunes, de la façon dont il est parvenu à les motiver. En réalité il ressent davantage un sentiment d’injustice, de non reconnaissance de ses compétences qu’un sentiment d’échec, et exprime la compréhension de ces mêmes sentiments chez les adolescents en difficulté qu’il avait aidé à se donner des buts et des projets à réaliser qui les inséraient dans la collectivité et leur procuraient aussi du plaisir.